Bathilda Tourdesac.

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18 décembre 1997, Manoir Malefoy, Wiltshire.


- Cette saleté de Manoir, toujours pas d'elfe...

Bellatrix marmonnait seule dans la cuisine, à la recherche du panier de fruits qu'avait ramené sa sœur le matin même.

- Lucretia aurait perdu le peu de raison qu'il lui restait si elle avait vu la manière dont vit son crétin de fils... La grande famille Malefoy... pfff.

Bellatrix se hissa sur la pointe des pieds pour attraper la panière qu'elle venait enfin d'apercevoir, réprimant une grimace de douleur. Son dos lui faisait horriblement mal. Elle était enceinte jusqu'au cou désormais, et il n'y avait pas une seule partie de son corps qui n'était pas source de malaise. Ses seins étaient douloureux, ses jambes étaient lourdes, son estomac la brûlait et elle était proie à d'horribles bouffées de chaleur. Sans parler des crampes, des démangeaisons, de la fatigue et des sautes d'humeur. La sorcière soupira, et porta une pêche à sa bouche. Dans deux mois, tout serait fini. Elle serait enfin débarrassée de cette chose qui poussait dans ses entrailles.

- Bellatrix.

Elle fit volte-face. Lord Voldemort se tenait devant elle. Les muscles de son visage étaient tendus, son regard était flamboyant.

- Maître ?

D'un pas souple, il alla s'asseoir sur une chaise en face d'elle. Nagini fit son chemin jusqu'à lui, déplaçant son énorme corps écailleux sur le sol de marbre lisse.

- Je pars pour les trois prochains jours. Lorsque tu verras Lucius, dis-lui de faire passer ce message à Yaxley, ordonna le mage noir en tendant à Bellatrix un bout de parchemin enroulé sur lui-même. Il contient l'instruction de placer plus de Rafleurs à Godric's Hollow. S'il y a bien un endroit où Potter finira par se rendre, c'est à l'endroit où sont morts ses parents.

Les yeux de Bellatrix se mirent à briller tandis qu'elle saisissait le message d'une main fébrile.

- Est-ce là que vous vous rendez, Maître ? À Godric's Hollow ?

Voldemort acquiesça en silence. Bellatrix déglutit. La dernière fois qu'il était allé là-bas...

- D'ici mon retour, reste discrète. Ne m'appelle que dans le cas où Potter serait identifié.

Bellatrix murmura une réponse positive, puis son Maître se leva. Il tendit une main longue et fine vers Nagini qui se hissa jusqu'à lui, et les deux disparurent dans un crac presque inaudible.


****

Godric's Hollow.


Il faisait nuit noire. Les rues désertes étaient balayées par le vent glacial du mois de décembre. Une grande silhouette encapuchonnée progressait dans l'ombre, profitant du calme pour faire son chemin jusqu'à un pâté de maisons. Elle passa devant les ruines d'un foyer ayant autrefois abrité une famille heureuse, sans lui accorder le moindre regard. Ce n'est que quelques mètres plus loin qu'elle s'arrêta.
Devant elle, une maison au jardin mal entretenu se dressait. Les fenêtres étaient closes, aucune lumière ne filtrait à travers les volets endommagés. Ses habitants étaient endormis. Lord Voldemort avança d'un pas étrangement calme jusqu'à la porte, et pénétra dans la demeure sordide, suivit de Nagini qui rampait docilement à ses côtés. Le mage noir jeta un regard circulaire autour de lui. Le rez-de-chaussée semblait vide, aussi décida-t-il de gravir les escaliers qui menaient à l'étage supérieur. Alors qu'il montait en silence les marches, il s'adressa dans une sorte de sifflement étrange à l'animal qui l'accompagnait.

- Tu sais ce qui tu as à faire, Nagini, murmura-t-il d'une voix aigüe, presque inquiétante.

Le serpent répondit par un sifflement lugubre. Lord Voldemort arriva ensuite devant la porte d'une chambre, qu'il déverrouilla sans la moindre difficulté. La porte s'ouvrit lentement dans un grincement sonore, dévoilant une pièce encombrée. Parmi des dizaines et des dizaines d'objets divers qui n'avait rien à faire dans une chambre à coucher, il y avait un lit. Et dans ce lit, une vieille femme dormait paisiblement. La pauvre n'avait à aucun moment entendu les intrus pénétrer chez elle. Voldemort leva doucement sa baguette, et un jet de lumière verte frappa le corps frêle de la dame. Sa poitrine cessa de se soulever, et elle demeura immobile, comme si elle était restée endormie.

Bathilda Tourdesac était morte.

L'énorme serpent rampa alors jusqu'à son cadavre inerte, et Voldemort répéta la même incantation sept fois. Requiem aeternam non est, corpus delicti inferius devenire. Puis, lentement, le corps se mit à bouger. La vieille ouvrit les yeux. Son regard était vide. Ses mouvements étaient mécaniques. Elle ne parlait pas. Nagini hissa un sifflement qui résonna dans toute la pièce et commença à s'enrouler autour de corps dépourvu d'âme, et Lord Voldemort tourna les talons. Il laissa Nagini prendre possession du cadavre transformé en inferius, quittant sans un bruit le village semi-magique de Godric's Hollow.

Lorsque Harry Potter viendrait, il serait accueilli par la plus tendre amie du Seigneur des Ténèbres.


*****


20 décembre 1997, Poudlard, École de Sorcellerie, Écosse.


Draco regardait le feu brûler dans le manteau de marbre noir de la cheminée de la Salle Commune des Serpentards. Autour de lui, les élèves s'afféraient. Ils allaient et venaient dans la large pièce, valises à la main, tout heureux de retrouver leurs familles pour les vacances de Noël.
Les flammes vacillaient faiblement dans la cheminée. Le regard de Draco ne les quittait pas alors qu'il repensait à la lettre qu'il avait reçu quelques jours plus tôt. Sa mère lui avait expressément demandé de rester à Poudlard pour les vacances, sans lui apporter la moindre explication.

Peu lui importait. Qu'il soit entouré des siens ou non, il était seul.

- Draco ?

Le jeune homme lança un coup d'œil à Pansy avant de replonger son regard sur le feu chancelant.

- Tu ne viens pas ?
- À ton avis, répondit sèchement Draco.

Pansy se mordit la lèvre inférieure et lui lança un regard désolée avant de s'asseoir à côté de lui.

- Tu sais je... je suis désolée. Pour l'année dernière. J'ai été dure avec toi. C'était injuste de ma part.
- C'est rien, répliqua Draco d'un ton froid avant de reprendre plus doucement ; tu vas manquer ton train.

La jeune Parkinson soupira et se pencha pour saisir la poignée de sa valise en cuir.

- Je t'écrirai pendant les vacances, affirma-t-elle.
- Hmm. Tu pourras me raconter ce que c'était d'aller au bal du nouvel an avec Daphnée.

Pansy devint aussitôt rouge écarlate et laissa échapper un petit gloussement qui fit doucement sourire Draco. Son amie s'était trouvée quelqu'un d'autre depuis leur séparation, et c'était tant mieux pour elle. Draco ne pouvait pas en dire autant. Pansy finit par tourner les talons et rejoindre le petit groupe qui l'attendait pour se rendre à la gare, et Draco se retrouva seul à nouveau.


****


24 décembre 1997, Manoir Malefoy, Wiltshire.


Voldemort observa Bellatrix qui aiguisait sa dague à l'autre bout de la pièce. La dague qu'il lui avait offerte. Elle en prenait toujours grand soin, surtout depuis qu'elle l'avait retrouvée. Le mage noir considéra un moment l'idée d'aller la rejoindre et de la porter jusqu'à son lit pour la prendre contre lui, mais se ravisa. Il ne fallait pas qu'elle se fasse d'illusions. Elle portait déjà son héritier, c'était bien assez.

- Mon Seigneur ? dit-elle soudain en levant ses beaux yeux sombres vers lui.
- Hmm ?
- Comment Rodulphus et Rabastan ont-ils fait pour entrer dans notre coffre-fort, avec tous les maléfices que j'avais dressés pour le protéger ?
- Les gobelins leur ont expliqué la situation. Ils savaient qu'ils ne pouvaient rien toucher.
- Oh... oui, bien sûr.

Voldemort afficha un demi-sourire. Il savait que sa servante se demandait pourquoi l'épée de Godric Gryffondor se trouvait dans son coffre-fort. Évidemment, elle ne posait jamais de question sur les ordres de son Maître. Elle se contentait toujours d'obéir. Douce, docile, loyale Bellatrix.

- Viens par ici, finit par dire le mage noir dans un murmure.

La sorcière parut surprise, mais s'approcha de lui. Il l'invita à s'asseoir sur ses genoux, et posa une main contre le visage de porcelaine de Bellatrix qu'il approcha du sien. Au moment où leurs lèvres se frôlèrent, Voldemort fut pris d'une immense douleur et braqua aussitôt son regard sur son avant-bras gauche. Sa propre marque était devenue noire de geai. Bellatrix sauta de ses genoux, paniquée, et le regarda avec effroi. Puis, lorsqu'elle aperçut que la marque de son Maître avait pris vie, elle réalisa ce qui se passait et un seul mot s'échappa de ses lèvres :

- Potter...

Le mage noir, sans marquer une seconde d'hésitation, transplana.


****


Lorsqu'elle entendit le fracas de meubles qui se brisaient au rez-de-chaussée, Bellatrix sut immédiatement que Potter avait une nouvelle fois échappé à son Maître. Elle savait aussi qu'elle avait tout intérêt à ne pas le croiser si elle ne voulait pas subir les foudres de sa colère. Dire qu'ils passaient un bon moment avant qu'il ne sente sa marque le brûler...

Si seulement il n'y avait jamais eu cette prophétie.
Lord Voldemort aurait pris le pouvoir, Bellatrix ne serait jamais allée à Azkaban. Il aurait régné sur le monde magique de Grande-Bretagne avec sa plus fidèle lieutenante à ses côtés. Elle aurait été comme reine, et lui aurait été roi. L'ordre aurait été rétabli.

Mais Rogue, cette saleté de Rogue, avait trouvé le moyen de tout interrompre en rapportant une prophétie idiote, faite par une sorcière idiote, sur un gamin idiot. Tout était la faute de Rogue. Bellatrix ne comprenait pas pourquoi son Maître lui faisait confiance. Malgré tous les arguments que Severus avait avancé pour sa défense, la mangemort restait méfiante. Il avait précipité la chute du Seigneur des Ténèbres, et avait travaillé avec Dumbledore des années durant après sa disparition. Son pseudo statut d'agent double n'était qu'une faible excuse pour sa trahison immense. Et peu importe qu'il ait tué Albus. Ce sale sang-mêlé était un traitre infâme, un bon à rien qui n'était bon qu'à enseigner à des gamins comment concocter des potions absurdes.

Et pourtant, le Seigneur des Ténèbres lui faisait confiance. Il se trompait. Lord Voldemort tenait Rogue haut dans son estime. Bellatrix se demandait même si Severus comptait plus qu'elle aux yeux de leur Maître. Était-elle vraiment tombée si bas, comme Lucius ? Après tout, elle avait échoué à récupérer la prophétie. Elle n'avait pas réussi à capturer Potter en juillet.
Non.
Les autres avaient été punis. Rowle et Dolohov avaient été torturés, Lucius avait été humilié, tout comme Selwyn et beaucoup d'autres encore. Mais pas elle. Pas vraiment. Certes, le Maître ne la traitait plus avec autant d'importance qu'avant sa chute. Mais cela allait changer. Elle allait lui donner son héritier, et après elle pourrait à nouveau se battre pour lui et lui prouver sa valeur. Et si elle trouvait Potter...
Oh si elle trouvait Potter, elle et les Malefoy seraient à nouveau les favoris. Plus de mépris, plus de châtiments. Non. Ils retrouveraient leur place initiale, au sommet de la hiérarchie.

Dès qu'elle serait débarrassée de l'enfant, Bellatrix reprendrait du service.

A Black Tale II : the Dark Lord ascendingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant