Chapitre 21

19 7 32
                                    

Le vent avait forci en un rien de temps, emportant avec lui des quantités considérables de neige, forçant le petit groupe à se resserrer pour ne pas se perdre de vue. Le blizzard faisait rage, fouettant sans relâche leurs visages fatigués.

- IL FAUT TROUVER UN ABRI ! hurla Neija, son cri portant à peine par-dessus les hurlements de la tempête.

Wektu n'avait jamais vu cela de sa vie. Il avait pensé que les épais tronc de cette forêt fourniraient un abri face aux éléments : il n'en était rien. Étrangement, le souffle du vent semblait encore plus fort, comme s'il était canalisé entre les arbres pour venir s'abattre à pleine puissance sur les malheureux fugitifs. Le jeune homme resserra encore sa cape contre ses bras, essayant de repousser le froid mordant comme il le pouvait. Autour de lui, le paysage avait viré du marron doré au blanc sale en quelques heures seulement, et, là haut, où le soleil représentait auparavant leur seul guide, se trouvait désormais en plafond de nuages sombres qui occultaient presque entièrement la lumière du jour, noyant les environs dans une pénombre angoissante. S'ajoutait à cela le vent constant qui faisait dévier leurs pas, et rapidement, l'évidence s'était imposée : ils étaient perdus.

- OU ÇA ? cria Aldrianne en réponse, en se rapprochant d'eux.

- JE NE SAIS PAS ! gémit l'homme. SUIVEZ-MOI !

Prenant garde de ne pas se laisser distancer, le Porte-Rêve emboîta le pas à Nei, se courbant le plus possible pour offrir moins de résistance aux vents glaciaux. Quelques mètres plus loin, l'homme tomba à genoux, et entreprit de creuser le sol de ses mains gantées. Le reste de la troupe suivit rapidement son exemple, et commença à monter un petit mur de neige et de terre pour se protéger du vent. L'effort fit transpirer Wektu, et le froid environnant se fit plus mordant encore, se nourrissant de sa sueur pour s'insinuer dans les moindres recoins de son coeur. Enfin, après plusieurs longues minutes de labeur, ils s'allongèrent au sol, se planquant le plus bas possible. Leur abri provisoire, haut d'une trentaine de centimètres était cependant suffisant pour leur permettre de respirer plus librement.

- Est-ce que tout le monde va bien ? s'inquiéta Aldrianne en essayant de se tourner vers chaque membre du groupe sans se découvrir.

Des grognements d'assentiments lui répondirent, sauf Erep, qui était occupé à manger de la neige à pleine poignées, sous le regard désabusé de Neija.

- Est-ce que tu pourrais nous Cristalliser un abri plus résistant ? demanda à son tour Wektu.

Les autres lui jetèrent un regard surpris.

- Je n'entends pas bien avec ce foutu vent ! Que voulez-vous que je fasse ?

- Cristalliser un abri ! cria-t-il, plus fort.

La même expression de surprise s'afficha sur le visage d'Aldrianne.

- Cristalliser ?

- Oui ! Tu dois bien avoir un Souvenir d'une petite cabane ou une autre protection du genre, non ?

- J'ignore de quoi vous parlez, Messire. En quoi un souvenir pourrait nous aider ?

Non. Non, ce n'était pas possible. Elle n'avait pas pu ...

- Aldrianne, quel est ton métier ?

La jeune femme eut une grimace gênée, puis expliqua :

- Eh bien ... Ca fait partie des blancs dont je vous parlais. Je ne sais plus. Quelque chose en lien avec l'art peut-être ? Je me souviens de robes de toutes les couleurs.

Wektu roula sur le dos, désemparé. Il ne pouvait pas lui en vouloir, évidemment, lui non-plus ne savait plus exactement ce que signifiait le rôle de Porte-Rêves. Mais par Myr ! Comment pouvait-on oublier avoir un talent comme celui-ci ? La capacité de matérialiser le contenu de sa mémoire n'était quand même pas une chose qu'on pouvait oublier si aisément, si ? A côté de lui, Neija se retourna brusquement.

Porte-RêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant