Chapitre 76 - Éclatement

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Sonia

— Je peux rester là cette nuit ?

De ma chaise, je tourne mon attention sur lui. Depuis cinq bonnes minutes, j'essaie de prendre une bouchée de l'hamburger froid. Mon coeur bat à un rythme irrégulier sans s'arrêter. L'atmosphère pesante me stress. Dos à lui, j'ignore s'il m'observe alors je me force à manger comme si mon âme avait quitté mon corps et que le respect que j'ai pour lui m'avait transformé en robot. Le pire, c'est de ne pas savoir le fond de sa pensée. Est-ce qu'il croit que mon père a vraiment eu un accident ?

Comment lui dire ou lui faire comprendre que j'ai besoin qu'il parte pour voir si Pierre m'a répondu ? Je n'ose même pas sortir mon téléphone de mon sac à main sous peine que ses yeux errent sur mon écran. Même s'il ne le montre pas, je suis sûr que son cerveau s'est métamorphosé en ordinateur. Il doit sûrement étudier chacun de mes mouvements, guetter le moindre soupçon d'hésitation ou de nervosité de ma part et en tirer des conclusions. Tout ceci en gardant sa gentillesse naturelle.

— Je... j'adorerais, mais j'ai du travail.

Encore un mensonge de plus. Son sourire disparaît automatiquement et le mien forcé quelques secondes après.

— Ça me dérange pas. Je resterai là, sur ton lit à lire un livre ou à dormir.

J'aurais jamais pensé que son caractère attentionné me dérange à ce point et me mette aussi mal à l'aise.

— Mais... m-moi ça me dérange.

Mais quelle fille je suis ? Son changement d'expression d'un seul coup entre la gentillesse et la surprise me ferait presque envie de me planter un couteau dans le coeur. Dans un silence envahissant, il arrête de toucher la peluche que m'a offerte Lucille pour Noël.

— C'est quoi ton problème avec moi ?

Sa voix claque comme un coup de feu. Il repose le lapin en le balançant presque et se lève d'un coup du lit. Je vois dans ses gestes et son regard qu'il est réellement blessé. Ce changement si brutal confirme mes insinuations, il se forçait à être gentil alors que dans sa tête c'était tout une grande théorie qui se mettait en place. Pour sujet, mon mensonge et ma soudaine distance avec lui.

— R... rien, voyons.

— Si putain ! Je vois bien que t'as qu'une envie c'est que je te laisse tranquille ! Je t'ai fais quoi au juste depuis dimanche ? s'exclame-t-il en balançant ses mains dans l'air violemment.

Même si sa colère me bouleverse, je la comprends. Depuis le début, il a toujours tout fait pour me rendre heureuse et le résultat, c'est que moi, je lui mens. Mais tout ce que je fais, c'est pour éviter que Pierre et Florent ne lui fassent de mal. Sauf que je suis incapable de faire comme si rien était. J'ouvre la bouche, mais rien ne sort, je suis comme paralysée. Les larmes me piquent les yeux.

— Tu me dis que t'es en dépression, mais alors, pourquoi tu m'as rien dit, Sonia !? Je croyais que... je croyais qu'on était assez amoureux pour tout se dire, non ?

Je veux réellement mourir, vraiment. S'il me quitte, je préfère me jeter de la fenêtre de ma chambre du campus plutôt que de subir ce drâme, bien plus puissant. En prenant le courage de le regarder dans les yeux, je vois qu'il est vraiment triste et désemparée.

— J'essaie depuis tout à l'heure de me dire que... que t'es fatiguée, que t'es triste et bien trop renfermée sur toi-même pour me parler. Mais je vois bien que tu me mens, je suis pas bête.

Son ton a baissé, mais ce qu'il me dit me déchire le cœur. Il n'a plus aucune retenu, sa voix m'implore. Il n'attend qu'une chose, c'est que je confirme ses dires et que je lui dise la vérité, mais je reste bouche-bée, sans un mot et encore sonnée de ses mots désespérés. Ses yeux humidifiés me font lâcher des larmes tout à coup.

Une Première Fois [Amour Sucré Nathaniel] Réécriture T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant