Chapitre 46

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— Tatiana ? Tu es là ? demande Nadège.

Tatiana regarde Nadège et tente de cacher ses émotions, elle lui sourit légèrement.

— Oui, désolée j'étais dans les nuages, comme d'habitude.

— C'est ce que j'ai dit sur le chef de gang qui circule librement, qui te fait peur ? Ne t'en fais pas. On te protégera. Rien ne t'arrivera, lui dit-elle, avec bienveillance.

— Oui, je crois en vous, dit Tatiana en souriant.

Mais Tatiana n'est pas tranquille dans son esprit. Elle veut savoir si c'est Fred qui a tué Max. Elle n'en peut plus maintenant. Fred lui cache trop de secrets. S'ils se revoient en fin d'année, il aura intérêt à s'ouvrir à elle. Elle ne pourrait supporter encore plus de « mensonges » dans sa relation avec lui.

Pendant ce temps à Détroit, il est 16h. La cérémonie de transfert de pouvoir militaire de père en fils doit commencer dans trente minutes. Dans la résidence familiale, le parrain porte son costard et se prépare à sortir pour se diriger dans la grande cour Zerilli, où se déroulent les grandes cérémonies de la Famille. Il repense à la première fois où Fred, qui avait dix ans, venait d'arriver dans la résidence familiale...

Fred, enfant, était animé de violence et de rage intérieure. Dès le premier jour, il s'était battu avec ses frères et les avait blessés. De plus, il ne savait pas lire les émotions des gens autour de lui ni en exprimer. Son père adoptif lui demandait de sourire, de s'énerver, de ne pas être comme un mur tout le temps, indifférent à tout, mais rien ne s'améliorait.

Alors, sans perdre de temps, Lorenzo avait commencé à apprendre à Fred à lire les émotions des gens à travers des images qu'il lui montrait. Fred devait deviner les différentes émotions telles que la joie, la tristesse, la peur, la colère, la surprise et le dégoût. Cela allait lui permettre de pouvoir mieux vivre avec ses frères et de « sympathiser » avec eux. Fred s'améliorait avec les semaines. Petit Alejandro n'avait pas tardé à poser des questions à son père, concernant Fred, qu'il avait toujours trouvé « bizarre ».

— Papa, pourquoi Fred apprend ça et pas nous ?

— Car vous avez la chance d'être nés avec cette faculté naturelle de pouvoir reconnaitre les émotions et de socialiser avec, lui répond le parrain en souriant avec bienveillance.

Le jour où Fred était parvenu à lire toutes les émotions, le parrain en était heureux.

— Bravo ! Je vais te récompenser. Que veux-tu comme cadeau ?

— Un pistolet, dit petit Fred, avec enthousiasme.

Le parrain est surpris.

— Un pistolet pour faire quoi ? lui demande le parrain.

— Tirer sur tous ceux qui vont m'agacer.

Le parrain était choqué par les réponses de Fred. Mais en même temps, il voyait énormément de potentiels en lui, qui pourraient devenir une force plus tard, dans le monde de la mafia dans lequel ils évoluent.

— Mais d'abord, je vais aller retrouver mon père dans sa tombe et venger ma mère ! ajoute petit Fred, avec rage.

Le parrain se baisse au niveau de Fred et dépose ses bras autour de lui, avec affection.

— Ton père est déjà au ciel. Il ne faut plus lui en vouloir et le pardonner, d'accord ?

— Le pardon est pour les faibles !

Le parrain était sans voix. Comment un gamin de cet âge pouvait-il raisonner ainsi ? Le parrain savait qu'une tâche ardue l'attendait. Comment devait-il parvenir à faire de Fred un individu « humain » envers les siens et un individu « cruel » envers les ennemis ? Voilà l'équilibre qu'il devait faire atteindre à Fred. Il était déterminé à investir de son temps et de son énergie pour arriver à faire de Fred son meilleur élément.

Lorenzo a élevé Fred comme son propre fils. Fred a reçu de l'amour paternel grâce à lui. Malheureusement, malgré les nombreux exercices sur les émotions, Fred restait inexpressif la plupart du temps. Aussi, Fred ne prenait aucun plaisir dans les jeux collectifs avec ses frères, il aimait s'isoler et se mettre en danger. C'était durant ces seuls moments que Fred était heureux. Il faisait souvent des accidents à cause de son hyperactivité, mais il en riait ensuite. Et tous ces comportements dégoûtaient sa belle-mère, la marraine. Par exemple, cette dernière refusait que ses fils mangent ensemble avec Fred. Ce qui a développé l'habitude de Fred à manger tout seul dans son coin, en le transformant encore plus en « individualiste ».

— Ce monstre risque d'influencer négativement mes enfants, dit la marraine.

— C'est notre enfant, Maria, répond le parrain.

— Tu sais bien que je ne pourrai jamais mettre au monde un enfant aussi machiavélique.

Fred, dû à son antipathie, ses frères étaient méchants avec lui et le traitaient d'intrus dans la famille. Alors qu'Enzo et Victoria étaient encore des bébés, Fred subissait des coups bas de ses autres frères (Marcello, Hector, Alejandro et Antonio) qui l'accusaient de plein de bêtises. Par la suite, la marraine punissait sans cesse Fred, l'attachait et le frappait durement. Mais ce que la marraine ignorait est que Fred, en rejoignant cette nouvelle famille, était déjà insensible à la douleur à cause de là où il venait. Donc, dès que Fred ressortait de ses punitions, il devenait encore plus sadique et se vengeait de ses frères jusqu'à les blesser gravement.

Sans relâche, le parrain tentait de raisonner Fred et de « l'humaniser ».

— Il ne faut jamais faire du mal aux siens, mais les protéger, d'accord ?

Fred hochait la tête, mais au fond, croyait-il vraiment aux paroles de son père adoptif ? Ou faisait-il juste semblant de dire oui pour ne pas être fatigué à être moralisé à longueur de journée ?

Un mois plus tard, le parrain avait inscrit petit Fred aux arts martiaux pour canaliser ses énergies négatives. Ce qui permettrait à Fred de travailler sur l'agressivité et la haine qu'il détenait en lui.

Certes, Fred était un enfant terrible et difficile à gérer. Mais quand Lorenzo repense à tout ce chemin parcouru pour parvenir à « éduquer » cet enfant « monstrueux », à transformer ses défauts en compétences, jusqu'à faire de lui aujourd'hui, le fils dont il est le plus fier d'avoir eu, il se dit que « l'investissement dans l'éducation de ses enfants finit toujours par payer un jour ». 

Aime-moi, désire-moi, ne me quitte jamais : AdrénalineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant