I- Qui est ce type ?

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Aline

Quelqu'un frappe à la porte. Avec insistance. C'est incroyable ça, il n'y a jamais personne à venir dans ce trou, et c'est précisément quand le four se met à sonner qu'un idiot se décide à nous rendre visite !

J'éteins rapidement le four et jette rageusement la manique rouge usée jusqu'à la corde sur le plan de travail.

On frappe à nouveau.

- Oui, oui, j'arrive, un peu de patience ! dis-je en pressant le pas tout en écartant au passage mon sac de cours négligemment étalé par terre.

Qui que soit ce badaud, s'il se met à sonner, je risque de ne pas être très agréable. Et si ce sont encore les sales gosses du voisin grincheux et bedonnant de la rue d'en face, je ne réponds plus de rien !

Je tourne la poignée et ouvre vivement la porte. Seulement, la personne sur le pas de la porte n'est ni un gosse ni le facteur. Il s'agit d'un homme brun d'assez grande stature aux yeux d'une étrange couleur. Une couleur... fascinante... Comme si tout l'or du monde s'était déversé dans les prunelles brillantes et envoûtantes de ce bel inconnu... Aline, reprends-toi ! Je secoue doucement la tête pour remettre mes idées dans le bon sens.

- A qui ai-je l'honneur ? demande-je, sur la défensive et, je dois l'avouer, un peu ailleurs.

Vous me trouverez peut-être parano, mais dans ce monde que j'ai réappris à connaître, on n'est jamais trop fou.

- Pardonnez-moi, j'ai dû me tromper d'adresse, répond l'inconnu. Je cherche une certaine Angélique Chevalier.

- C'est ma grand-mère, réponds-je sans réfléchir avant de me mordre la langue.

Qui que soit ce type, je n'ai pas à lui décliner mon arbre généalogique au grand complet. Aussitôt, je tente de rectifier mon erreur.

- Elle n'est pas disponible pour le moment. A qui ai-je l'honneur ?

- Votre grand-mère ? Diable ! Que le temps passe vite. Si vous vouliez bien me laisser entrer, votre grand-mère se fera un plaisir de me présenter à vous.

Je reste de marbre avant de reprendre.

- Qui êtes-vous, monsieur, s'il-vous-plaît.

L'homme soupire.

- Bien, mademoiselle, je déteste perdre mon temps. Je suis une très vieille connaissance de votre grand-mère.

Je fronce les sourcils sous le coup de l'incompréhension.

- Vous ne devez pas être un si vieil ami que cela.

- Ah oui ? Et pourquoi ça ?

- Vous avez quelques années de plus que moi, 22 ans, maximum. Ma grand-mère en a presque quatre-vingt. Sans compter qu'elle ne m'a jamais parlé de vous.

- Et comment pourrais-tu le savoir, fillette ?

- Ne m'appelez pas comme ça, m'emporte-je. Et dites-moi qui vous êtes, bon sang !

L'homme sourit.

- Nous perdrions trop de temps à passer par tous les noms que j'ai pu porter. Maintenant, excuse-moi, mais j'ai d'autres chats plus importants à fouetter.

Il m'écarte sans ménagement du pas de la porte, mais j'ai plus d'un tour dans mon sac. Je recule d'un bond, claque la porte derrière moi et érige un bouclier rougeâtre empêchant l'inconnu de pénétrer plus avant dans la maison.

Il sourit à nouveau.

- Bien, je vois que tu n'es pas totalement ignorante de ta nature. C'est une bonne chose, tu n'imagines pas toutes les peines que nous avons eu, l'archange et moi, pour faire découvrir ses véritables capacités à ta tête de mule de grand-mère.

Je reste un instant décontenancée, mes bras toujours tendus maintenant le bouclier.

- Je vous demande pardon ? Un archange ? Mais qui êtes-vous à la fin ?!

L'homme se retourne vers moi, un sourire fin faisant briller son regard, et d'un vague geste de la main fait imploser mon bouclier. Le retour de magie me propulse au sol, sonnée. Je secoue la tête, tentant de remettre de l'ordre dans mes idées. Lorsque je redresse la tête, le visage de cet inconnu aux capacités étranges n'est qu'à quelques millimètres du mien. C'est alors qu'il se décide enfin à décliner son identité.

- Moi ? Je suis le Diable.

Ex Nihilo -2- Si vis pacem, para bellumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant