Dean a imaginé ces retrouvailles de toutes les manières possibles et inimaginables : le rejet, la colère, la haine, les larmes, ou pire, l'indifférence.
Il a imaginé des mots crachés, des rancœurs balayées, des sourires,des blagues foireuses et même un baiser écrasé.
Mais il n'avait pas envisagé ce scénario : Castiel feignant de ne pas le reconnaître, ce regard éthéré qui le fixe sans le voir et qui lui fait un mal de chien.
Ce maudit joint au bout des doigts, l'avant-bras calé nonchalamment sur l'accoudoir.
Cemaudit joint que Clarence porte à ses lèvres tout en détournant les yeux vers la droite.
Dean sent la présence de Benny, mais il refuse de se retourner, de lâcher prise, même si son cœur bat trop vite et sa gorge le serre à l'en étouffer.
La fumée s'échappe et s'élève, noyant le bleu derrière un voile opaque avant que les orbes ne se plantent dans le vert éclaté.
"Cass ? ", répète Dean, plus incertain.
Clarence passe de Dean à Benny avant de caler son joint au coin de ses lèvres et de glisser les mains sur ses roues pour faire faire demi-tour àsa chaise.
Un moment de stupeur et soudain la colère prend toute la place. Dean est à deux doigts de perdre le contrôle quand, d'une poigne ferme, Benny le retient.
"Lâche-moi ", hurle-t-il en se détachant de son emprise.
"Dean ", d'une voix calme et posée.
Ce dernier se renfrogne tout en regardant le fauteuil s'éloigner.
"Je m'en occupe ", enchaîne Benny.
Clarence roule, heurtant un passant sans lui adresser la moindre excuse.Souffle erratique et gestes saccadés.
Benny surgit devant lui et le force à s'arrêter, mains sur les accoudoirs.
"Clarence ", lui ordonne-t-il.
Ils restent plusieurs secondes ainsi, l'un devant l'autre, sans échanger le moindre mot. Clarence fixe le trottoir en tentant de maîtriser ses mains tremblantes.
Il finit par lever celle de droite, se saisit de son joint et tire lentement une longue bouffée, fuyant le contact visuel.
"Comment ? ", la voix rauque.
"Une annonce sur un site de portés disparus ", lui répond Benny.
Clarence étouffe un rire amer avant de recracher lentement la fumée. Il observe son joint se consumer. Les cendres tombent sur le trottoir, il y voit là une pitoyable métaphore de ce qu'est devenu son existence.
Une lente chute.
Benny garde le silence, inquisiteur sous la visière. Il le regarde écraser son joint sur l'une des roues de son fauteuil avant de le balancer dans le caniveau d'un geste las.
Ses épaules s'affaissent.
"Je voulais juste le protéger ", finit-il par avouer, coudes calés sur ses cuisses, front sur ses paumes.
"Le protéger ? ", répète Benny en s'accroupissant.
"Je ne suis plus rien de ce qu'il a connu... ", désignant d'un geste vague et dédaigneux ses jambes.
"Tu ne te résumes pas à ça ", rétorque Benny.
"Non, c'est vrai... Il y a aussi les cauchemars de jour comme de nuit ", le ton empli de sarcasme, en haussant la voix et se tapant la tempe de l'index. " Les crises... la drogue...l'envie de crever ", effaçant la rage humide qui perle sur son début de barbe du dos de sa main gantée. " Ici, je suis libre... avec eux... INVISIBLE ", en se pointant la poitrine. "À défaut d'être mort là-bas à leurs côtés ", rajoute-t-il, abattu.
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Le chasseur et le soldat : Les invisibles
FanfictionUA Destiel. Il aurait dû passer à autre chose depuis longtemps, il le sait. Il a essayé, mais rien n'y fait ; ni les chasses ni ses soirées de beuverie... et encore moins le sexe...Ça le bouffe... Il se déteste pour ça.