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Je tire la couette pour la tendre au maximum, et pose mon oreiller dessus avant de mettre un joli collier pour compléter ma tenue. Il est huit heures du matin et c'est ma première journée de travail : grâce à des annonces postées hier et avant-hier, c'est mon premier jour de travail en tant que professeure, ici, en Angleterre. J'ai trois cours dans la journée, l'un à neuf heures trente, l'un a quatorze heures trente et l'un à dix-sept heures. 

- Merde, je souffle en me rappelant de cette dernière information. 

Après avoir attrapé mon téléphone, je tape un message à Thaddeus pour l'informer que j'aurais du retard et que je serais sûrement là pour dix-huit heures mais pas avant. Très heureuse de recommencer à travailler, je prends alors le temps de me maquiller et de faire mon sac avec tout ce dont j'aurais besoin pour ce cours, et attend patiemment l'heure de partir. Après vingt minutes de voiture, je me gare dans la rue en effectuant un créneau assez maladroit, et frappe à la porte d'une belle maison pavillonnaire. C'est une très belle femme blond qui m'ouvre, un grand sourire au lèvres. 

- Vous êtes madame Caecina ? me demande t-elle en me faisant entrer. 

- C'est ça, je lui dis en lui serrant la main. Vous allez bien ? 

- Très bien, merci, et vous ? 

- Oui, merci. 

Elle me guide jusque dans la chambre de sa fille, une adolescente de quatorze ans avec un casque gigantesque sur les oreilles qui l'enlève dès que la porte de la chambre s'est ouverte. La mère nous laisse en nous souhaitant un bon cours, et je referme la porte derrière nous. 

- Tu est Adrianna, c'est ça ? je demande. 

Elle hoche la tête. Après avoir fait un peu connaissance, on s'installe à son bureau et elle m'explique ses difficultés en italien à l'école avant de sortir son cahier et de me montrer tout ce qu'ils ont fait. Je prends des notes sur ses besoins, ses envies, et établi un plan d'attaque pour l'aider à remonter la pente. Nous renvoyons pendant la première heure toutes les bases de la grammaire et de la conjugaison, je lui ré-explique en détail avec mes mots et au bout de plusieurs essais, elle fini par comprendre. Durant la deuxième heure, on pousse les choses un peu plus loin et je l'aide à faire son exercice pour la semaine prochaine ; le cours se termine très bien puisqu'elle a assimilé pas mal de connaissances. Je dis au revoir à la mère puis repart en voiture jusque chez moi. Une fois arrivée, je me pose devant la télé jusqu'à me faire à manger et savoure le silence dans mon appartement, un silence qui es devenu trop rare ces derniers temps. Et inévitablement, mes pensées s'égarent dans les souvenirs d'hier soir. Peut-être que j'ai été trop loin, peut-être que je lui ai fait peur, peut-être que je m'accroche trop alors que je sais pertinemment que tout ceci finira mal. J'ai l'impression d'avoir fait une grosse bêtise en lui ayant dit tout ça. C'est un cycle infernal, entre nous ; l'un fait un pas en avant, l'autre recule et inversement. Les plateaux de la balance montent de façon désordonnée, j'ai l'impression, comme si à chaque fois que l'on s'avouait un peu plus nos sentiments, notre conscience nous rappelait à l'ordre et nous punissait par des regrets instantanés. Et vraiment, réellement, c'est l'une des pires sensations que je n'ai jamais connue. 

Je repars ensuite pour mon deuxième cours, dans une petite ville pas très loin, rencontre les deux parents puis m'installe avec l'adolescent afin de procéder au même plan qu'avec la jeune fille d'avant. Le cours se passe très bien et je quitte la maison pour me rendre à la suivante, pas très loin, avant de répéter l'opération chez les troisièmes clients. Je rentre vers dix-huit heures quinze de chez moi, et prend ma douche avant de fouiller dans mon armoire pour trouver une belle tenue à mettre. Je choisis un pantalon cigarette bleu nuit que j'associe avec un pull blanc à grosse mailles ; c'est confortable et classe, alors ça fera l'affaire. J'attache une petite chaine en or autour de mon cou, me maquille les yeux et applique une poudre matifiante sur ma peau avant de prendre mon sac à main et de descendre pour prendre la voiture. Je conduis tranquillement jusqu'au manoir. J'ai hâte de voir Thaddeus, même si m'avoir dévoilée de cette façon hier soir me laisse un peu démunie. J'ai retenu mes sentiments pendant tellement de temps... Ma conscience me hurle de faire attention, ne pas trop me dévoiler au risque d'en payer les conséquences, et je dois avouer que je ne sais plus très bien qui écouter. Pour chasser ces pensées je claque la portière et traverse l'allée, monte les quatre marches du perron puis rentre à l'intérieur. Thaddeus descend les escaliers quelques secondes plus tard alors que je pose mon manteau sur le porte-manteau. 

ULTRAVIOLENCE • T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant