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Courant tous dans la même direction, les bêtas et la femelle jouent ensemble, se taquinant et inventant un jeu dont je ne comprends rien. L'éclat de leur jappement heureux résonne dans la forêt, une mélodie légère.

   Je sens Chakara remuer à l'intérieur de moi, son désir de se joindre à eux vibrant comme un écho. Elle veut gambader, jouer, se libérer de cette prison qu'est notre réalité actuelle.

— Patiente, beauté. Bientôt, tu pourras te promener, courir, gambader, sauter, jouer dans la forêt.

— Je suis persuadé que nous pouvons leur faire confiance. Si seulement ils savaient que nous sommes des louves blanches, ils nous aideraient. Tu l'as dit toi-hier même hier soir : la sauce visqueuse provient de notre village, de notre meute. Ce sont nos alliés, car nous la réservons uniquement à ceux qui nous sont nos alliés.

— En un an, les choses ont sûrement changé. Tu as oublié ce que j'ai mentionné hier ? Ils peuvent très bien s'être retournés contre nous. Pourquoi voudraient-ils s'allier à ceux qui nous ont détruites ?

   Elle soupire, se retirant de notre connexion. Chakara fait ça chaque fois qu'elle veut réfléchir, s'éloignant pour éviter de m'inonder de ses tourments. Nous avons rarement été en désaccord, pour ne pas dire jamais. Mais aujourd'hui, pour la première fois, nos voix s'opposent. Elle est prête à leur faire confiance, à dévoiler nos secrets. Moi, je reste méfiante ; rien ne prouve qu'ils ne jouent pas la comédie, rien n'assure que leur bonté soit réelle.

   Plus nous avançons dans cette forêt dense, plus j'aperçois au loin une cascade. Mes yeux de louve, aiguisés par des sens affinés, me permettent de voir jusqu'à un petit brin de poussière sur les meubles en bois qui l'entourent. Je distingue des poils blancs se mêlant à la fourrure grise de l'alpha, des taches à peine perceptibles qu'un humain ne pourrait jamais déceler. Pour eux, Maxwell n'est qu'un loup gris.

   Je desserre mes doigts, provoquant la surprise de mon destrier improvisé, une bêta à la carrure musclée. Je sens son étonnement et sa crainte de me voir chuter de son dos. Plus je relâche mon étreinte, plus il ralentit, dépassé par sa sœur et les autres bêtas. Ce gars craint de me blesser. Pourquoi aurait-il peur alors que, logiquement, je ne suis rien pour lui, pas encore sa Luna, pas encore sa compagne?

— Ne t'inquiète pas, tu peux accélérer. Je ne tomberai pas. J'ai l'habitude de ne pas m'accrocher...

   Il finit par accélérer, mais seulement après de longues minutes. Je ressens son intrigue face à mes paroles, un questionnement qui ne trouve pas sa place dans ce moment. Il choisit de presser l'allure pour attraper le retard.

   Je lâche complètement ses poils, tendant mes bras sur chaque côté de mon corps comme des ailes. Je ferme les yeux, me laissant submerger par les souvenirs de mon enfance.

   Je suis arrachée à cette réminiscence lorsqu'il ralentit, s'arrêtant enfin devant une cascade majestueuse. Son sommet est haut, mais sa beauté est à couper le souffle. Je reste émerveillée, absorbant la splendeur de l'eau qui se déverse avec force et grâce, jusqu'à ce que la voix de Liam me tire de ma contemplation :

— Tu verrais ta tête, Espoir. C'est magique.

   Je reprends mes esprits et baisse le regard, un léger sourire sur les lèvres. Maxwell me fixe, un éclat de curiosité dans ses yeux. Je descends de son dos, mais dans la précipitation, je trébuche et tombe sur le derrière, provoquant un éclat de rire général. L'alpha reprend forme humaine, des vêtements lui sont lancés par ses bêtas.

— C'est magnifique, n'est-ce pas ?

   Je ne prends même pas la peine de lui répondre, préférant m'émerveiller devant le paysage.

Et si... Nous étions âme-sœurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant