2. Dans le noir

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Ma sœur se mit à hurler et je voulus brandir ma baguette mais à peine avais-je fait un geste qu'une autre baguette s'appuya sur ma gorge.

Piégée.

Je n'arriverais même pas à protéger ma sœur comme je l'avais promis à mes parents sur le quai du Poudlard Express, à la première rentrée de ma sœur. Moi, j'y étais déjà depuis trois ans, alors je pouvais l'aider, lui expliquer.

J'en avais la responsabilité. Et jusqu'ici je l'avais toujours fait. Sauf que cette fois je ne pouvais pas. Des mains bloquaient mes poignets et une voix grave s'infiltrait dans mon esprit. J'en avais entendu parler, c'était de l'occlumencie. La voix s'insinuait de plus en plus loin dans mon esprit et résonnait de plus en plus.

« May...ne bouge plus. Tu te demandes peut-être comment je connais ton prénom? Je penses que tu t'en doutes. Je te suis depuis un an.»

Instinctivement, je cherche ce qu'il s'est produit il y a un an. Et puis je trouve.

Ma dernière crise.

Beaucoup plus instable et puissante que les autres, mais le pire était que je savais ce que je faisais. Je voulais faire du mal. Laisser ma colère, ma rage, mon désespoir se libérer.

J'avais été agressée par des Mangemorts, reconnaissables à leurs masques argentés, en pleine rue à Londres. Je sortais du Chemin de Traverse. Ils étaient arrivés, m'avaient collée à un mur, j'étais seule, et je ne savais pas me défendre. La rue était pleine de monde, mais visiblement personne ne se demandait se qui se passait. Personne ne me voyait. J'avais appelé, hurlé à l'aide, mais personne ne venait. Les Mangemorts riaient de ma détresse, et commençaient à me lancer des sorts. J'avais mal. Mal...alors je les ai regardés. J'ai arrêté de crier. Je me suis sentie me rétracter intérieurement. Et j'ai explosé. Encore et encore.

Je les ai tous tués, sauf un qui avait eu le temps de réagir et de lancer un protego. Il avait transplané et je ne l'avais plus jamais revu. Tant mieux.

Et soudain, je réalise.

Non...non, non! Il avait dû aller rapporter l'événement à ses collègues, dire qu'un Obscurial Avancé les avait tués. Ils voulait se servir de moi.

«Bien vu, petite fille. J'ai encore une chose à faire et ensuite je t'emmènerai. Vois-tu, mon maître pense que tu es une Obscuriale Avancée. Et ça l'intéresse beaucoup...tu pourrais lui être très utile.»

Non! Je ne le servirait pas. Jamais.

« Tu n'es pas de mon avis? C'est dommage, May. Tant pis pour toi. Je vais quand même le faire. Maintenant si ça ne te dérange pas, je vais aller tuer ta soeur, il ne faut pas de témoins, tu comprends? »

NON! Pas ma sœur. Axelle est ce que j'ai de plus précieux. Je ne peux pas la perdre.

Alors, mon instinct prend le dessus. Je rassemble ma rage comme j'avais appris à le faire à Poudlard, sauf qu'au lieu de la détruire, je l'insinue dans l'âme de l'homme en noir.

Je veux qu'il souffre. Qu'il ne puisse plus s'en prendre à ma sœur. En même temps, je panique, parce que je ne suis plus moi-même. Je ne dois pas céder. Je ne dois pas le tuer. Je ne dois pas céder à mon instinct d'Obscurial. Je résiste, je vois l'homme se tordre au sol en me suppliant. J'hésite entre le laisser comme ça et tout arrêter. Je me rends bien compte que c'est inhumain, mais c'est plus fort que moi. Je n'arrive pas à détacher mon regard de l'homme, par terre.

À ce moment-là, ma sœur se met à hurler. Me hurler d'arrêter. De laisser cet homme partir. Elle pleure. Maison ne peux pas m'arrêter. Je ne veux pas arrêter.

Alors elle s'approche de moi. Il y a de la peur dans son regard, elle a peur de moi, de ce que je suis en train de devenir. Mais elle avance. Elle tend le bras pour m'attraper. Je la regarde faire, je suis comme paralysée. Et elle me touche.

Le contact a dû réveiller quelque chose en moi, peut-être la partie de moi-même qui est encore humaine, intacte. Je ferme les yeux et tout disparaît. Le noir complet. Je rouvre les yeux, je suis allongée par terre. Je vois l'homme s'accroupir par terre, se tenir la tête entre les mains. Mes yeux se ferment encore une fois. Se rouvrent. Je vois l'homme m'adresser un regard effrayé et se précipiter vers la porte pour s'enfuir en voyant que je le regarde. J'ai dû le traumatiser un peu trop.

Je referme les yeux, plus longtemps cette fois. J'entends la voix paniquée de ma sœur qui me dit de ne pas partir, je rester avec elle. Que tout va bien. Que papa et maman vont revenir bientôt.

Je sens qu'elle me serre la main, tout en me répétant de ne pas la laisser toute seule, qu'elle a besoin de moi. Ses paroles sont de plus en plus lointaines. De plus en plus floues.

Et puis dans un sursaut d'énergie je réussis à rouvrir les yeux. Je vois que mes parents sont revenus. Ma mère me voit allongée par terre, les yeux entrouverts, et se précipite vers moi. Elle me serre dans ses bras en disant à mon père d'appeler les secours.

Elle se penche vers moi, me dit de rester éveillée, que tout va bien. Que je dois rester avec eux. Que des secours vont arriver et me soigner. Elle me dit qu'elle m'aime. Elle me répète que tout va bien d'une voix qu'elle essaye de maîtriser mais je vois bien qu'elle panique et qu'elle est prête à pleurer, sa voix tremble. Elle enfouit la tête dans l'épaule de mon père qui se tient derrière elle en disant qu'elle ne veut pas me perdre. Elle dit que tout va bien encore une fois, mais c'est plus pour elle même, maintenant.
De toute façon, c'est quoi cette manie de dire que tout va bien? Est-ce que j'ai l'air d'aller bien, moi?

Axelle me serre la main encore plus fort. Je referme les yeux. Je me sens en sécurité. Et puis un brouillard s'installe dans mon esprit.

-Maman? fait ma sœur d'une voix blanche.
Maman...Sa main est froide, maman...

Ma mère murmure mon prénom en me touchant la main. Je vois ses yeux se remplir de larmes.

À partir de ce moment, je n'entends plus rien. Je ne vois plus rien. Je suis dans le noir le plus complet. Je ne sais pas où je suis. Autour de moi, les ténèbres. Je regarde mon corps et je réalise que je flotte. Je suis presque transparente, je m'efface lentement, je ne suis plus vraiment moi-même. Je ne suis qu'une chose parmi d'autres, un esprit, ou une âme errant dans le noir, dans l'autre monde, cet endroit où je suis mais qui n'existe pas. Je ne comprends pas. Je dois être morte. Mais on dit que les morts arrivent au paradis en passant par un tunnel, guidés par une lumière dorée. Moi, je ne vois aucun tunnel, aucune lumière.

Je vais peut-être aller aux enfers, parce que j'ai tué ces Mangemorts. Mais je ne l'ai pas fait exprès. Pas fait exprès. Ce n'était pas ma faute. Je n'étais pas moi-même. Je me recroqueville, la tête sur les genoux, et je pleure. Je ne sais pas si je le mérite, si j'ai le droit, si c'est même possible de pleurer en enfer.

Mais je pleure quand même. Toutes les larmes que mon corps contenait encore. Je ne sais pas pourquoi je pleure, peut-être sur tout, ou rien, ou les deux en même temps. Je ne sais pas. Je ne sais plus. C'est peut-être ça que les gens appellent tomber dans l'oubli.

J'ai l'impression de rester des mois, des années murée dans ce silence et cette noirceur qui s'insinue chaque jour un peu plus en moi. Je reste éveillée nuit et jour, enfin je suppose qu'il y a des jours et des nuits. J'espère. De toute façon, je ne sens rien. Je n'ai pas mal. Je n'ai pas faim ni soif. Je n'ai pas sommeil. Je ne ressens rien, pas d'émotions. Je suis...vide. Je ne vois rien, et de toute façon il n'y a personne ici. Je n'ai rien à faire mais je ne m'ennuie pas, parce que je crois que le Temps ne s'écoule pas, à l'endroit où je suis.

Alors je pense.

Je pense à ma sœur, à mes parents, au monde. Je ne me rappelle plus de leurs voix, de leur visages. Je sais juste qu'ils existent. Et qu'il m'aiment. Le reste, je ne sais plus. J'ai oublié.

Et un jour, je me réveille.

J'ouvre les yeux, je respire enfin. J'entends, je ressens.

Je suis vivante.

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Hello! Je suis assez contente de ce deuxième chapitre, mais donnez-moi votre avis perso dans les commentaires! Rendez-vous au troisième chapitre et bonne lecture! ❤️

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