C'était un jeudi, et le monde basculait dans le chaos. C'est le constat que se fit Dumbledore, en avisant la une de la Gazette du Sorcier, assis inconfortablement dans son fauteuil de directeur, sous les murmures empressés des directeurs dont les tableaux étaient accrochés au mur. Le monde sombrait, et Albus Dumbledore s'engonçait désormais dans une culpabilité étouffante. Face à lui, le professeur Chourave se tamponnait les yeux avec un mouchoir, tandis que Filius Flitwick arborait une mine indéchiffrable.
Pour comprendre pourquoi Albus Dumbledore en était venu à ces sombres pensées, il fallait remonter quelques semaines en arrière : le jour où Dean et Dorine Logard avaient été assassinés, laissant derrière eux deux filles de quatorze et dix-huit ans, désormais orphelines. Suite au drame, l'aînée des deux sœurs, Evelyne, avait fait l'objet d'une surveillance accrue, n'étant plus scolarisée à Poudlard et ainsi exposée au danger. Milly, la cadette, avait bien entendu reçu l'ordre de ne pas rentrer chez elle pour les vacances.
Cependant, la veille, une sortie à Pré-au-Lard avait été organisée et Milly, comme bon nombre d'élèves, s'y était rendue. Le problème étant qu'elle n'en était jamais revenue, ayant disparu après une entrevue avec son aînée, d'après ce que Judith Meadowes lui avait dit.
Bien qu'inquiet, Albus avait supposé que la jeune fille avait choisi de rester avec sa soeur, croyance renforcée après la réception d'une lettre, la veille au soir, lui confirmant que les Logard étaient bel et bien ensemble.
C'était le lendemain matin, jeudi donc, que le drame s'était révélé. Deux sombrals et leur calèche étaient arrivés à Poudlard au galop, manquant de peu d'entrer en collision avec le saule cogneur, dans leur cohue.
Et à l'intérieur de la calèche, méconnaissables, tuméfiés, torturés, ensanglantés, se trouvaient les cadavres gelés d'Evelyne et Milly Logard. Par une heureuse coïncidence, si tant est qu'elle puisse être appelée ainsi, le temps était glacial et aucun élève ne se trouvait dans le parc à ce moment là. C'était donc Hagrid, le garde-chasse, qui avait fait la macabre découverte.
Ce dernier, bouleversé d'horreur et d'effroi, avait aussitôt prévenu le professeur Flitwick, le premier qu'il avait trouvé, qui s'était aussitôt chargé de désillusionner les corps, armé d'un professionnalisme déroutant, bien qu'on pût distinguer ses yeux brillants. Il avait ordonné à Hagrid de calmer les sombrals, de ramener les calèches, et de le rejoindre aussitôt dans le bureau du directeur.
Au même temps, le professeur Chourave avait été avertie, de même que tout le corps enseignant, et la population britannique avait reçu la Gazette du sorcier, qui titrait, à la une "Le tout puissant Lord Voldemort a encore frappé" ; suivi d'un résumé détaillé des crimes perpétrés à l'encontre de Millicent et Evelyne Logard.
Hagrid était alors arrivé, précisément à l'instant où le visage du secrétaire personnel du ministre Harold Minchum apparut dans les flammes émeraude de la cheminée.
Albus soupira, et hocha la tête, sachant pertinemment que le ministre voulait s'entretenir avec lui, afin de savoir si oui ou non, ce que la une de la gazette racontait. Et quelques secondes plus tard, dans un tourbillon de poussière, un homme de taille moyenne et possédant un haut de forme n'ayant d'égal que la taille de ses moustaches fit irruption dans le bureau directorial, la mine grave.
- Dumbledore ! Est-ce que ce qui se raconte est vrai ?
Le noble directeur s'abstint de souligner que personne n'aurait l'idée de faire une blague d'aussi mauvais goût et inspira fortement, se doutant que la conversation à venir serait tout sauf agréable.
- Professeurs Chourave, Professeur Flitwick, Hagrid, pourriez-vous patienter quelques minutes dehors ?
Les trois adultes hochèrent la tête et sortirent, leur mouvement suivi par les reniflements intermittents de la directrice des blaireaux et du garde-chasse.
- Monsieur le ministre, je crains que ces faits ne soient fondés.
Et d'un geste souple de la baguette, Dumbledore fit apparaître les corps mutilés des deux jeunes filles, dont les visages semblaient figés dans la terreur la plus pure, extirpant un son horrifié de la bouche du ministre.
- Par Merlin...!
Dumbledore, ne souhaitant guère accentuer la morbidité du moment, s'empressa de faire à nouveau disparaître les cadavres.
- Nous devons parler, monsieur le ministre. Voldemort (Harold Manchin sursauta et blêmit à ce nom) gagne en puissance. Il a de toute évidence des alliés au sein même du ministère, des locaux de la Gazette ainsi que de Pré-au-Lard. Vous ne pouvez plus reculer, la loi martiale doit être déclarée, des mesures prises. Augmenter les détraqueurs à Azkaban n'empêche pas les mangemorts de proliférer partout. Miss Evelyne Logard était sous surveillance. Ou bien ses protecteurs étaient eux-mêmes affiliés aux mangemorts, ou bien ils ont été assassinés, alors qu'il s'agissait d'agents compétents et haut placés.
- Albus, si nous commencions par éliminer le mal à la racine...
- Si vous suggérez encore que je renvoie tous les élèves de la maison Serpentard de Poudlard, vous faites erreur monsieur le ministre.
- Oh je vous en prie Albus ! Vous comme moi savons que les enfants de sang-pur ne sont que des mangemorts en puissance ! Vous ne pouvez pas persister à agir comme s'ils ne représentaient aucun danger.
- Monsieur le ministre, dois-je vous rappeler que le ministère accepte de nombreux pots de vin en échange de la liberté pour certains... "présumés" criminels ? Sans parler du fait que les sang-pur ne sont pas les seuls recrues de Voldemort.
- Jamais, vous entendez, jamais le ministère ne tolérera ce genre de pratiques.
Albus soupira. Minchum était un homme borné. C'était de toutes façons apparemment ce qu'il fallait être pour être nommé à la tête du ministère anglais.
- Et de toutes façons, ajouta le ministre, déclarer la loi martiale effraierait la population. Nous ne pouvons pas nous permettre de...
- Monsieur le ministre, la population est effrayée. Des gens sont tués et torturés, il n'y a pas, dans toute l'Angleterre, un seul lieu qui soit sûr et paré à toutes les attaques. Une de mes élèves vient de décéder de la pire des manières !
Le ministre soupira.
- Vous avez peut-être raison Albus.
- Merci Harold.
- Je vais retourner au ministère, et organiser tout cela. Prenez des mesures, vous aussi. Je crains que même Poudlard ne soit plus sûr, à l'heure actuelle...
Et il disparut sans plus attendre. Était venu le temps du chagrin au Royaume-Uni. La loi martiale fut déclarée, les nés-moldus se cachèrent, les tournois sportifs furent suspendus. À Poudlard, le château entra en deuil, drappant son blason de noir et ses élèves de larmes, les sorties à Pré-au-Lard furent interdites, l'on intima aux élèves de demeurer sur leur garde et d'informer les professeurs de tout danger ou comportement étrange. Le corps enseignant devint psychologue, les courriers furent examinés.
Était venu le temps du chagrin et des pertes, le temps des larmes et du deuil. C'était un jeudi. Et le monde basculait dans le chaos.
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La Rouquine
FanfictionPublication tous les mardis ! 1976. La septième et dernière année des maraudeurs à Poudlard commence sur les chapeaux de roue. Cette année, c'est la dernière chance pour James de séduire Lily. Cette année, c'est la dernière année où Lily devra essa...