Mauvais jour

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— Monsieur Lightwood sera mené à l'hôpital Cochin. Il sera pris en charge par les chirurgiens dès son arrivée, lança Camille avant de refermer la porte au nez d'Alexander qui croyait pouvoir suivre son père en compagnie de la belle brunette.

— C'est pas possible, hurla presque le libraire. Ce matin, ma sœur a emprunté ma voiture pour bien paraître devant un acheteur potentiel de tableaux. Qu'est-ce que je fais maintenant ?

— Pas la peine d'hurler, sunshine. Je peux t'entendre à merveille t'égosiller, répondit du tact au tact le prénommé Magnus.

Non mais à quoi Alexander s'attendait en parlant avec ce vieillard ? Déjà que les fringues de l'asiatique étaient dignes de trôner sur l'étagère des plus anciens bibelots de la librairie, il était probablement un de ces ermites qu'on dérangeait en respirant. Enfin, en ce moment, ce tas de chiffons était son seul espoir. Il se radoucit afin d'amadouer l'homme.

— Est-ce que vous auriez l'amabilité de m'aider en me transportant jusqu'à l'hôpital ? Vous deviez rencontrer mon père ce matin, non ? On peut voir, en chemin, si je peux vous aider.

— Je peux bien faire cela pour vous, mais je ne crois pas que vous allez pouvoir m'aider. Vu l'état de votre boutique, je crois bien être celui qui vous aidera le plus. Venez, on y va avant que Robert ne soit repéré.

Magnus s'était déjà mis en route vers une ruelle adjacente et Alexander ne put que courir derrière lui afin de tenir son rythme. L'asiatique se dirigea vers une vieille voiture qui avait apparemment le même âge que tous ses habits. La couleur jaune décolorée était bien évidemment en parfaite harmonie avec tout ce qui touchait à Magnus Bane. Ce dernier ouvrit sa propre porte et déverrouilla à Alexander qui s'installa dans le siège minuscule qu'il fut d'abord dans l'obligation de vider de tous les sacs de nourriture à emporter qui y gisaient.

— Ne prends pas la...

Trop tard, la poignée lui était restée dans la main. Il travailla à la remettre en place tandis que son chauffeur quittait les petits cartiers pour se fondre dans la masse compacte de véhicules se dirigeant vers Paris. Alexander cessa toutes tentatives en découvrant que Magnus ne savait décidément pas quand c'était le temps d'accélérer ou de ralentir. Plus d'une fois, il sentit son cœur sortir de sa poitrine, se demandant s'il n'allait pas lui-même mourir avant son père. Mais, cet homme était aveugle ou quoi ?

— Magnus, s'il vous plaît, dites-moi que ce n'est qu'un mauvais jour et que vous ne conduisez pas toujours de cette manière.

Pour toute réponse, l'asiatique s'exclama en se penchant pour trouver quelque chose dans le coffre à gant dont la porte retomba sur les genoux d'Alexander.

— STOP !

Entendant le jeune homme crier aussi fort, l'asiatique s'exécuta, ayant quitté la route des yeux. Il faillit encastrer une autre voiture qui prenait le carrefour giratoire. Derrière les pieds d'Alexander, un vieux verre de cola l'aspergea, propulsé par l'arrêt soudain du véhicule. Magnus trouva enfin l'objet de sa recherche et ouvrit l'étui dans sa main, puis porta une paire de lunette sur son nez.

— Quoi ? Mais vous êtes malade ! Pourquoi vous ne les portiez pas ?

— Bah, j'ai oublié ! Quelques fois j'oublie même mon nom et où je vais. D'ailleurs, moi c'est Magnus, et toi tu te nommes comment?

— Ok là c'est trop ! Vous pouvez me dire d'où vous sortez ? On dirait que vous avez vécu toute votre vie dans un hospice.

— Oh hem... pas vraiment un hospice. C'est mille fois plus génial, enfin pour moi. D'autres y trouvent une vie de misère, mais moi, c'est mon rêve d'y retourner.

Le reflet du lion (Malec AU)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant