II- Infraction

202 36 7
                                    

Aline

Sans plus de considération, l'inconnu s'engouffre dans la maison et en ouvre toutes les portes sous mon regard ébahit. Il est complètement con ce type ou quoi ? Il croit qu'entrer chez les gens comme ça en se présentant comme le Diable incarné pousse les autres au respect ? Je vais lui dire deux mots à ma façon à cet imbécile d'illuminé...

Je me redresse et avance à grands pas rageurs vers lui, traversant tout le couloir d'une traite.

- Hey, vous ! Qui vous a permit d'entrer ici ?! Sortez immédiatement ou j'appelle la police !

Il ne me fait même pas l'aumône d'un regard et se contente de lâcher un petit rire sec tout en baragouinant je ne sais quoi à propos des mortels stupides.

- Je ne plaisante pas ! Sortez d'ici tout de suite ou je vous jure que vous le regretterez !

Je ne suis qu'à quelques centimètres de lui. Si je pose ma main sur son épaule, il va le sentir passer. Mamie m'a appris deux ou trois trucs de défense qui ne me servent qu'à attaquer... Que voulez-vous, on ne se refait pas...

Mais alors que je tends la main pour poser ma paume sur lui, il se retourne si vite que mes yeux peinent à suivre le mouvement et je me retrouve clouée au mur, ses mains emprisonnant mes poignets, son visage à quelques millimètres du mien.

- Écoutes-moi bien, fillette, dit-il d'une voix calme et posée, je ne suis pas ici pour t'entendre déblatérer des âneries. J'ai des choses à faire, une vie à vivre, des gens à tuer, alors tu vas être une bonne fille et me laisser parler à ta grand-mère sans faire d'histoires !

Je reste figée, choquée par ce brusque retournement de situation tandis qu'il s'éloigne d'une démarche féline, ses pas plus silencieux qu'un spectre, comme s'il marchait sur de l'eau, et reprend son inspection de la maison. Moi qui croyais dominer la scène, je me rends compte que j'étais loin du compte. Et que j'ai laisser entrer chez moi un inconnu capable de résister et même de surpasser mes capacités surnaturelles.

Je tente de remettre de l'ordre dans mon esprit. Pourquoi quand ce type parle j'ai l'impression d'avoir le devoir de l'écouter et de lui obéir ? C'est tout de même très contraignant comme émotion !

Soudain, j'entends les marches craquer. Il va fouiller les chambres à l'étage. Il va trouver ma grand-mère. Il a dit qu'il avait des gens à tuer. Le salopard ! S'il la touche, je le tue !

Je pique le sprint de ma vie à travers la maison, monte les marches usée rendues glissantes par les milliers de pieds qu'elles ont supportés quatre à quatre et arrive en même temps que lui devant la chambre dont je bloque l'accès en faisant barrière de mon corps.

- Si vous voulez entrer ici, il faudra d'abord me tuer.

Il sourit. Un sourire à faire frémir un mort.

- Te tuer ? En voilà une drôle d'idée. Pas déplaisante, mais totalement inutile, futile et peu efficace. Tuer une Fille de la Terre n'est jamais une bonne idée, ça vous retombe constamment sur le coin du nez. Maintenant, excuse-moi, mais comme je te l'ai dit et répété, je dois parler à ta grand-mère.

Un geste de la main et une puissante bourrasque m'écarte de son chemin. Une bourrasque. A l'intérieur. Il n'y a que moi que ça choque, nom de dieu !

Sans plus tergiverser, il pousse la porte qui grince légèrement sur ses gonds et entre sans s'annoncer. Quoi que, vu le boucan qu'on a fait, il y a des chances pour que Mamie soit réveillée.

Ex Nihilo -2- Si vis pacem, para bellumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant