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J'attache mes cheveux en un haut chignon et je suis mes mouvements dans le miroir. La peau de mon visage est sèche et elle commence à se craqueler par endroits. Je la nettoie avant d'appliquer de la crème hydratante. J'ajoute un peu d'huile essentielle de rose dans mes mains et je l'applique sur mes joues. Une astuce de ma mère pour éviter les cicatrices.

Une brise fraîche s'engouffre par la baie vitrée ouverte et je décide d'enfiler un gilet. En retournant dans ma chambre, je suis surprise d'entendre une voix féminine venant de dehors. Accompagnée d'une batterie seulement, la voix chante harmonieusement. Et puis, discrètement, un violon rajoute des notes aigu et, tout d'un coup, la voix ressemble presque à un chant d'opéra. Je me mets au balcon pour mieux l'entendre.

« Ah-Ah-Ah-Ah ; Ah-Ah-Ah-ah ; Ciao Amore ;

La-Da-Da-Da ; La-Da-Da-Da ; Soft Ice cream. »

Ça vient de la chambre de Sam. Je me penche pour voir s'il est également sur son balcon mais je ne vois personne. Il a été assez énervé cet après-midi, et j'avoue que je suis peut-être fautive. Même dans la voiture, il n'a pas dit un mot. Et depuis que nous sommes rentrés, il n'a pas bougé de sa chambre. Je reviens dans la mienne et me plante devant la porte.

Je devrais sûrement rester ici, attendre un peu qu'il soit calmé de la journée. Mais j'ai une petite voix dans ma tête qui me pousse à y aller, juste pour voir s'il va bien. Juste pour voir s'il va bien, je jette un regard et je m'en vais. Doucement, j'ouvre ma porte, celle de Sam est entrouverte. Les violons de la musique ont laissé la place à trois notes de piano, la voix semble encore plus belle.

« Calling out my name ; On the summer rain ; Ciao Amore ;

Salvator can wait ; Now it's time to eat ; Soft ice cream. »

J'atteins sa porte et la pousse mollement. Il est assis au coin de son lit, dos à moi. Les jambes croisées, il a posé un livre ouvert sur son genou, il écrit d'une main et tient une cigarette de l'autre. Je prends un temps pour l'observer et il est si captivé par ce qu'il fait qu'il ne sent pas ma présence. Il se penche sur son livre quelques secondes avant d'écrire un paragraphe dans son carnet. Je me demande ce qu'il fait.

La chanson se termine quand Sam lâche son stylo en poussant un soupir et se laisse tomber avec lassitude sur le dos. Sans le vouloir, je sursaute quand ses yeux accrochent les miens.

- Qu'est-ce que tu fais là ?

Il s'est redressé et se dépêche de fermer son carnet. Je ressens toujours sa colère mais elle semble amoindrie.

- J'ai entendu ta musique de ma chambre. C'était joli.

Il se contente de tirer sur sa cigarette. Je suis moins sûre de moi à présent, mais je m'avance tout de même pour m'asseoir à l'autre extrémité du lit.

- En fait, je te dois des excuses. Je n'étais pas légitime à te parler comme je l'ai fait. D'ailleurs, je n'étais même pas légitime de venir, tu me l'a proposé seulement pour que je m'éloigne de mon père. Alors, je suis désolée.

J'ai soudain peur de sa réaction. Mais il se contente de souffler du nez avant de se lever pour aller écraser sa cigarette dans le cendrier sur le balcon. Je me redresse un peu plus. Je rêve où il est en train de se moquer de mes excuses ? Mais il plante face à moi, toujours debout.

- Il faut vraiment que tu arrêtes de te rabaisser, Lola.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Je t'ai invité, tu étais tout à fait légitime d'être sur ce bateau. Par contre, c'est vrai qu'on aurait pu se passer de ta remarque.

Je ne peux cacher le sourire qui naît sur mon visage.

- Et ça t'amuse ?

- Un peu.

Il sourit franchement cette fois-ci.

- J'avoue que ça tête valait la peine que tu lui sortes un truc pareil, dit-il en se passant la main sur sa nuque

- Ravie que ça t'ai plu alors.

Il se rassoit, plus près de moi cette fois. Il a l'air de m'observer un moment mais il finit par détourner le regard.

- Tu sais j'étais sérieux.

- Sur quoi ?

- Sur le fait que tu te rabaisses. Et il y a aussi le fait que tu penses être un poids pour tout le monde.

Je pousse son épaule en affichant une mine choquée.

- Non, ce n'est pas vrai !

- Oh que si ! Tu ne t'en rends pas compte.

- Eh bien je ne te crois pas.

Je le crois les bras sur ma poitrine. Je vois sa main avancer vers moi et je crois qu'il va me toucher mais il s'arrête avant de se lever et de se diriger vers son bureau.

- Dis-moi si tu connais ça.

- Encore une de tes chansons ?

- Exacte.

Il appuie plusieurs fois sur son téléphone et de nouvelles notes de ukulélé se font entendre dans la pièce. Cette fois c'est une voix masculine qui chante.

« You're in the clouds and I'm in Alaska ;

Missing all the thing you do-o-o-o »

Il m'incite à me lever et on se retrouve face à face, sans vraiment savoir quoi faire. Il commence à danser lentement, tendant les bras vers moi.

- Non merci, très peu pour moi.

- Allez, s'il te plaît.

- Je ne sais pas danser.

Alors, sans me quitter des yeux, il me décroise les bras et m'enlace les poignets. Il essaie alors de me faire bouger comme lui mais je me contente de lever les yeux au ciel.

« You're on the third floor and I'm in the Attic ;

Wonderring why I'm not with you-ou-ou. ».

Finalement, je me laisse petit à petit prendre au jeu et nous dansons – en tous cas, je fais de mon mieux – doucement au rythme de la musique. Ses mains remontent un peu plus vers mes coudes.

- C'est triste quand même

« Cause you're my little foggy-eyed. »

- Un peu, c'est vrai. Mais c'est pour ça que c'est une belle chanson.

Mes mains à moi hésitent sur sa peau brûlante. Je les place sur son torse, timidement. Tout à coup, je vois son visage se rapprocher, mes yeux suivent la ligne de ses lèvres entrouvertes. Je sens sa main se rapprocher de mon épaule et une chaleur agréable monte dans mon ventre.

Et, comme si je venais de réaliser ce qu'on était en train de faire, je me fige. Sam a dû sentir mon corps se tendre car il recule d'un pas.

- Est-ce que ça va ?

Ses yeux verts m'observent avec inquiétude.

- Heu, je... Je suis désolée.

- Lola, attends !

Je m'arrache à lui de façon assez abrupte, et je m'en veux instantanément. Mais mon cœur bat la chamade, ma gorge est sèche et je ne sais plus ou me mettre. Je me retrouve seule, dans ma chambre, à faire les cent pas. Je crois entendre des pas devant ma porte mais je dois avoir rêvé car personne n'entre.

Par contre, je remarque qu'on a glissé une feuille de papier sous ma porte. Je fronce les sourcils. Ça ne peut être personne d'autre que lui. Je m'approche et attrape la feuille, mon cœur bat toujours aussi vite.

« Je ne voulais pas te faire peur,

je suis désolé.

Samuel.

PS : tu danse mieux que ce que tu penses. »

Through Your SoulOù les histoires vivent. Découvrez maintenant