Chapitre 6 : Erreurs

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J'ai remercié mon patron pour la bibliothèque, puis j'ai finalisé le rapport avec les derniers éléments, et ai imprimé tous les courriers. Mais depuis que je suis assis dans cette voiture, je me sens étrange. Le chauffeur m'a demandé où je voulais aller, et j'ai dû m'installer à l'arrière, comme avec Monsieur Rewo, comme si j'étais une personne importante. Et si, hier soir, après avoir renvoyé ''La Baffe'', je me sentais plus puissant, je trouve quand même qu'avoir un chauffeur est démesuré. D'autant que j'ai mon permis. Mais Colas n'a rien voulu entendre.


Alors, depuis que la voiture s'est garée, je pérégrine dans le centre ville, vagabondant d'une vitrine à l'autre, anonyme au milieu de la foule avec mon grand pull noir. Ça me fait bizarre de le porter à nouveau. En l'enfilant tout à l'heure, j'avais l'impression de changer de peau, comme si il appartenait à un autre. Et, en quelque sorte, c'est le cas.

J'évite avec soin de m'approcher du campus universitaire, par crainte d'être alpagué par un professeur qui aurait noté mon absence aux derniers cours, mais le nombre d'étudiants aux terrasses des cafés me rappelle que ce sont les vacances pour encore quelques jours. Aussi choisis-je d'aller là où je me suis toujours senti à mon aise, libre d'être moi-même en toute solitude : le parc Florence, oasis de calme au cœur de la ville, avec son grand point d'eau et son saule pleureur, à l'ombre duquel je m'installe.

J'adore cet endroit, son calme, sa fraîcheur qui persistera même au cœur de l'été... Et puis, cet arbre est si vieux que ses longues branches forment un rideau dense qui isole quiconque se cache près de son large tronc. Un cocon idéal pour réfléchir et laisser mûrir ses pensées.


J'ignore combien de temps je reste dans mon abri, cogitant aux si grands changements qui se sont produits en moins de deux semaines dans ma vie. Mais le point qui revient encore et encore, c'est comment faire durer mes cachets ? La boîte contenait encore pour un mois de suppresseurs quand Monsieur Rewo me l'a rendue. En les prenant un jour sur deux, je double ce temps. Mais après ? J'ai vérifié tous mes cartons, je savais que je n'avais plus d'ordonnance, mais j'ai quand même cherché, des fois que j'aurais commis une erreur. Mais non, je n'ai rien. Alors, à l'ombre de l'arbre qui pleure pour moi, je continue de chercher une solution, doutant qu'on me laisse me rendre chez un médecin.


Mon téléphone sonne, me faisant sursauter. Numéro inconnu. Rien de surprenant, vu que je n'ai que ceux de mes parents et de Daniel.

_ Allô ? » réponds-je, intrigué.

_ Coucou, Tris' ! Dis voir, t'es où ? » me fait la voix de Colas.

Je retiens un hoquet moqueur. Je me disais bien que cette liberté de circulation était trop belle pour être vraie.

_ Tris' ?

_ Dans le centre. » tente-je de rester évasif.

_ Ha. Merde.

_ Pourquoi ? Il faut que je rentre ?

_ Ben non, mais tes costumes sont arrivés chez l' tailleur et l' Boss voudrait qu' tu les essayes avant qu'on les ramène chez nous. Histoire d' pas perdre de temps s'il y a des r'touches à faire, tu vois ?

_ Je vois, oui. Mon après-midi de liberté vient de s'achever.

_ Ben non. On réduit juste un peu. Si tu peux être chez l' tailleur à dix-huit heures, c'est nickel. On se r'trouve là-bas, et ça laisse le temps d' vérifier tes fringues avant d' rentrer. Ou, si tu veux, tu m' dis où t'es et j' te r'joins pour qu'on boive un verre avant d'y aller. Qu'est-ce qu't'en penses ?

L'amant du parrain [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant