Partie 13

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Après ça, c'est devenu une habitude de passer la tête dans l'entrebâillement, vérifier s'il dort, déposer un verre d'eau, une fiole de potion ou son repas sur sa table de nuit.
Parfois, il est plongé dans le sommeil par une forte potion, mais le plus souvent, il se redresse quand j'entre, comme s'il m'attendait.
Je m'assois alors dans mon fauteuil maintenant attitré et je relâche le souffle qui était bloqué dans mes poumons jusque là.
Nos préparatifs touchent à leur fin. On ne va pas tarder à repartir, passer à l'action.
J'aimerais lui parler, le prévenir qu'on ne se reverra peut-être pas, que tout est trop incertain.
J'aimerais lui poser des questions, le comprendre, essayer de savoir s'il a toujours été comme ça ou si c'est moi qui ne l'avait jamais réellement vu jusque là.

On ne parle jamais de la Guerre, ni du Manoir et de ses horreurs.
Il évoque surtout des souvenirs de Poudlard, se moque de nos chamailleries passées. Il ne peut pas s'empêcher de me provoquer, de me bousculer, et je prends un malin plaisir à lui répondre, à contrer, à faire durer la joute verbale.
On ne sait faire que ça après tout, mais on le fait bien.
Ce n'est plus agaçant, il ne me repousse pas dans mes retranchements, il reste en surface, mais me considère comme son égal, ce que personne ne s'autorise plus à faire - exceptés Ron et Hermione - et je l'en remercie presque pour ça.

Nos joutes verbales me changent les idées, lui, elles l'éloignent de la douleur.
Il grimace encore parfois, mais il a repris des couleurs et il essaie de plier et déplier sa jambe.
Depuis qu'il la sent à nouveau, il est soulagé. Assis sur le bord du lit, il s'efforce de faire bouger ses orteils, l'air ravi.
Il raconte qu'il a hâte de remonter sur un balai pour me battre à plates coutures dans la poursuite du Vif d'or, et même si on sait tous les deux que l'objectif est ambitieux, je joue le jeu et lui rabats le caquet. Un débat virulent sur les meilleures fentes et les mouvements les plus complexes des joueurs de Quidditch nous emballe et tient la guerre à distance pendant un temps.
Il est fort à ce jeu, pour éloigner les angoisses, les doutes et la panique du moment.
Dans cette chambre la cicatrice ne m'a jamais brûlé, les visions de Voldemort se tiennent à distance. Je devine pourtant qu'il est furieux et qu'il avance ses pions un à un pour mieux attaquer, ce n'est qu'une histoire d'heures, de jours. Mais pendant une heure ou plus, à côté du lit de Malefoy, c'est comme si un bouclier tenait les évènements extérieurs à distance.

Elle est étrange cette nouvelle amitié, elle ne ressemble à rien de ce que j'ai connu.
Sa présence m'est agréable et devient rapidement addictive. Parfois mon regard s'attarde un peu trop longtemps sur un détail de sa personne et quand ses yeux se fichent soudain dans les miens, je détourne le regard avec culpabilité.

Je me surprends à remarquer la fossette qui se creuse dans sa joue quand il sourit et sa façon de se mordre la lèvre pour garder son sérieux quand il a pourtant envie de rire.
Sous sa chemise de nuit trop grande, une peau de lait s'étend que j'essaie d'ignorer. Il n'a pas râlé sur le bandeau qui emprisonne constamment son avant bras, il a l'air de s'y habituer même si parfois la Marque a l'air de brûler et qu'il faut refaire un bandage propre. Il détourne alors les yeux quand Demelza s'y applique.
Une mèche récalcitrante lui tombe régulièrement dans les yeux et l'envie de tendre la main pour la replacer derrière son derrière l'oreille est insistante.
Je note des tâches de rousseur éparpillées sur ses pommettes et son nez que je n'avais jamais remarqué jusque là.

Parfois, l'envie de tendre le bras vers lui pour glisser ma main sous sa chemise juste pour vérifier la douceur de sa peau me grignote.
Quand je réalise l'étendue de mes pensées inappropriées, je secoue rapidement la tête et ouvre rapidement la fenêtre pour aérer la chambre - et accessoirement calmer mes bouffées de chaleur. L'air marin me remet les idées en place, ça reste Malefoy, même si sa chemise lâche offre des bouts de peau blanche à n'en pas finir, c'est Malefoy dans ce lit !
Malefoy à qui j'ai promis mon amitié, et dont la présence et les sourires impudiques me chatouillent le ventre.

Le chant du cygne - DrarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant