9 juillet 1033 Post-Aldora
Le soleil illuminait le ciel azur au-dessus de la grande cité d'Aldora, resplendissante sous les rayons de l'astre. Les rues de la ville étaient bondées, comme à l'accoutumée. Des marchands vantant les prouesses de leurs produits, pourtant si semblables à ceux de leurs voisins, des ribaudes appuyées contre le mur de leurs bordels, des aristocrates passant d'une ambassade à l'autre,...Parmi cette foule assez homogène, un homme svelte et élancé, vêtu d'un costume noir aux boutons d'or, une canne noire en main, arpentait les rues d'Aldora. À son approche, certaines commères de bas étages échangeaient des ragots sur l'homme qui marchait devant elle, baissant la voix pour ne pas êtres entendues.
Un homme froid, calculateur et endeuillé disait-on. Il aurait perdu sa famille lors de sa traversée des mers pour arriver à Aldora. Quelqu'un de déshumanisé, qui n'a plus de raison de vivre. Un homme détaché, un homme distant. Quelqu'un qu'il ne fait pas bon suivre, qu'il ne fait pas bon côtoyer.
Ces ragots, Lord d'Avalon en faisait son miel. Il appréciait savoir que la populace nourrissait une sorte de crainte envers lui, une sorte de frayeur, comme s'ils sentaient malgré eux sa véritable nature. Les Démons hantent leurs nuits depuis des millénaires, il est tout naturel qu'ils craignent un être aussi âgé et puissant que lui...
Marchand d'un pas souple et détendu, Lord d'Avalon faisait tâche dans les quartiers pauvres de la ville, ceux situés vers l'extérieur, vers les remparts. Et la dernière Guerre Sainte n'avait pas amélioré les choses, bien au contraire... La pauvreté, les orphelins et les pertes matérielles avaient explosés suite aux batailles. En passant devant un gueux dépourvu d'une de ses jambes, Lord d'Avalon lui jeta un regard compatissant.
-S'il vous plaît mon bon Seigneur... J'étais à la bataille... J'ai tout perdu...
Le Lord continua sa marche d'un pas déterminé, n'accordant aucune autre marque d'attention à l'homme, comme s'il n'existait tout simplement pas. Son regard ne s'attarda même pas sur lui.
"Tu n'as pas tout perdu, il te reste ta vie. Les humains ne se contenteront donc jamais de ce qu'ils ont ? "
Malgré des siècles passés à tenter de comprendre les humains, le démon ne saisissait toujours pas leurs motivations. Leurs vies étaient si courtes, si éphémères. Soixante, quatre-vingt, voir cent ans s'ils avaient de la chance. Mais leurs muscles se liquéfiaient, leurs membres tremblaient... Dans leurs dernières années, les humains étaient réduits à l'états de larves. Comment trouvaient-ils assez de courage pour ne pas se jeter du haut des murailles d'Aldora ? Cela échappait à la compréhension du démon et en même temps, il nourrissait une sorte de respect muet pour eux. Ils se savaient condamnés mais vivaient malgré tout. Pour un démon tel que lui, qui allait vivre des siècles et des siècles, voir des villes sortir pour retourner à la terre, des races s'éveiller puis mourir, la mort était un concept très abstrait et presque étranger. Un démon peut mourir mais face à un égal. Et qui pouvait égaler le Dévoreur d'Âmes ?
"Feu le Dévoreur d'Ames. Si mes informations sont exactes, c'est un démon de basse extraction qui m'a remplacé... L'avorton ne tiendra pas un siècle dans la Garde " Songea le démon d'un air maussade.
Certes, il s'était exilé de sa famille, loin de ses frères et de sa soeur, loin de ses pairs. Il avait conçu un enchantement si puissant que seules trois personnes dans l'ensemble des trois mondes sauraient passer au travers à condition de se trouver face à lui. Quelles étaient les probabilités pour qu'un membre de la Garde Noire ou même Raz'Lak lui-même s'intéresse à un nobliaux d'Aldora ? La couverture était parfaite. Mais au-delà d'une simple couverture, c'était son identité. De telles pensées n'appartenaient pas à Lord d'Avalon mais au fantôme de son ancienne vie.
VOUS LISEZ
Chroniques d'Avalon
FantastikAldora. Capitale de l'Empire Asférien. L'une des plus belles des cités humaines. Depuis le manoir de Lord d'Avalon, cette ville semble parfaite, épurée, pleine d'harmonie et de tranquillité. Et dire qu'à peine cinq ans auparavant, cette cité était a...