Chapitre 4 - James

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J'essuie mon front plein de sueur, à l'aide de ma manche, et mes poings frappent de nouveau le sac, devant moi. Chaque coup est un peu plus violent que le précédent, expulsant toutes les émotions que je ressens.

- C'est fini pour aujourd'hui, James. Rentre chez toi. Si tu continues, tous tes muscles vont finir par te lâcher.

J'acquiesce devant Tomy, qui me regarde, soucieux.

- Ça va ? me demande-t-il doucement, et je hoche la tête.

Tomy est celui qui garde cette petite salle de boxe, il est toujours là pour ceux qui en ont besoin. Parfois, il laisse même la salle ouverte, pour que l'on puisse y entrer, si nécessaire.

- À plus, lancé-je, en sortant, avec un petit geste de la main.

J'enfonce mes écouteurs dans mes oreilles, et marche rapidement vers l'appartement de mon meilleur ami, les clés dans la main.

Personne ne se promène dans les rues, pour mon plus grand bonheur ; je n'ai jamais aimé les contacts avec les autres. En montant le son de ma musique, je m'abandonne dans ce monde incroyable, où tout est possible.

La main sur la porte d'entrée de l'immeuble où habite mon meilleur ami, je sens quelqu'un me bousculer, et me parler, mais je n'écoute pas.

Cette personne ose m'arracher un écouteur, et je l'entends me dire de faire attention. Je la toise, furieux qu'elle m'ait sorti de l'univers dans lequel j'étais plongé.

Je monte les marches, lentement, appelle Nathan, mais je n'ai aucune réponse. Et je m'inquiète.

- Nathan, putain, c'est moi !

Mon cœur bat plus rapidement dans ma poitrine, et je prends peur. Ce n'est pas dans ses habitudes, de laisser quelqu'un sur le pas de sa porte. Encore moins quand il connaît cette personne.

- Nathan ! l'appelé-je une dernière fois.

J'ouvre maladroitement la porte, et le cherche. Et c'est en le trouvant, allongé au sol, dans la salle de bain, que je prends conscience d'une chose : je n'aurai jamais dû le laisser seul.

- Réponds-moi, soufflé-je, Nathan...

J'ai beau me dire que les boîtes de médicaments à côté de lui, ne signifient rien, je sais exactement ce qu'il s'est passé. Parce que ce n'est pas la première fois qu'il fait une overdose.

Mais c'est probablement la dernière.

- Pas toi...

Les sanglots que je refoule éclatent, ils m'arrachent brusquement au mensonge auquel je crois.

Impossible. Nathan ne peut pas mourir. Pas maintenant.

Mais pourtant, c'est bel et bien vrai. Je ne sens pas son pouls, sous mon pouce. Je ne sens pas son cœur battre, je ne le sens pas vivre.

Mes yeux brumeux se posent sur les cachets au sol.

- Pourquoi ? Pourquoi, putain ! Pourquoi t'as fait ça, hein ?

J'étouffe un rire.

- Putain, murmuré-je. Tu m'avais dit que tu ne recommencerais plus ! Alors, pourquoi...

L'envie de frapper de nouveau dans mon sac refait surface. J'ai besoin de défouler ma douleur. Mais en voyant le corps inerte de mon meilleur ami sur le carrelage, je ne peux me résoudre à faire quelque chose que je regretterai.

Alors, je fais ce qu'il me semble le plus juste, les doigts tremblants. J'appelle les urgences, bien que je sache que c'est déjà trop tard. Que je ne le reverrai plus jamais. Qu'il ne sera plus là pour m'écouter. Que je ne pourrais plus écouter ses blagues pourries. Que je ne pourrais plus vivre avec lui.

Repoussant ma colère, j'ouvre aux infirmiers qui attendent devant la porte, que je n'avais même pas pris la peine de fermer.

- Dans la salle de bain, lâché-je, et soudain, je ne peux plus retenir mes larmes, et tout explose. Tout.

Je m'isole sans la cuisine, et pose mes mains sur la table.

Respire, putain. Respire. Ne laisse pas la colère prendre possession de toi.

Je souffle, essayant de me calmer, en vain. La douleur est si grande, que je m'écroule au sol, et renferme mes bras autour de moi-même, comme pour me protéger de toutes les émotions qui m'assaillent.

- Hey.

Je relève la tête, et observe le jeune homme qui me regarde.

- Tout va bien ?

Un rire nerveux sort de ma bouche.

- Mais oui, tout va bien. Mon meilleur ami vient de se suicider, mais tout va bien. Vous avez raison. Tout devrait aller bien. Putain ! C'était mon meilleur ami, merde !

Je n'arrive plus à me contrôler, et lorsque l'infirmier se rapproche de moi, sûrement pour me réconforter, je recule brusquement.

- Ne me touchez pas ! hurlé-je. Vous n'avez pas le droit !

Mais quelques minutes plus tard, ses bras recouvrent mon corps, et je me laisse aller contre son torse.

- Respirez, me dit-il, et ne pouvant plus lutter contre la fatigue, je l'écoute.

Quand il voit que je ne pleure plus beaucoup, il se recule, et me tend une enveloppe.

- Elle était posée près de lui. Je suppose que c'est à vous de la lire.

- Merci, murmuré-je, sans en avoir vraiment envie, et il s'arrête juste devant la porte de la cuisine.

- Si vous avez besoin, n'hésitez pas. Vous pouvez venir avec nous.

Je hoche la tête, en guise de réponse, et dès qu'il quitte la pièce, je sors la feuille de l'enveloppe.

Lorsque je reconnais l'écriture de Nathan, un triste sourire effleure mes lèvres.

<< James.

Je suis désolé. Je sais que tu m'en veux.

Je t'avais promis de ne pas recommencer.

Mais je l'ai fait. Je l'ai voulu, James.

J'ai tellement de mal à écrire ces mots. Je pense que tu pourrais comprendre.

J'y arrivais plus, James. Plus du tout. Je suis désolé.

Prends soin de toi, et n'oublie pas que je suis encore là. Peut-être loin, mais je suis là.

Vis. Vis la vie comme tu le rêvais, comme tu m'en parlais tout le temps. Une femme, des gosses, un boulot sympa. Ce gros cliché.
Mais je t'en supplie, vis. Ne fais pas la même erreur que moi. Ne laisse jamais personne te tuer. Ne te tue pas.

Tu seras toujours dans mon cœur.

Ton meilleur confident,

Nathouille. >>

Un nouveau sourire vient caresser mes lèvres. Toujours ce surnom de gamin.

En y réfléchissant, je me dis qu'il a raison. Mon meilleur ami n'est pas parti. Il est encore là. Et je vais devoir apprendre à vivre sans sa présence humaine.

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C'était ma rentrée aujourd'hui, et j'ai failli oublier de publier ce chapitre ! Comment s'est passée votre rentrée ?

Cœurs sur vous, à mercredi prochain x)

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