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15 juillet
Londres
Cimetière de Coventry

Je passe ma main sur mon front, il est imbibé de sueur.
Après est-ce vraiment surprenant sous 34 degrés en plein cagnard ?
J'observe les personnes autour de moi, elles aussi ne supportent pas cette chaleur estivale.
Les hommes répètent ce petit geste qui consiste à décoller leur cravate de leur col de chemise toutes les 5 secondes. Les femmes s'éventent avec le feuillet de messe.

Seule ma mère réussit à rester digne. Elle écoute le prêtre. Il explique la mort inattendue de mon père. Je baisse la tête afin de ne pas croiser le regard de pitié des collègues ou amis de mon père.

Comment décrire mon père, Jules Duras ?
Il travaillait dans une banque et était fière d'afficher sa réussite. Il avait rencontré ma mère lorsqu'il habitait à Paris. Ils s'étaient mariés, avaient eu mon grand frère Louis et avaient déménagé à Londres. Depuis 20 ans, ils vivaient ici, ma mère avait réussi à trouver un poste de médecin clinicien. J'ai aussi deux grandes sœurs Ambre, 4 ans d'écart et Victoire, 3 ans d'écart.

Les quatre enfants, nous sommes placés derrière ma mère. J'ai toujours admiré mes grands frères, grandes sœurs. Je voulais à tout prix leur ressembler. J'ai donc tout fait pour être bonne à l'école, sportive, entourée de pleins d'amis...
Pourtant, l'impression de n'être qu'un de leur brouillon mijote en moi.
La plupart des personnes de mon collège me trouvent arrogante, insolente ou gosse de riche.

Je le voyais quand Papa parlait de Louis, de Victoire ou d'Ambre ses yeux brillaient ! Moi, il n'a presque jamais parlé de moi.
Après cette année je ne vais rentrer qu'au lycée, contrairement à mon frère élève à Oxford, Ambre en prépa à Ginette et Vic qui va commencer médecine...

Une fois la cérémonie finie, tous les invités se précipitent pour rentrer dans notre maison où maman a préparé toute une réception. J'en peux plus de rester debout, à me comporter poliment avec les invités qui me parlent comme si j'étais une débile.
J'entends leur messe basse:"mon dieu 15 ans et perdre son père !".

Le pire dans l'histoire, c'est que je ne ressens rien. Mon corps est vide, plus aucune émotion ne circule.

18 heures, les invités partent enfin !
Je ne peux plus supporter ces talons de merde mais ils sont jolis donc je leur pardonne. Et puis, j'ai réussi à négocier un sac Zadig à ma mère donc bon, je vais arrêter de me plaindre.

Il ne reste plus que mon grand-père, le père de mon père.
Cet homme m'effraie.
Quand je vous expliquais que je me trouvais différente de mes frères et sœurs, cet homme en est pour beaucoup. Il y a quelques années, quand on se rendait chez lui, il me traitait toujours différemment de Louis, Ambre et Victoire. Il se montrait chaleureux avec eux et moi il me regardait à peine. Il m'ignorait. Ça me faisait plus mal que de possibles critiques...

Louis est le premier à s'éclipser chez sa petite amie, Ambre le suit et Vic se rend chez une "amie". Maman, mon grand-père et moi nous retrouvions seuls dans le salon.
Un silence d'or règne. Ni maman, ni moi n'osons le briser.

D'un coup mon grand-père, Henri commence à hurler en me pointant du doigt:

"Tu as tué mon fils, tu as tué mon fils salle garce !

-Henri calmez vous, vous savez bien que Jules est mort d'une crise cardiaque ! Crie ma mère, j'entends de la peur dans sa voix

-Elle doit savoir la vérité !! lui répond-il

-Quelle vérité ? Bordel arrêtez de parler comme si je n'étais pas là !

-Tu ne fais pas et tu ne feras jamais partie de ma famille !

Fever [Niki]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant