Les portes claquent. Les cris fusent. Les murs tremblent. On tente d'entrer dans sa chambre. Elle a fermé à clé. Des menaces, encore, toujours.
-Si tu n'ouvres pas...!
Ses écouteurs. De la musique. Forte. Le plus fort possible.
Elle n'ouvrira pas. Elle sait ce qui l'attends si elle le fait.
Elle se couche sur le dos. Fixe le plafond.
Avant elle aurait pleuré. Elle aurait fait une crise de panique. Elle aurait sangloté pendant des heures jusqu'à la délivrance, le sommeil.
Mais maintenant ce n'est plus la même histoire. Elle est en colère. Terriblement en colère! Contre tout. Et tout le monde.
Parce que personne ne l'aide. Parce que personne ne le voit. Parce que personne ne comprend.
Elle en veut à sa mère, qui voit. Qui entend. Mais qui ne dit rien. Qui ne fait rien.
Elle en veut à la société. Parce qu'elle participe indirectement à ce qui lui arrive. Parce qu'elle vend cette substance addictive en toute impunité comme si c'était une vulgaire boisson. Parce qu'elle est hypocrite. Parce qu'elle dépense sans compter dans des publicités préventives mais ne met rien en place pour arrêter ce fléau.
Elle en veut à son père. Elle lui en veut de ne pas savoir résister. De ne plus être son super-héros. D'avoir baissé les bras. D'avoir succombé à la tentation. D'être parti. Pas physiquement. Non. Il est toujours là. Mais plus vraiment. Trop souvent dans le flou. Trop souvent anesthésié. Trop souvent incontrôlable. Elle voudrait qu'il reviennent. Qu'il soit plus fort. Qu'il accepte de vivre à vif. Sans se cacher derrière une addiction.
Elle en veut à Chris. Parce qu'il l'a laissé tombé. Parce qu'il n'a pas tenu sa promesse. Parce qu'il a abandonné lui aussi. Il l'a abandonné.
Elle en veut à son école. Elle la déteste. Elle la déteste car elle aussi elle ne voit rien. Parce qu'elle ne l'empêche pas de faire du mal. Elle la couvre en l'idéalisant. Elle ne voit qu'une chose, ses bonnes notes. Elle se fiche du reste. Se fiche de son comportement. De ses provocations. De ses attaques. Elle ne veut pas voir. Elle se contente de ses bons résultats.
Elle en veut à ses amies. Parce qu'elles ne comprennent rien. Parce qu'elles trouvent ça drôle. Parce qu'elles ont l'impression d'être plus fortes en faisant ce qu'elle leur demande. Mais elles ont tord. Complètement tord. Elles n'ont aucune force, aucun courage, aucun mérite. Rien.
Mais elle déteste encore plus Maeva. Parce qu'elle n'a pas vu non plus. Elle n'a jamais vu. Elle n'a jamais vu pour Chris. Elle n'a jamais vu pour elle. Elle ne voit toujours pas. Elle ne comprend toujours pas. Elle la déteste. Mais elle l'admire. Elle l'envie. Elle voudrait être aussi forte. Aussi détachée. Alors elle la déteste encore plus. Parce qu'elle représente ce qu'elle n'est pas. Elle est ce qu'elle voudrait être.
Alors elle se déteste. Parce qu'elle n'est pas. Parce qu'elle est. Parce que parfois elle ne voudrait plus être. Parce qu'elle se déteste de ne plus vouloir être parfois.
On frappe encore à la porte. Non, on la martèle. On tambourine.
Elle voudrait être sourde. Ne plus entendre tous ces bruits, ces cris, ces menaces, ces insultes, ces hurlements,... Juste entendre... Rien. Le silence.
Ne pas entendre la sonnette de la maison. Une fois. Deux fois. Trois fois.
Ne pas entendre son père hurler sur sa mère.
Ne pas entendre son père descendre les escaliers en tapant des pieds.
Ne pas entendre sa mère courir à la porte.
Ne pas entendre son père s'affaler dans le fauteuil.
Ne pas l'entendre ouvrir cette foutue bière.
Mais l'entendre quand même.
Alors se retourner dans son lit et se boucher les oreilles avec son oreiller.
Mais entendre toujours.
Entendre sa mère l'appeler.
L'entendre parler à ses interlocuteurs.
L'entendre rire, gênée qu'elle ne viennent pas.
Entendre son père augmenter le son de la TV.
Entendre quelqu'un monter les escaliers.
Entendre que ce n'est pas sa mère car le pas est trop déterminé.
Entendre que ce n'est pas son père car le pas n'est pas titubant.
Entendre une grande inspiration de l'autre côté de la porte.
Et enfin, entendre qu'on frappe timidement.
Puis le silence.
- Lyndsay?
Par pitié. Non. Pas elle. Pas maintenant.
La clenche descend. C'est fermé.
-Lyndsay, s'il te plait.
Non.
-Je sais que tu m'entends. Ouvre moi.
Non.
-Je crois qu'on doit parler.
Non.
-Je croyais que ton père avait arrêté de boire?
Sa gorge se noue.
Elle se lève.
Déverrouille sa porte.
Ouvre.
Les regards se croisent.
-Merci d'avoir ouvert. Je peux?
Lyndsay s'écarta de la porte pour la laisser entrer.
-Pourquoi t'es là? demanda sèchement Lyndsay.
-Ma mère m'y a obligé. Répondit tout aussi sèchement Maeva.
-Ta mère est là? s'inquiéta Lyndsay.
-Oui.
-Putain.
-Comme tu dis.
Silence.
Elles regardaient toutes les deux leurs mains. Aucune des deux n'avaient envie d'être là. Ca faisait des années qu'elles ne s'étaient pas retrouvée seules toutes les deux, dans la même pièce.
-Il faut qu'on parle Lyndsay.
-J'ai pas envie.
-Alors laisse moi parler.
Malaise.
-Comme tu veux. Dit Lyndsay avec détachement.
-Hum ok. Par où commencer. Dit Maeva en levant les yeux au ciel.
-Grouille toi.
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Chapitre un peu plus court mais chapitre quand même!
J'ai très peu de temps en ce moment mais j'ai eu envie d'écrire alors voilà. C'est fait.
Pensez-vous qu'il est possible que Maeva et Lyndsay aient une discussion constructive? Quel est ce secret qui se cache autour de leur relation? Voulez vous que ça s'arrange?
Dites moi tout en commentaires et n'hésitez pas à laisser une petite étoile.
Sur ce, bisous de loin et à la prochaine! (Je sais pas quand)
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Tu me manques tellement
General FictionUne perte inattendue... Un deuil plus qu'imprévu... Et c'est toute l'enfance de Maeva qui se change en un questionnement sans relâche. Mais ce n'est que des années plus tard, suite à un rencontre peu conventionnelle, que Maeva voit enfin les répons...