XXVI- Amère déception

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Aline


Toujours incapable de bouger ne serai-ce qu'un orteil, je dévisage la mère et le fils en train de s'esclaffer en cœur. J'ai peur. Je ne comprends pas. Pourquoi rient-ils ? Pourquoi cessent-ils de se battre ? Qu'ai-je encore fait ?

Soudain, mon rêve me revient en mémoire. Fenris me guidant aux Enfers, me menant jusqu'à ses portes avant de participer à ma chute.

Il m'a trahie.

Evidemment ! Qu'attendre de plus d'une bête immonde telle que lui ! Je sens la colère, la honte, l'amertume et l'incompréhension m'envahir. Comment ai-je pu être assez bête pour lui faire confiance ? Pourquoi ai-je offert ma vie en échange de la sienne ? Pourquoi m'a-t-il trahie malgré son serment ? Malgré notre pacte ?

Fenris se redresse sans difficultés, essuyant d'un revers de main le sang lui coulant sur le visage. Lui qui allait si mal il y a un instant encore, le voilà frais et dispo, comme si rien ne s'était passé.

Lilith, quant à elle, se remet difficilement de sa crise de rire.

- Ah, stupide petite mortelle, que tu es drôle ! Et prévisible. Et faible. Autant de qualités recherchées pour une future esclave. Néanmoins, j'apprécie à leur juste valeur ton courage et ta force, Gamine de la Terre.

Je lui jette un regard meurtrier qu'elle ignore en souriant, avant de tourner mon attention sur le prince démoniaque, ce traître.

- Et toi, tu n'as rien à me dire ? Pas d'excuses ? Pas d'explications ?

Il hausse un sourcil, inconscient, semble-t-il, de la gravité de son acte.

- Et pourquoi un Prince devrait-il s'excuser devant une mortelle ?

C'en est trop !

- Tu m'avais promis ! Tu avais juré que tu me protégerais, que tu protégerais ma mère ! Tu avais dit que tu nous mettrais en sécurité !

- Et n'est-ce pas exactement ce que j'ai fait ?

Je le dévisage sans comprendre.

- Cet endroit, reprend-t-il en écartant largement les bras, embrassant le paysage, est le plus sûr et le plus imprenable des Trois Royaumes. Je respecte toujours mes engagements, fillette, et celui-ci m'était plus précieux qu'aucun autre. Je t'ai laissé choisir les termes du contrat, si les conséquences de ton choix te déplaisent, tu es la seule à blâmer. Maintenant, il est temps que tu honores ta part de ce pacte.

Il laisse planer le silence un instant avant de le briser d'un ordre sec.

- Rend-moi la puissance que ta famille m'a volée.

Je laisse échapper un rire froid et sans joie, atterrée par le culot de ce monstre.

- Et pourquoi ferais-je une chose pareille ? Tu m'as dupée, alors n'attend rien de plus de ma part que mon mépris et ma haine !

Il fronce les sourcils, visiblement mécontent.

- J'ai respecté ma part du contrat. Tu as simplement omis de préciser comment, où et quand je devais vous laisser, ta mère et toi. A mon sens, ce lieu est l'endroit le plus sûr de tous. Je suis un démon de parole. J'avais juré de te protéger, tu es protégée par une armée entière de monstres. Alors maintenant que les choses sont claires et que tu as fini d'entacher mon honneur, respecte ta parole.

Il a raison. Cela me tue de l'avouer, mais il a parfaitement raison. J'ai donné les termes du contrat, j'ai voulu l'accompagner en Enfer, j'ai insisté pour retrouver ma mère à ses côtés. Et je nous ai condamnées toutes les deux. Et le monde avec nous.

Ex Nihilo -2- Si vis pacem, para bellumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant