Emergence Le poème des douze tempêtes

Voyage en mer (1/2)

Elle était perdue.

Perdue dans une mer de mots, d'objets, d'idées et de couleurs. Elle nageait à travers un océan de choses toutes plus bizarres les unes que les autres. Elle regarda sa main en quête d'une identité. Mais elle ne se souvenait de rien.

Qui était-elle ? Un nom émergea dans son esprit: Seïna, lui souffla le cours tumultueux de sa conscience. Que voulait dire ce nom ? Était-ce vraiment le sien ? Oui, lui souffla encore la voix.

Qui es tu ? demanda Seïna à la voix.

-Je suis ta conscience, je suis la conscience de tous les êtres. répondit la voix.

- Qui suis-je? redemanda Seïna.

Mais la voix s'était tue. La chose qui s'appelait Seïna observa autour d'elle, dans l'espoir de déceler quelque indice sur son identité. Elle flottait. Cela ne la dérangeait pas, mais elle avait l'impression que ça aurait du la déranger. Elle flottait et autour d'elles d'autres objets aussi. Ils dérivaient dans un flot continu qui ne menait nulle part.

Un océan d'objet.

Un océan de souvenirs, glissa à nouveau la voix.

Des souvenirs ?

En vain, la voix semblait décidée à ne pas lui répondre. Alors elle se balada. Elle glissa pendant ce qui lui parut des heures dans le flot de souvenirs. Elle observa, nota et tenta de savoir à qui appartenait ces incroyables mémoires.

Ce sont les tiens, murmura la voix.

Les miens ?

Alors ces souvenirs si intéressants étaient les siens. Fascinant. Elle savait deux choses à présent, elle s'appelait Seïna et ces souvenirs étaient les siens.

Elle aperçu une porte dans le lointain. Mais il fallait traverser une grande quantité de souvenirs. Elle brassa l'air autour d'elle pour atteindre la porte. La chose se sentait ridicule à gesticuler comme ça. Pourquoi ? Personne ne la regardait.

La planche de bois sertie d'une poignée dorée l'attirait.

Elle ouvrit la porte qui ne semblait ne mener nulle part. Elle fut aspirée par une vague de lumière qui l'attirait vers l'avant.

Elle n'était plus dans le vide en train de flotter, constata la chose-Seïna. Ses pieds touchaient terre.

Elle se trouvait dans une petite pièce lumineuse avec un lit en son centre. Deux personnes étaient assises sur le lit, un homme et une femme. Ils parlaient à une troisième humaine en face d'eux.

Elle était entrée dans un souvenir.

C'est toi, lui indiqua la voix alors que Seïna regardait la fille en face des adultes.

C'est moi, approuva la chose sans savoir pourquoi elle approuvait.

Elle écouta la conversation.

" Nous allons avoir un bébé, ma chérie. dit l'homme.

- Tu va être grande sœur, renchérit la femme."

Ce sont mes parents, songea Seïna. Elle se souvint alors ce qu'elle avait ressenti lorsque ses parents lui avaient annoncé cela. De la tristesse, peut être de la jalousie aussi. Une impression d'avoir été abandonnée par ses parents. Elle ne leur avait pas suffi.

Elle sortit du souvenir pour retourner dans le néant.

Alors, n'ayant que ça à faire pour patienter jusqu'à... jusqu'à quoi ? Elle chercha d'autres souvenirs pour se refaire son identité qui commençait déjà un peu à lui revenir.