Chapitre 19 : Une certaine idée de la rédemption

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Savio ne place pas n'importe qui pour ma surveillance. A part la nuit, il s'acquitte lui-même de cette tâche. Et la première journée est la pire. Il ne me décroche pas un mot, et se contente de me fixer. J'ai la sensation qu'il est encore plus fâché que ne l'est le parrain.

Au bout de trois jours, je commence à me faire à sa présence, à son regard sur moi à tout instant. Mais j'ai beaucoup plus de mal avec le fait qu'il m'empêche de voir Colas, ou de faire autre chose que mon travail. J'ai essayé de lui dire que j'avais besoin de me dégourdir les jambes, ne serait-ce que dans le bâtiment, pas même dehors, mais il a argué que ma chambre était assez grande pour que je puisse marcher. J'ai bien compris le message sous-jacent, que je ne méritais pas de garder cette chambre, d'être encore aussi bien logé. Et, je partage son avis. Et puis, je subis une sanction pour une faute qui aurait dû me coûter bien plus, alors je n'ai pas le droit de me plaindre. D'autant que, mis à part le minibar, que je soupçonne le Béta d'avoir récupéré, et mon ordinateur, ma chambre a gardé tout son mobilier, et j'ai aussi pu conserver mes livres.

Mais le pire, ce qui me fait bien plus de mal que les regards durs de Savio ou l'absence de Colas, c'est que mon patron a délocalisé mon bureau dans la grande salle, et que je ne peux pas le voir. La porte entre nos deux espaces se refermant derrière le jeune homme faisant la liaison entre nous ne me laisse même pas entendre sa voix. J'ai l'impression de mourir à petit feu.


_ Savio ! » entre un jour son amant dans la grande salle. « L' Boss veut t' voir. Vas-y, j' surveille Tristan.

Le Béta ne m'accorde pas un regard, mais moi, le voir me met du baume au cœur. Ça va bientôt faire deux semaines que je ne l'ai pas vu.

_ J'appelle un de mes gars. Y'a pas moyen que ce soit toi.

_ Savio. Fais pas chier, et vas-y. Ordre du boss.

L'Alpha grogne, et je perçois quelques mots quand il lui donne ses consignes : pas un mot, le lâche pas des yeux, dur, plus ton pote... Je n'ai pas besoin d'avoir le reste pour comprendre.

Savio sort un instant plus tard, me laissant seul avec le Béta, et, même si je rêve de pouvoir à nouveau discuter avec quelqu'un, je me concentre sur mon travail pour ne pas attirer d'ennuis à celui que je considère encore comme mon ami.

Mais, si l'Alpha s'installait toujours sur une chaise derrière moi, ce n'est pas le cas du brun qui se laisse tomber dans l'un des sièges en face de moi, et se met à se curer les ongles.

_ L' répète pas à Savio... » commence-t-il au bout de quelques instants. « J'aurais fait pareil si ç' avait été mon frangin. Mais tu méritais quand même d' te prendre une raclée !

Il me lance un regard où il fait passer d'abord sa colère, puis son agacement, et finalement son pardon.

_ Crois-tu que je ne le sais pas ? » murmure-je, fautif. « La mansuétude de Monsieur Rewo me fait plus de mal qu'autre chose. Tu n'imagines même pas à quel point je me sens coupable. J'aurai préféré être vraiment puni... Je ne sais pas, moi... Qu'il me frappe, qu'il...

_ Jamais il lèvera la main sur toi, idiot !

_ Je sais... Mais ça ne m'aide pas à me sentir mieux. Je... Je vous ai tous trahi, et je sais que Savio rêve de me cogner. Je ne l'aurai pas volé. » achève-je dans un murmure en baissant la tête.

_ Nan, tu l'aurais pas volé, ça c'est clair ! Et pour être franc, y'a pas qu' Savio qui veut t' mettre un poing ! J'ai été soulagé quand l' patron a dit qu'on t' butterait pas ; mais une ou deux claques, ça t'aurait p't-être remis les idées en place !

L'amant du parrain [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant