Partie 12

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La chambre de Malefoy est comme un sas de décompression entre les réunions autour des parchemins et le repas qu'on essaie de prendre tous ensemble.
A la Chaumière aux Coquillages, les discussions sont étranges, entrecoupées de silences gênants. Tout le monde sait que l'on prépare la suite, mais personne ne pose de question, ça a été clarifié assez vite. Faire semblant d'être dans une époque normale est épuisant. Parfois des nouvelles du front ou de Poudlard nous parviennent par la petite radio toujours allumée lors des repas et des exclamations ponctuent alors la soirée. Parfois, elles donnent lieu à des célébrations, parfois elles entraînent un silence pesant.
Dans la chambre de Malefoy, le silence n'est pas oppressant. Je m'assois sur le fauteuil au bout de son lit, il ouvre un œil et semble s'accommoder de ma présence.

- Je ne vais pas mourir ! m'a-t-il lancé les premières fois.
- T'as intérêt, je lui avais répondu.

Depuis, il me laisse m'asseoir dans sa chambre sans dire un mot.
Il a repris des couleurs qui lui donnent une meilleure mine, même si les douleurs et sa jambe immobile le clouent toujours au lit.
Son silence constant se révèle apaisant, aussi me surprend-il un jour quand il le brise d'une voix enrouée.

- Qu'est-ce que tu fuis Potter ?

Je me redresse dans le fauteuil, mal à l'aise.

- Comment ça ?
- Tu viens te réfugier ici tous les jours alors que tes amis sont dans la pièce d'à-côté...

A choisir, je préférais le silence.
Je me renfonce dans mon assise et laisse filer quelques longues secondes. Je n'ai pas à lui répondre, si j'ai envie de passer mes soirées et mes nuits à le veiller dans cette chambre, je n'ai pas à me justifier.
Je fixe la porte fermée derrière laquelle je remise pour un temps mes doutes et mes angoisses.
Je sursaute quand je réalise que depuis son lit, Malefoy me fixe de ses yeux gris. Ils ne sont pas perçants, jugeurs ou moqueurs, ils sont... inquiets, et cette constatation me chiffonne.

- Tu sais mieux que personne ce que je garde à distance. Tu sais mieux que quiconque ce qui m'attend là dehors.

Je grimace et change de position dans mon fauteuil.

- Tu sais mieux que personne ce que ça fait de se sentir coincé dans son propre destin...

Mes aveux à demi-mots me gênent, je détourne le regard et je sens la rougeur s'étirer sur mes joues. Jamais je n'avais formulé aussi clairement mes craintes à voix haute.
L'Espoir du Monde Sorcier qui étouffe dans sa prophétie, quelle aubaine !

Je lui ai tendu la perche pour qu'il m'achève. Que son rire me transperce sur place, que son ricanement attise un peu plus mes angoisses quotidiennes.
Mais il ne répond rien, il a mis de côté ses piques et ses provocations.
Il réarrange ses coussins et fuit mon regard.

- Tu es plus fort que moi Potter, tu l'as toujours été, alors défais-toi de ces attentes et trace ton propre chemin.

Sa réponse me surprend, me désarçonne, renverse mon univers.
Si seulement c'était aussi simple !
Je secoue la tête, ça ne veut rien dire ! et je ne sais pas quoi lui répondre.
Alors je me lève, perdu.

- Je ne peux pas faire ça...

Et je quitte la chambre sans un regard.

***

J'aurais du l'éviter, ou peut-être lui parler simplement, lui expliquer que rien n'est aussi simple dans mon monde.
Mais à la place, je me suis juste réfugié sur le fauteuil sans un mot, renfrogné.
Il n'a pas reparlé de notre dernière conversation.
Il s'est juste un peu redressé dans ses coussins et balance quelques mots sans prévenir.

Le chant du cygne - DrarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant