Giselle écouta le sermon de la prêtresse d'une oreille distraite. Un œil extérieur ne pouvait deviner l'émotion qui la saisissait à cet instant, tant elle était entraînée à paraître impassible. Elle se tenait droite sur ce grand siège qui lui sciait douloureusement les jambes. Petite de taille, ses pieds effleuraient à peine les brins d'herbe au sol et elle avait des picotements au bout des orteils.
Giselle ne pouvait s'empêcher de regarder la nuque de l'Impératrice Carolina, qui lui faisait dos deux rangées devant. Elle l'observait si fort qu'elle s'attendait à voir sa future belle-mère se retourner vers elle, interpellée par cette brûlante fixation.
On chanta plusieurs fois. Les vitraux principaux, surplombant la cime de l'arbre qui siégeait au centre de l'assemblée, s'illuminèrent dans la montée du jour. Chacun put voir la fresque de verre révéler la Mère et le Père. Enlacés dans une étreinte formant un cercle, les deux Dieux entouraient leurs cinq enfants avec amour et compassion.
Le crépitement des appareils photographiques se fit entendre. La journée était particulièrement belle et les vitraux ne s'étaient pas dévoilés ainsi depuis plusieurs semaines. Les journalistes présents avaient déjà trouvé de quoi illustrer leurs articles.
La voix de la pretresse résonna sous les arches de pierres :
— La Mère veille sur nous et nous veillons sur elle, respectons sa volonté, soutenue par le Père. Je suis votre corps et vous êtes le mien.
La religion de Dalstein chérissait en premier lieu la Mère la Terre et ensuite le Père le Ciel. Son symbole était un grand arbre, que l'on vénérait au sein d'une église ou d'une cathédrale. Il était parfois associé à une branche ou une racine dans les chapelles ou bien dans les foyers. Les Dalsteinis idolâtraient l'amour, l'unité et le respect de la Terre.
Ses valeurs étaient simples, modestes et avaient touché le cœur de nombreux croyants. De la Mère naquit toute chose, ensemencée par les graines offertes par le Ciel. Ses abbesses et ses prêtresses étaient des mères de famille nombreuse, ayant réussi à élever leur progéniture tout en étudiant la religion. Les sœurs travaillaient pour la société, recluses, et aidaient les plus pauvres et les plus indigents.
En Dalstein, chacun vénérait les Saints Parents et leurs enfants.
Giselle regarda la grande fresque illuminée en ignorant les lumières blanches des appareils photo. Les journalistes des rubriques mondaines verraient certainement la boite qu'elle avait dans les mains. Elle savait d'avance qu'ils observeraient d'un regard fiévreux ses faits et gestes.
Elle adressa une brève prière à Menée, déesse de la pleine lune et de la maturité. Protectrice des arts et de l'abondance, elle veillait sur les créateurs et incarnait l'été.
— La saison de Ronia commence, puisse sa bénédiction tomber sur les malades et les enfants à naître, fit la prêtresse en débutant une louange.
La famille impériale avait choisi depuis le couronnement d'Auguste IX, de participer aux offices de la petite église de Lengelbronn, pour plus d'intimité. Il y avait donc là principalement des nobles et leurs familles, ainsi que des gens du quartier. Les autres allaient aux églises, chapelles et arbres consacrés... ou à la grande cathédrale de la capitale.
La famille de Giselle se tenait parmi la foule, elle était arrivée juste à temps. Léonie, la demi-sœur par alliance de Giselle, avait mis un temps fou à préparer sa robe. Comme d'habitude, le Duc avait choisi des places où il pouvait observer de loin sa fille. Lui seul percevait sa nervosité. Un mariage entre les Hautebröm et la branche principale de la famille impériale ne s'était pas produit depuis plusieurs siècles. Sa fille allait rentrer dans l'histoire et son sang glisserait parmi la prochaine génération de souverain.
Le Duc sentait sa femme s'impatienter à côté de lui, il l'entendit rabrouer Léonie :
— Cesse de bouger, tout le monde nous observe.
— Tout le monde se fiche bien de nous regarder, maman, répondit la jeune femme d'un ton sec.
Le Duc serra la main de son épouse pour la pousser à se taire. Des yeux indiscrets s'étaient tournés vers eux.
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Le sang de l'Impératrice [ EDITE EN LIBRAIRIE ]
ParanormaleGiselle Le Tholy de Madalberth est l'héritière d'une des familles les plus puissantes de l'Empire de Dalstein. Depuis son adolescence, elle est fiancée au troisième Prince, Dusan, et possède privilèges, pouvoir et une réputation prestigieuse. Ses qu...