Un message clair.

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5 juillet 1996, Southern Uplands, Écosse.


- Vous ne déjeunez pas, Maître ?

Lord Voldemort se retourna. Bellatrix faisait cuire de la viande dans la cuisine, et malgré l'odeur délicieuse qui était venue flotter jusque ses narines, le mage noir déclina la proposition de sa servante. Ces jours-ci, il ne lui était pas nécessaire de répondre aux besoins primaires. Son corps n'était plus vraiment humain, et sa survie ne dépendait plus essentiellement de son alimentation, ni même de son sommeil. Il continuait de se nourrir et de dormir, tout de même, mais pouvait aisément se passer de ses activités. Et à ce moment précis, le Seigneur des Ténèbres était bien trop préoccupé pour avaler quoi que ce soit.

Bellatrix, elle, s'était mise à table et dévorait avec appétit son steak de viande non identifiée. Elle sembla deviner que son Maître se questionnait quant à ce qui se trouvait dans son assiette, car elle tenu à préciser en avalant sa bouchée :

- C'est le chien. Trop de muscles, difficile à mâcher.

Voldemort esquissa un sourire imperceptible. Après un séjour prolongé à Azkaban, ce n'était pas une surprise que la belle aristocrate n'ait aucun problème à faire d'un animal de compagnie son déjeuner. Après tout, Bellatrix n'avait pas d'horcruxe et devait continuer à se nourrir pour garder ses forces.

- Qu'allons-nous faire maintenant ?
- Je pense que nous pouvons retourner dans le Wiltshire chez ta sœur, répondit Voldemort d'une voix froide. J'imagine que le Manoir Malefoy a déjà été fouillé, plus personne ne devrait s'y intéresser désormais. Je renforcerai les protections quand nous y serons.
- Et... pour ceux qui sont à Azkaban ? se risqua à demander la mangemort.
- Ton époux te manquerait-il ? dit lentement Voldemort d'un ton sarcastique.

Les joues de Bellatrix prirent aussitôt une couleur écarlate, et elle secoua vivement la tête.

- Non, Maître, se hâta-t-elle de répondre. C'est simplement que ceux qui ont été arrêtés comptent parmi vos meilleurs soldats et...
- Je déciderai plus tard du moment propice pour leur rendre leur liberté, la coupa Voldemort. Pour l'instant, je crois qu'ils profitent du confort de leurs cellules pour réfléchir à la façon dont ils ont lamentablement échoué à une tâche d'une simplicité flagrante.

Bellatrix baissa les yeux et posa ses couverts. Visiblement, la conversation lui avait coupé l'appétit.

- J'en profite pour te dire, Bella, que je n'ai pas oublié que tu as toi aussi fait partie intégrante de cet échec, continua le mage noir. J'espère pour toi que c'était la dernière fois que tu me décevais, car je ne tolèrerai pas que l'on me serve de façon aussi pitoyable à l'avenir, tu comprends ? Lord Voldemort ne peut se permettre d'être représenté par des sorciers incapables.
- Oui, Maître, dit Bellatrix d'un ton monotone.
- Bien, Bella... maintenant, quand nous serons de retour chez les Malefoy, je veux que tu partes avec le mangemort de ton choix pour éliminer un membre de l'Ordre du Phénix. Après l'arrestation de plusieurs de mes soldats, il faut que je fasse passer un message clair à Dumbledore et sa pseudo résistance...

Les yeux de la sorcière se mirent à briller d'excitation, et un large sourire illumina son visage émacié.

- Qui, mon Seigneur ? dit-elle d'une voix aigüe. Qui dois-je tuer ?
- Emmeline Vance, répondit-il. Elle fait partie de l'Ordre depuis sa fondation, et a combattu à de nombreuses reprises durant la première guerre... C'est une sorcière qui, dit-on, excelle en matière de duel... elle a après tout, contrairement à nombre de ses amis, survécu aux attaques de mes mangemorts.
- Je n'ai jamais croisé sa route, dit Bellatrix en bombant le torse. Sinon, elle ne serait plus en vie depuis longtemps.
- Et c'est pour ça, Bella, que je compte sur toi pour l'éliminer, répliqua le mage noir avec un sourire cruel.
- Je ferai tout ce que vous commandez, mon Seigneur, susurra la mangemort en dévorant son Maître des yeux.

Lord Voldemort maintint un instant le contact visuel avec sa servante, puis détourna le regard. Il sentait son corps entier prendre vie, et savait pertinemment qu'il n'allait pas se retenir longtemps si la sorcière continuait de l'aguicher ainsi. Il se leva d'un coup, se dirigea vers les escaliers qui menaient à l'étage, lançant par dessus son épaule :

- Prépare tes affaires, nous partons dans une demi-heure.


****


- ...et c'est pour cela que nous avons choisi de partir en France plutôt qu'aux Canaries cet été, Protheus supporte mal la chaleur, dit la magnifique Romilda Parkinson. Les Greengrass ont une résidence secondaire à quelques rues de la nôtre, ça arrange les filles. Je crois que Pansy et Daphné s'entendent pas trop mal. Astoria a toujours été un peu plus réservée, on ne la voit pas trop quand elle est là.
- Ça fait des années que nous ne sommes pas allés en France, soupira Narcissa.
- Vous pourriez venir cet été ! suggéra Romilda avec un grand sourire. N'est-ce pas, Protheus ? Narcissa et Draco pourraient nous rejoindre à Nice, nous avons largement la place de les accueillir. Et puis, je suis sûre que Pansy serait ravie de passer le mois d'août avec Draco. Elle ne fait que de parler de lui.

Narcissa lança un sourire gêné aux Parkinson. Elle n'avait aucune envie de quitter le Manoir tout en sachant que Lucius était retenu prisonnier à Azkaban, mais cela pourrait aider Draco à se détendre et à penser à autre chose.

- Je crains avoir trop à faire ici cet été, mais j'en parlerai à Draco. Je sais à quel point il apprécie votre fille, je suis sûre qu'il sera partant. Et puis, il pourra en profiter pour rendre visite aux Rosier... cela fait bien trop longtemps que nous n'avons pas vu mes cousins.

Au moment où Protheus s'apprêtait à dire quelque chose, une voix aigüe résonna dans tout le Manoir. Narcissa poussa un long soupir, et attendit que le bruit des talons de Bellatrix s'arrête pour rouvrir les yeux et voir sa sœur ainée devant elle.

- Ah, les Parkinson, dit Bellatrix avec un grand sourire. Comment allez-vous ?

Ni Protheus ni Romilda ne semblaient être ravi d'être en présence de la mangemort. Protheus lui répondit que tout allait bien avec une voix si basse que Bellatrix manqua de ne pas l'entendre.

- Où sont les gamins ? demanda la brune à Narcissa.
- Hum... dans le jardin il me semble.

Un sourire malicieux se dessina sur les lèvres de Bellatrix, et elle se dirigea aussitôt en direction du jardin en criant « comment va mon neveu préféré ? ».
Cinq minutes plus tard, elle revint, suivie de Draco et Pansy, qui n'étaient définitivement pas très à l'aise. Bellatrix alla se pencher à l'oreille de sa sœur puis lui chuchoter « qu'elle avait interrompu quelque chose », et repartit en gloussant. Draco, lui, avait le visage sombre. Il savait que, si sa tante était de retour, alors le Seigneur des Ténèbres l'était aussi. L'un n'allait jamais sans l'autre.

- Draco, les Parkinson ont eu la gentillesse de proposer que tu ailles chez eux, en France, au mois d'août, dit Narcissa qui tentait de détendre l'atmosphère.

Le fils Malefoy leva les yeux vers Romilda et Protheus, et resta de marbre. Il n'avait pas l'air plus enchanté que cela par la perspective de ces vacances idylliques.

- Je vous remercie, répondit-il d'une voix trainante. Ce serait un plaisir de vous rejoindre.

À côté de lui, Pansy afficha son plus beau sourire. La jeune fille était aussi belle que sa mère. Elle avait de beaux cheveux bruns coupés courts, et de magnifiques yeux verts. Sa bouche en forme de cœur et son petit nez retroussé lui donnaient un air malicieux, et son attitude altière ne laissait aucun doute sur ses nobles origines. Elle était un match parfait pour Draco.

- Et bien, c'est donc décidé, conclut Romilda. Nous vous enverrons un hibou quand nous aurons choisi la date de départ. Merci pour ton accueil, Narcissa, j'espère que nous nous reverrons vite.
- Merci à vous d'être venus, répondit la maîtresse de maison avant de raccompagner ses invités à la porte.

Du coin de l'œil, elle vit Draco et Pansy se tenir la main, ce qui lui ôta un sourire. C'était une bonne chose que le garçon ait une amie sur qui compter en ces temps troubles.


****


Bellatrix entendit toquer à la porte, et fit un geste de la main pour l'ouvrir, toujours assise sur son lit. Elle leva les yeux de son livre et vit Narcissa, qui se tenait devant l'entrée de sa chambre.

- Oh, Cissy. Entre.

La blonde alla s'asseoir dans un fauteuil. Elle paraissait profondément troublée.

- Pansy est très jolie. Tu as bien choisi la promise de ton fils, dit Bellatrix en continuant sa lecture.
- Oh hum... ils ne sont pas promis. J'ai préféré laisser à Draco le choix de sa future épouse. Je savais qu'il n'allait pas finir avec autre chose qu'une Sacrée.
- Ah... et bien, une bonne chose qu'il n'ait pas porté ses vues sur la sang-de-bourbe dont il parle tout le temps... Quel est son nom déjà ?
- Granger.
- Ah, oui. Granger. Répugnant.
- Oui, oui, répugnant... répondit Narcissa, tête baissé.

Bellatrix ferma son livre et soupira.

- Bon, j'imagine que tu n'es pas venue me parler de Parkinson et de la sang de bourbe. Qu'est-ce que tu veux ?
- C'est juste que...je me demandais si le Seigneur des Ténèbres t'avais dit ce qu'il comptait faire pour Lucius et le reste...
- C'est bon, Cissy. Panique pas. Il les fera sortir quand ce sera le moment. Et puis, ils ne sont à Askaban que depuis quelques semaines, ce n'est rien du tout.
- Père disait qu'une seule heure entre les murs de cette prison valait une année entière de misère et de souffrance...
- Oui et bien, père aimait bien exagérer, répliqua sèchement Bellatrix.

À vrai dire, Cygnus avait toujours raconté des histoires grandioses à ses filles, et prenant soin de toujours exagérer les détails. Mais pour Azkaban, les récits du père de famille avaient toujours été d'une justesse effroyable. Chaque seconde là-bas était une seconde en Enfer. Dans cette prison, il n'y avait que la peur, la solitude, la maladie et la douleur. Une seule heure entre ses murs pouvait briser le plus robuste des sorciers, et rendre fou le plus saint des hommes. Mais il n'était pas nécessaire que Narcissa sache la vérité. Elle était assez touchée par l'arrestation de son époux pour que Bellatrix n'en rajoute. Alors Bellatrix changea de sujet.

- Le Seigneur des Ténèbres va bientôt tenir une réunion. Le Ministère tombera avant la rentrée scolaire, sois en certaine. Tout rentrera dans l'ordre.

Narcissa acquiesça, mais ne sembla pas convaincue.

- Comment as-tu fait pour échapper aux aurors cette fois ?

Il y avait de l'amertume dans sa voix. Bellatrix sut alors exactement ce qu'il y se cachait derrière cette question. « Pourquoi toi, et pas Lucius ? »

- Je suis une meilleure combattante que ton mari, c'est tout, répondit Bellatrix d'une voix hautaine. Maintenant, file d'ici. Cette conversation est terminée.

Narcissa lança un regard noir à son aînée, et sortit tout de même de la chambre la tête haute.

A Black Tale II : the Dark Lord ascendingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant