Émotions Partagées

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Suite du flash-back

Les deux adolescents marchaient lentement le long du sentier boisé, baigné par la lumière dorée du soleil couchant qui filtrait à travers les branches feuillues des grands chênes. Le murmure léger du vent agitait doucement les feuilles, créant un doux bruissement apaisant. Une légère odeur de terre humide et de pins flottait dans l'air, mélangeant les parfums naturels de la forêt avec le léger parfum de lys que portait Yuri. Alors que la gêne des derniers évènements l'empêchait d'apprécier ce spectacle à sa juste valeur, la jeune femme finit par se rappeler de la discussion d'hier avec la mère de son ami et décida qu'elle devait lui parler de l'abandon de sa mère avant qu'il ne soit trop tard.

— Chikara-kun ? demanda Yuri, sa voix tremblante d'hésitation.

— Euh... Oui ? sursauta le garçon, ne s'attendant pas à ce qu'elle prenne la parole.

Yuri prit une profonde inspiration, cherchant ses mots.

— Tu te souviens, un jour, je t'ai parlé du fait que j'arrivais à ressentir certains sentiments qui venaient d'autres personnes ?

Chikara fronça légèrement les sourcils, intrigué.

— Mmh... Oui, pourquoi ?

Yuri serra les poings, essayant de contenir son anxiété.

— Bah ! Voilà, je préfère être franche avec toi. Hier, lorsque j'ai parlé avec ta mère, j'ai ressenti certaines choses venir d'elle et je pense que tu as le droit de savoir...

Chikara baissa la tête, ses épaules se détendant légèrement.

— C'est bon, Yuri-chan. Tu n'as pas besoin de me le dire, ma mère m'a parlé ce matin de ce que tu lui avais dit avant le repas.

— Écoute, Chikara-kun ! Je sais que je n'aurais pas dû parler ainsi à ta mère, mais elle...

Chikara sourit faiblement, les larmes aux yeux, et la prit dans ses bras.

— Merci ! 

— Que... quoi ? Pourquoi me remercies-tu ? Je... J'ai été malpoli envers ta mère et je lui ai dit des choses affreuses alors pourquoi ? Pourquoi me dis-tu merci ? demanda-t-elle, prise au dépourvu. 

Le garçon s'éloigna de la jeune fille juste assez pour pouvoir la regarder dans les yeux et prit ses deux mains dans les siennes. Il souffla un bon coup et la regarda dans les yeux.

— Si je suis arrivé en retard tout à l'heure, c'est parce que je parlais avec mes parents. Ce matin, ma mère nous a demandé de venir nous asseoir à côté d'elle, car elle devait nous parler. Alors on s'est installé autour de la table basse, près d'elle et elle nous a tous raconté. Le choc d'apprendre qu'elle était malade, la tristesse dans nos yeux, l'horreur qu'elle a ressentie en voyant mes larmes couler, la douleur que lui inflige son traitement, le dégoût de son corps qui l'abandonne, la colère face à nos faux sourires et de sa décision de se laisser mourir pour nous libérer plus rapidement.

Il s'arrêta quelques instants pour reprendre son souffle et contrôler les larmes qui menaçaient de sortir puis il reprit, concentrant son attention sur ses pouces caressant les mains froides de son amie.

— Puis, elle nous a parlé de votre discussion, de la colère dans tes yeux quand elle t'a dit être soulagée de te savoir à mes côtés quand elle mourra, de tes paroles si tranchantes, mais vraies, de ton désir de me protéger de la souffrance. Tes paroles l'ont touchée au plus profond d'elle-même et elle s'est rendu compte que tu avais raison, qu'elle avait été égoïste de vouloir abandonner quand les deux personnes les plus chères à ses yeux se battaient pour vivre un jour de joie de plus à ses côtés... Elle a décidé de se battre à nouveau, et cela, c'est grâce à toi, Yuri-chan ! Alors oui, je te remercie, merci d'avoir dit toutes ces horreurs à ma mère, merci de m'avoir soutenu tout ce temps, merci de m'avoir protégé et merci d'accepter de faire partie de ma vie.

A la poursuite de mon rêveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant