Northwind

Chapitre 14

Il m'a fallu presque une semaine pour me remettre de cette crise de nerfs. Le deuxième cours de sorcellerie a porté sur l'histoire des sorciers. J'étais un peu déçue de ne pas apprendre à faire de la magie. C'est un mal pour un bien, tu dois savoir marcher avant de savoir courir. Après ce qu'il t'est arrivé, mieux vaut prendre son temps. Je m'empresse de rejoindre Suzan au réfectoire pour la pause du midi quand je croise mon professeur préféré au détour d'un couloir. Il affiche un sourire rayonnant et semble détendu.

« Bonjour Mademoiselle Balmond. Vous semblez bien pressée ? »

« Je le suis. »

Elias baisse le ton pour être sûr que je serais la seule à entendre ce qui va suivre.

« Peux-tu passer à la maison ce soir ? J'ai beaucoup de choses à te dire. »

« A me dire ou à me faire ? »

Je deviens écarlate à la vision d'Elias qui rougis lui aussi, totalement surpris par ma phrase. Ma pensée a été plus vite que ma raison et ces mots sont sortis malgré moi. Cela ne fait qu'une semaine et demie que j'ai découvert sa nature et accessoirement qu'Aaron a mis un terme à ce qu'il y avait entre nous, enfin s'il y avait quelque chose. Il faut que je me reprenne. J'ai dit que j'avais besoin de temps. Je ne dois pas me laisser prendre au jeu.

« Attention vous rougissez Mademoiselle... » Me chuchote-t-il avec un sourire.

« Je crois que je l'avais senti merci. J'ai beaucoup de questions à vous poser. Malheureusement je ne pourrais pas ce soir. Je suis prise avec Camilla. Demain ? »

Il hoche la tête en silence et s'éloigne avec un sourire satisfait qui me laisse perplexe.

***

Cette idée d'Héritage ne me quitte pas. Jour et nuit. Chaque fois que je laisse mes pensées sortir de l'ombre, l'idée que je puisse être une apprentie sauveuse revient me torturer l'esprit. Mais j'arrive de nouveau à sourire, à prétendre que tout va bien. J'ai érigé une liste des questions que je dois poser pour le rendez-vous de ce soir. Je ne veux rien oublier. L'accord des forces, ses pouvoirs, les miens. Il me faut des réponses à toutes ces questions, il en va de ma santé mentale.

En sortant à la hâte du manoir ce vendredi pour me rendre chez Weaver, je m'aperçois que le ciel est menaçant. La nuit paraît bien plus sombre qu'à l'ordinaire. Des éclairs illuminent la nuit au loin et je suis persuadée qu'il va se mettre à pleuvoir. Gagnée ! A peine arrivée au centre-ville, des trombes d'eau se mettent à tomber et je me retrouve trempée en quelques minutes. Forcément dans mon empressement, je n'ai pas pensé à prendre un parapluie. Quand j'arrive au niveau des derniers bâtiments, je suis stoppée net par une apparition. Un fantôme. La surprise me fait reculer de quelques pas. C'est une vieille dame habillée de façon très élégante sortie d'un autre siècle. Elle s'abrite sous un parapluie mais les gouttes la traversent pour venir s'écraser sur le sol. Ce fantôme n'a rien de négatif et la dame me souris chaleureusement avant de prendre la parole.

« Vous êtes trempée mon enfant ! Souhaitez-vous une place sous mon ombrelle ? »

« Euh... Non... Je vous remercie... » Réponds-je avec hésitation après un cours silence ou j'ai regardé autour de moi pour savoir si nous sommes bien seules.

« Comme vous voudrez. Faites attention à vous, le temps annonce des événements fâcheux pour vous. Vous êtes puissante, mais cette puissance peut causer votre perte tout comme votre père. Prenez garde mon enfant, les sorcières ne sont pas appréciées par ici. »

Elle disparaît sur ces mots avec un nouveau sourire, cette fois-ci compatissant. Je reste ébahie devant cette apparition. Le dernier fantôme que j'ai vu était celui de ma mère et je dois avouer que j'en avais oublié à quel point s'était impressionnant et déroutant. Mais qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Pourquoi a-t-elle parlé de mon père ? Est-il un sorcier lui aussi ? Je reprends ma route au plus vite et quand j'arrive au niveau du chemin qui mène au chalet de mon professeur, je le vois courir dans ma direction avec un parapluie au-dessus de lui. Il me serre contre lui d'un bras puissant et m'abrite avant de m'entraîner au chaud.