XXII- Conspiration

161 21 16
                                    

Aline


Aïe...

Lorsque je reprend enfin connaissance, c'est pour être accueillie par le mal de crâne du siècle. Super. Je me redresse difficilement, mon corps entier semblant être fait de verre pilé. Je peine à ouvrir les yeux, éblouie par la luminosité trop forte après l'obscurité des flots. Je me fais pourtant violence et, tout en tenant ma tête douloureuse, force mes paupières à s'ouvrir au monde qui m'entoure.

- Vas-y doucement, tu ne t'es pas vraiment ménagé et ton corps va t'en faire payer le prix fort.

La voix de Fenris me parvient de loin en loin, comme à travers du coton. Son regard est la première chose que je croise. Mais si dans ses yeux d'or brillait autrefois une profonde déception et un mépris de chaque instant, je crois désormais apercevoir une lueur d'appréciation.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? dis-je d'une voix empâtée.

- Tu as joué à Moïse, pas de quoi en faire tout un plat. D'autant que maintenant, tu es HS alors que nous sommes au beau milieu du pire cauchemar des mortels.

Il a beau jouer les désagréables, je vois à son expression que je l'ai au moins un peu impressionné. Mais peu importe. Nous touchons au but. D'ici quelques heures, ma mère sera libre et à nous deux nous serons capables de réitérer l'exploit en sens inverse.

Je me relève d'un bond, trop vite. Je perd l'équilibre et manque de m'écraser au sol mais Fenris me rattrape avant que mon nez ne rencontre le sol rugueux.

- Je t'ai dis de ne pas y aller trop vite, et toi, tu te lance à l'assaut des Enfers sans même être capable de marcher. J'admire ton optimisme, mais pour le moment, on va plutôt faire à ma manière, ok ? Rien ne presse, le sacrifice n'aura pas lieu avant au moins deux jours, ce qui te laisse largement le temps de te reposer.

Tiens, c'est vrai que, maintenant qu'il le dit, je suis plus lasse que je n'ai jamais été.

- C'est ma magie qui m'épuise autant ? demande-je au bout d'un moment alors que le démon me pousse à me rallonger sur la couchette de fortune faite de feuilles d'un vert flamboyant.

Il secoue doucement la tête tandis que je me sens déjà couler dans le sommeil.

- Ta magie ne t'épuise pas, elle te rend plus forte. C'est si tu dépasse tes limites, comme aujourd'hui, qu'elle se nourrit de toi. D'autant qu'ici, le temps n'existe pas et la nuit ne vient que lorsque les souverains le décident. Il peut s'écouler des semaines, des mois voire même des années avant que la nuit ne tombe sur les Enfers.

Ses derniers mots sont étouffés par la fatigue qui m'emporte loin de ces terres étranges.

~~~~~~~~~~~~~~

Fenris


Je regarde la jeune femme glisser rapidement dans les bras de Morphée et lui lance un léger sortilège de sommeil. Au moins, elle ne risque pas de se réveiller à l'improviste. Une fois sûr qu'elle n'interférera pas dans mes plans, je fais signe à l'être caché derrière les hautes herbes luxuriantes. La créature s'avance alors vers moi, gracieuse, belle à en couper le souffle et plus puissante que n'importe quel être, elle, la première femme de la Création, la reine des Enfers, ma mère.

Lilith... Comment la décrire ? Une beauté dangereuse dont le regard pâle vous fige sur place aussi sûrement que le ferait une gorgone. Ses longs cheveux noirs dévalent son corps gracile et soulignent la blancheur de sa peau veloutée. Un corps d'ange et une âme de serpent.

Ex Nihilo -2- Si vis pacem, para bellumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant