Chapitre 22

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Dans sa chambre d'hospitalisation, Tatiana ouvre progressivement les yeux. Elle voit le plafond. Elle se retourne et se rend compte qu'elle est à l'hôpital. Elle se lève vite et sort de la chambre. Elle cherche Fred en appelant son nom dans tout le couloir, avec une marche déséquilibrée et faible. Deux infirmiers psychiatriques la voient et accourent vers elle. Tatiana s'arrête devant eux.

— Tatiana, ça va ? Tu cherches ton garde du corps ? Il est sorti. Attends-le ici.

Tatiana continue sa marche vers la sortie de l'hôpital. Son psychiatre accoure vers elle. Tatiana s'arrête encore.

— Comment tu te sens ?

— Où est Fred ?

— Euh... Pourrai-je connaître le type de relation que tu as avec Fred ? Et si on s'asseyait un peu d'abord ?

Le psychiatre lui prend délicatement la main et s'installe avec elle, sur les canapés dans le hall.

— Toute relation que tu vis, influe grandement sur tes états d'âme, tu le sais n'est-ce pas ?

— Depuis que j'ai Fred à mes côtés, tout va bien, dit-elle, en souriant.

— C'est ce que j'essaie de te faire comprendre..., dit-il avec douceur. Fred sera-t-il toujours là ? Ne dois-tu pas essayer d'aller bien, même sans lui à côté ? Je t'aiderai pour cela, crois-moi.

Tatiana reste pensive.

— Ou bien, est-il plus que ton garde du corps ? Je vois qu'il semble important pour toi. Et que tu sembles autant importante pour lui.

— Il n'est que mon garde du corps... En apparence. Mais il est beaucoup plus que ça, en réalité.

Son psychiatre sourit.

— Il est où ? (En se levant, inquiète) Il est où ?!

— Je constate que la relation qu'elle a créée avec Fred est toxique. Elle semble excessivement dépendante de lui... Espérons que Fred ne l'abandonne pas brusquement, ou ne l'abandonne pas tout court. La plus grande peur des personnalités borderline étant l'abandon, je ne saurai prédire la réaction de Tatiana... pense le psychiatre en observant tristement sa patiente.

Tatiana aperçoit Fred à l'entrée, elle sourit, toute heureuse et accoure vers lui. Fred tient un sachet de sandwich. Il voit le visage heureux de Tatiana qui vient vers lui. Il s'arrête.

— Pour la première fois, je me rends compte que je peux servir à autre chose qu'une machine à tuer... Tu m'apprécies pour ce que je suis, et pour rien d'autres... Je te remercie de m'avoir fait ressentir ce sentiment de bonheur éphémère. Les meilleurs moments de ma vie, je les aurais passés à tes côtés, ma superbe folle. J'aurais préféré avoir la possibilité et le courage de t'aimer...

Tatiana arrive devant lui.

— Tu étais où ? Comment tu peux disparaître alors que ta patronne est hospitalisée ?!

— Tu es vraiment incroyable, tu souriais il y a quelques secondes, et maintenant tu me fais déjà des reproches.

Tatiana regarde le sachet qu'il tient.

— C'est quoi ?

— Ça ne te regarde pas, c'est pour moi.

Tatiana tente de dérober le sachet, Fred fait soulever le sachet de plus en plus haut, il aime la « faire chier ». Le psychiatre les observe s'amuser. Il contemple le visage souriant de sa patiente épanouie.

— Le meilleur médicament de l'homme n'est-il pas simplement l'amour ?

Dans l'après-midi, Tatiana, dans sa chambre d'hospitalisation, mange le tacos que lui a acheté Fred. Elle est assise au bord du lit. Fred est debout, devant la fenêtre, il est silencieux comme d'habitude.

— Viens t'assoir à côté de moi, dit Tatiana.

— Pourquoi ? Suis bien où je suis.

— Tu fais exprès ?

— Il faut toujours que les gens fassent ce que tu veux sinon tu exploses ? A la longue, est-ce que tu n'en profiterais pas ?

Tatiana ne dit plus rien, elle continue de manger, le visage renfrogné. Fred n'entend pas la réplique de sa « folle », car d'habitude elle a la langue bien pendue. Il se retourne et la voit bouder. Finalement, il vient s'installer à côté d'elle. Tatiana le regarde en souriant. Fred garde son visage inexpressif en la regardant. Tatiana prend ses deux index et les pose sur le visage de Fred pour lui faire sourire. Il finit par sourire légèrement en enlevant les doigts de Tatiana.

— Waouh, sourire doit être vraiment difficile pour toi.

— Cet homme sur la photo... Tu l'as déjà rencontré ?

Tatiana reste silencieuse un moment.

— Parfois, je déteste ma faible mémoire...

— Ta mémoire n'est pas faible. C'est ton inconscient qui te protège. Et ne t'en fais pas. Parfois, mieux vaut oublier des parties de son enfance, pour mieux avancer... Fred le dit avec tant de conviction, comme si lui également aurait aimé pouvoir effacer les souvenirs de son enfance, à l'instar de Tatiana.

— Pourquoi parfois tu parles comme un psy ?

Fred sourit.

— Termine ton sandwich et rentrons. Ou bien tu veux rester ici ?

— Hey c'est vrai, maintenant que j'y pense !

— Quoi ça ?

— Tu n'aimes pas les hôpitaux non ?

Fred se lève et retourne se placer devant la fenêtre. Voilà qu'il ignore encore Tatiana, elle a envie de l'insulter. Cet homme lui fait passer par toutes les émotions en un laps de temps, alors que lui, on dirait qu'il est impassible, qu'il ne ressent rien. Après, Tatiana s'y perd car Fred est expressif quelques rares fois, et quand il l'est, c'est d'une telle intensité. C'est comme si cet homme avait un sérieux problème avec les émotions et qu'il luttait constamment dans son for intérieur. Mais elle ne perd pas espoir. Elle reste persuadée qu'un jour, aussi longtemps que ça prendra, son « mur de Berlin » se « brisera » et se dévoilera à elle. 

Aime-moi, désire-moi, ne me quitte jamais : AdrénalineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant