La matinée m'a semblé vraiment beaucoup trop longue, mais heureusement, il est l'heure du repas et je n'ai qu'une hâte, retrouver Prem, Pharm et surtout Nine. Il est parti avant moi ce matin et je n'ai pas eu l'occasion de l'embrasser et de le câliner avant son départ, car je n'ai pas réussi à me réveiller à temps. Aujourd'hui on se retrouve tous à sa faculté, alors à peine le professeur nous libère, que je fonce pour le rejoindre. Il me faut un bon quart d'heure pour rejoindre la cantine et il y a déjà un monde fou.
Je soupire légèrement et observe les différentes tables, je sens quelques regards sur moi, mais je m'en fiche totalement. Je ne veux voir qu'un visage et qu'un sourire familier et quand enfin je croise son regard, je perds un peu mon sourire et mon regard s'assombrit légèrement. Un coup sur mon épaule me fait avancer d'un pas et je soupire en tournant la tête et en apercevant Prem qui vient de me rejoindre et observe la table où se tient mon petit ami.
— Encore une admiratrice ?
Juste devant nous se trouve Nine assis seul à une table, il y a un plateau devant lui, mais je sais qu'il n'y touchera pas tant qu'on ne l'aura pas rejoint. J'ai beau lui dire qu'en faisant ça, il finit invariablement par manger froid, il ne veut pas manger sans nous. Devant lui se tient une fille, sûrement en première année, et je n'ai même pas besoin d'entendre ce qu'elle dit pour deviner ce qui se passe à l'air gêné de mon petit ami.
— Il ne veut toujours pas en parler ?
Prem me pose la question, mais il connaît très bien la réponse. Nine et moi, on sort ensemble depuis deux ans mais, mis à part nos proches, personne n'est au courant pour nous. Moi, je voudrais le crier sur les toits, je voudrais aller le rejoindre, l'embrasser à pleine bouche et montrer à cette fille qu'elle ne doit rien espérer.
— Non, mais c'est de plus en plus dur de le cacher.
Je sens la jalousie couler dans mes veines, je sais qu'il m'aime de tout son cœur. Cependant, devoir subir ce genre de scènes depuis deux ans est de plus en plus difficile à gérer pour moi.
Je comprends ses raisons, Nine a toujours été du genre discret, il n'aime pas forcément être le centre de l'attention alors, annoncer officiellement sortir avec un homme le placerait directement sous les projecteurs. Et puis, même s'il dit que tout va bien, je sais qu'il ne veut rien dire parce qu'il a peur. Pas pour lui, mais pour moi. Depuis notre enlèvement par Krissada, il est terrorisé que quelque chose dans le genre puisse m'arriver.
— Je pourrais essayer de lui parler.
La voix basse et douce de Fluke s'élève juste à côté de moi. Même si maintenant, il peut parler sans problème, il ne force jamais vraiment sur sa voix, comme s'il avait peur de l'abîmer. Je ne peux pas m'empêcher de passer la main dans les cheveux de celui que je considère déjà comme mon beau-frère en soupirant.
— Tu peux essayer mais, tant qu'il n'arrivera pas à laisser ce qui s'est passé il y a deux ans derrière lui, on ne pourra pas vraiment avancer. Il fait encore des cauchemars à propos de ça.
Il ne vit pas dans la peur constante de ce que le monstre de Fluke a fait. Seulement, Nine a été abandonné par ses parents, il a passé la majorité de sa vie dans une grande maison froide.
Alors quand il a trouvé sa vraie famille et qu'une partie s'est retrouvée en danger de mort et blessée. La peur de nous perdre, d'être seul à nouveau l'a submergé et plusieurs nuits par semaine, il finit en pleurs dans mes bras après avoir fait un rêve où l'on se fait tous tuer car il arrive trop tard et ne peut pas nous sauver.
— Oh !
Prem et Fluke s'exclame de la même manière et j'ai un petit sourire en coin malgré moi.
— Je lui parlerai, je pourrai peut-être l'aider.