9.

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Je suis réveillée par des éclats de voix en bas. La nuit a déjà été agitée par tous les événements de la veille : Di Casiraghi qui s'amuse à me mutiler, les coups échangés entre Andrea et moi, la scène dans la chambre puis cette discussion que nous avons eu et qui s'est terminée sur un accord pour le moins douteux - dont je me sens toujours coupable. J'enfile en quatrième vitesse mon pyjama et fonce au rez-de-chaussée, où les voix ne s'arrêtent pas. Arrivée dans le salon essoufflée et paniquée, je découvre Marco en tenue de pilote un grand sourire au lèvres qui observe une femme de dos près d'Andrea. Ce dernier pose son regard sur moi avec de telles envies de meurtres que ça me glace le sang même si je me sens pareil à son égard, et la blonde se retourne. Il me faut quelques secondes pour la reconnaître puis mon visage s'éclaire. 

- Lisa ? 

- Violence ? 

Elle tourne la tête pour chercher des yeux quelqu'un, qu'elle trouve très vite : Thaddeus. Dans un coin de la pièce, appuyé le dos contre un mur, je ne l'avais pas vu... Presque comme si ma conscience l'avait délibérément occulté de mon champ de vision. Lisa adresse quelques mots dans une langue inconnue à son cousin qui s'avance vers moi les bras croisés. Il lui répond un peu sèchement, agacé, et je vois Lisa lever les yeux au ciel, j'aimerais bien savoir ce qu'ils sont en train de se dire et dans quelle langue.

- Dommage que tu comprennes pas, me nargue Andrea. 

- Andrea la ferme, soupire Lisa. 

- Tu parles combien de langues ? je demande à Thaddeus alors que les autres parlent entre eux. 

Il fourre ses mains dans ses poches. 

- En plus de l'italien ? Couramment, deux, l'anglais et l'allemand. Mais j'ai un niveau correct dans d'autres langues.

- Lesquelles ? 

- Le russe, le français, l'arabe, l'espagnol...

Je fixe mes pieds sur le sol. J'ai l'impression qu'il sait tout faire. Déjà, pour tenir une organisation criminelle, il faut avoir beaucoup de compétences et ce, à haut niveau : économie régionale et nationale, négociation, sciences politiques, stratégies, maîtrise des langues, de l'informatique, du management, et la liste est encore très longue. Pourtant lui, il paraît être le condensé de toutes ces compétences, comme si il avait toujours fait ça, comme si il avait toujours été fait pour ça - c'est peut-être le cas, au fond. Je m'installe à table en fixant tout le monde et remue mon café dans ma tasse, jusqu'a sentir une présence à côté de moi. 

- Ca fait longtemps, sourit Lisa. 

- Oui, je dis. 

L'éternité, j'ai l'impression. C'est l'une des premières que j'ai rencontré il y a deux ans, et je me souviens encore de cette nuit où les hurlements de colère de Thaddeus avait empli la maison. Tous les meubles du deuxième étage s'étaient fracassés par terre, comme à Naples, et j'avais couru en bas pour trouver des explications ; j'avais rencontré Lisa dans le salon, en train de pleurer. C'est elle qui m'a indiqué qu'il avait un traitement pour un trouble explosif intermittent et à ce moment précis, j'avais commencé à comprendre dans quoi j'avais mis les pieds. 

- Si tu veux, on peut aller parler plus tard dans la journée !

Je hoche la tête, un sourire au lèvres. Elle me fait un clin d'oeil, pose une main sur mon épaule puis rompt le contact pour aller chercher un livre dans la bibliothèque de l'immense pièce. Je détourne les yeux et m'aperçoit  que Marco nous fixait du regard. Je suis prise soudainement d'une réflexion intense et arrête de tourner mon café dans sa tasse. Marco, Andrea, Lisa, Thaddeus. Je ne connais pas vraiment Marco. Nous avons parlé plusieurs fois et c'est celui qui ici me paraît être le plus proche de la neutralité puisqu'il travaille pour le crime mais n'est jamais violent ni dans ses paroles ni dans ses mots. Il reste discret, presque normal, et pour autant je suis incapable de le cerner ; est-ce qu'il est gentil parce qu'il a de la compassion pour moi ? Ou de la pitié ? Ou bien est-ce qu'il est gentil par interêt, comme l'on été Aderholt et Victoria ? Je porte mes yeux sur Andrea. Le voir me révulse. Il a l'air un sociopathe doublé d'un gamin de cinq ans, et non seulement c'est dérangeant, mais en plus de ça, il est impossible de savoir qui il est vraiment. Me frapper ne l'a pas dérangé mais il m'a proposé des bonbons en plein milieu d'un kidnapping... Il n'a l'air ni fiable, ni gentil, ni prévisible et je me méfie de cet homme comme de la peste ( de toute façon je finirais par lui arracher les yeux comme je lui ai promis ). Lisa est la cousine de Thaddeus, de ce que je sais elle est mariée et vit à Moscou, en Russie, alors j'assume que la langue qu'elle a parlé à son cousin était du russe. Elle est également dans le domaine du crime mais j'ignore lequel, la mafia peut-être ? Ou une association indépendante, comme l'organisation ? C'est elle la plus gentille de tous, je trouve. Je ne la connais pas beaucoup et pourtant je sens que nous avons quelques atomes crochus, j'espère donc pouvoir tisser un peu plus de liens le temps qu'elle restera au manoir. Je pense que comme Victoria et Oxan l'ont été, elle sera un de mes points d'ancrage pour tenir bon ici. 

ULTRAVIOLENCE • T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant