POV Prem
Je suis allongé en étoile de mer dans le lit de Phi Boun, je fixe les fissures du plafond alors que j'entends dans la pièce d'à côté la douche s'écouler. Boun ne sortira pas avant un petit moment et moi j'ai tout le temps de me morfondre après l'horrible journée que l'on a vécu. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, je ne viens pas très souvent dormir chez lui. J'aimerais pouvoir le faire tout le temps. Seulement, mon père n'aime pas quand je ne suis pas à la maison, parce que dans ces moments-là, il n'y a personne pour lui apporter sa bière et lui préparer à manger.
Je frissonne quand je pense à ma famille, ce n'est pas le bon moment pour le faire, pourtant, je ne peux pas m'en empêcher. Cela fait des années que ma mère s'est sauvée, quittant les coups d'un mari colérique et oubliant son enfant un peu trop chétif. Cela fait aussi des années que mon père n'ose plus lever la main sur moi et tout cela je le dois à ceux que je considère maintenant comme ma famille.
J'étais un enfant solitaire quand Joong cette tornade m'est tombé dessus et qu'il ne m'a pas laissé le choix de les rejoindre, lui et Nine. Au début j'étais méfiant, mon père m'avait fait comprendre que personne ne vient gentiment vers vous, juste pour le plaisir. Seulement mon père ne savait pas tout et cette rencontre m'a sauvé la vie. Joong a vu les bleus, il s'est inquiété, il m'a forcé à me confier puis il en a parlé à son père.
Ce jour-là j'ai découvert ce que devait réellement être un père. Pas un homme qui vous commande par la force, par la peur et qui vous punit à coups de ceinture, mais un être aimant, protecteur et qui n'hésite pas à faire ce qui est juste. Ohm est resté avec moi dans le jardin pour me rassurer, il m'a tenu la main en me faisant de petits sourires, alors que son père apprenait au mien comment il devait se comporter avec son fils.
Je n'ai jamais su ce qu'il lui a dit ce jour-là, mais plus jamais mon père n'a levé la main sur moi. Il a trouvé d'autres manières de me pourrir la vie, mais cela ne m'atteint plus de la même manière qu'auparavant, car je ne suis plus seul. Alors pourquoi moi je ne peux pas être là pour tenir la main de Ohm quand il en a le plus besoin. Je me sens tellement inutile, cette impression que je ne suis important pour personne et que je ne suis qu'un poids pour les autres, que je ne leur apporte rien d'autre que des ennuis.
Je me recroqueville totalement, essayant de fuir ces pensées négatives qui me viennent encore de temps en temps et que je dois combattre chaque fois avec l'impression qu'elles vont me submerger et me dévorer vivant. Cette peur du sang, celle qui m'a empêcher d'être là, je sais d'où elle vient, le souvenir qui l'a causé est encore vivace dans mon esprit, j'en fais des cauchemars encore parfois et c'est sûrement pour ça que je me sens proche de Fluke, du combat qu'il mène contre ses démons et...
Le lit s'enfonce juste derrière moi et la chaleur du corps de Boun me sort de mes pensées et il colle son torse à mon dos, pose ses lèvres contre ma nuque, ce qui me fait grandement frissonner.
— Arrête de penser au passé. La journée a été difficile Nong, ne t'impose pas ça en plus.
Il m'embrasse de nouveau et je me détends petit à petit parce qu'il me connaît, il sait quoi faire pour me faire oublier.
— Je suis désolé Phi... j'essaie, mais ça revient toujours.
Je ne vais pas pleurer, au moins, j'ai réussi depuis longtemps à ne plus pleurer pour ça, mais ma voix reste tremblante et elle vacille à plusieurs reprises. Lentement, il me fait me tourner pour que je me retrouve sur le dos et il me surplombe, j'aime quand il est au dessus de moi, quand sa chaleur et son poids m'enveloppent et me protègent. J'arrive à lui faire un petit sourire triste alors qu'il me caresse doucement les cheveux, avant de déposer un baiser tendre sur mes lèvres.