Chapitre 7 | Appel de nuit

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Ces derniers temps, l'eau semble plus agitée sous mon repère nocturne

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Ces derniers temps, l'eau semble plus agitée sous mon repère nocturne. À moins que ce ne soit mes idées noires qui s'aventurent plus loin qu'à l'accoutumée. Le rythme effréné de la rentrée me tue à petit feu, au bord de l'implosion je savoure chaque soir ma cigarette comme si c'était la dernière. Chaque nuit un peu plus penché au-dessus de mon roi de fer favori que la soirée précédente, le tout sans jamais oser passer par-dessus cette foutue barrière. C'est épuisant de lutter ainsi, constamment coincé entre ce dilemme des plus cornéliens jusqu'à renoncer, faire preuve d'une lâcheté démesurée rien qu'en imaginant les visages de mes sœurs en larmes.

On verra bien demain...

D'un pas lourd, j'essaye de retrouver mon chemin jusqu'à notre nouvel appartement, mes repères étant visiblement brouillés par le changement d'orientation de notre domicile. Je vagabonde dans les ruelles éclairées, jusqu'à dériver au pied des lotissements aisés. Nous habitions derrière l'un d'entre eux, évidemment séparés d'immenses clôtures aux buissons bien taillés pour ne permettre aucune infraction, ni même un simple coup d'œil. Notre immeuble domine le côté nord de Los Angeles, faisant dos aux habitants fortunés et bien logés, illustrant nos différences sociales de belles barrières bien luisantes pour eux, contre nos coupures d'électricité après minuit. Si bien que l'immeuble où nous logeons actuellement ne possède aucune fenêtre inclinée vers les belles résidences, pour ne pas déranger ces braves gens. La nôtre est en réalité la seule qui domine une maison magnifique, exposée plein sud et d'un style remarquable, cependant difficile à épier vu la hauteur où nous nous situons. Pour cause, jamais aucune famille n'aurait dû vivre dans ce grenier, pourquoi s'embêter à lui faire respecter les normes ?

Je longe le manoir en question, tête baissée et clés en main pour rejoindre notre chez-nous, osant à peine rêver de mettre un jour les pieds dans de telles demeures.

Les choses sont ainsi Hugo, c'est toi qui as choisi cette vie...

Aussi sombre que la nuit paraît, elle me permet néanmoins d'apercevoir sous le porche une jeune assise au bord des marches. Tête inclinée, le visage dissimulé entre les doigts, les épaules visiblement secouées de violents sanglots. Je trace ma route sans me retourner, chacun ses affaires.

Même si, voir une fille pleurer de la sorte a pour effet immédiat de réduire mon cœur en bouillie...

Hanté par ses pleurs, mes pas s'alourdissent jusqu'au dernier étage. Dans un silence total, je m'aventure dans notre domicile en évitant au possible de réveiller la moindre frimousse. Je parcours du regard le petit séjour sur lequel donne la porte d'entrée, soupirant face à tous ces cartons entassés au centre de la pièce.

On ne possède rien, mais le peu d'objets importants ne rentre pas dans ce trente mètres carrés. Tous les quatre, nous avons déjà bien des difficultés à tenir entre ces murs, sans compter qu'Aria n'est pas encore arrivée... Je secoue la tête, incapable de songer à cela pour le moment. Je me contente de rejoindre la chambre que je partage avec ma cadette, afin de déplacer la benjamine endormie tout contre elle. Avec délicatesse, je dépose Lou dans la deuxième chambre, sur le lit qu'elle peuple avec notre mère, avant de m'échouer mort de fatigue à mon tour. En quelques secondes, Luna vient se coller contre moi en se glissant entre mes bras et mon torse, mouvement de sécurité qu'elle reproduit machinalement depuis ses dix ans sans en saisir le sens...

Les reflets du miroirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant