Chapitre XI

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— Il m'a dit de le laisser seul pour réfléchir parce que j'allais l'influencer. Je veux juste essayer de l'aider, grogna Christian en avalant son café.

Jean, qui avait patiemment attendu que son cousin lui confie la raison de sa présence à sa porte au petit matin, releva la tête de son journal. Il avait la très forte envie de frapper son cousin et son mari. Quand ce n'était pas l'un qui chassait l'autre pour le protéger, c'était l'autre qui le faisait. Ça pourrait être amusant si la dernière fois n'avait pas coûté la vie à autant de gens. 

— Je ne sais plus quoi faire, Jean… Il ne me fait plus confiance pour prendre soin de lui. Et s'il ne voulait plus qu'on soit ensemble ?

— Attends ce soir avant de dire n'importe quoi, je suis sûr qu'il te rejoindra. Et puis, on a tous besoin de réfléchir seul par moment. Toi le premier, étant donné que tu as passé la soirée je ne sais où plutôt que de directement venir me voir. J'ai tort ?

— Non… j'ai passé la soirée dans l'appartement. À réfléchir à ce que j'avais pu faire de mal… mais Alexei est… je sais pas, j'avais l'impression de le connaître mieux que personne alors qu'en fait…

— Sérieusement, Chris', arrête de réfléchir. Tu te fais du mal. Rien ne vous avait préparé à ça, il faut juste que vous retrouviez votre équilibre.

— Et comment je fais s'il me chasse de sa vie ? 

Jean soupira. Il avait vraiment très très envie de le frapper. Ce qu'il pouvait être borné ! 

— Il ne va pas faire ça. Arrête de te prendre la tête, par pitié. Alexei t'aime et tu l'aimes, vous êtes mariés quand même !

— Oui mais… si on s'était marié trop rapidement ?

— Tais-toi avant de dire encore n'importe quoi, par pitié ! Alexei va venir ce soir, et vous irez tirer ça au clair dans votre chambre. Je vais gérer le club pendant ce temps, ok ?

Christian hocha la tête sans rien ajouter. Mais toutes ses pensées continuaient de tourner dans sa tête, attaquant inlassablement la confiance qu'il avait en son mari, en leur couple, et sa confiance en lui. Si Alexei ne venait pas au club ce soir, ce serait sûrement le coup de grâce. 

~~~

Alexei n'avait plus autant stressé en arrivant devant la porte de The Guardian Club que la fois où il était venu accepter le contrat de Christian. Il appréhendait la réaction de son mari. Il avait réfléchi et avait compris qu'il avait besoin de Christian, mais si ce dernier avait réfléchi aussi et avait décidé de le laisser tomber ? Ça l'effrayait. Mais il ne pouvait pas fuir. Il ne pouvait plus fuir. Autrement il allait envenimer les choses et c'était la dernière chose qu'il souhaitait faire. 

Il prit une profonde inspiration et passa devant les personnes qui faisaient la queue à l'extérieur. Personne ne protesta, ils savaient tous qui il était et ce statut avait quelques avantages. Notamment celui de ne pas avoir à attendre plusieurs minutes devant la porte. Il demanda au vigile de prévenir Christian qu'il était arrivé quand il entra dans l'établissement, puis il se rendit au vestiaire. Il profita que la pièce soit déserte pour s'asseoir sur un banc et souffler. Comment pouvait-il être aussi stressé à l'idée de voir son mari ? C'était Christian, il le connaissait, pourquoi devait-il en avoir peur ? C'était tellement idiot et…

— J'avais peur que tu ne viennes pas. 

Avec un sursaut, le blond se tourna vers l'entrée du vestiaire. Appuyé contre la porte, Christian le regardait, ses cheveux châtains toujours impeccablement coiffés vers l'arrière et ses yeux émeraudes brillants au gré de la lumière tamisée de la pièce. Il était beau. Son cœur tambourina un peu plus fort dans sa poitrine. Non, il ne pouvait pas le perdre. Pas lui. 

— Je te l'avais dit. C'était juste un soir. J'ai… j'ai pu réfléchir. Et me rendre compte de certaines choses. 

— Moi aussi. On ferait mieux de monter pour en parler… ce sera plus confortable.

Le mannequin hocha la tête et se leva, déposant sa veste sur un des porte-manteaux. Il sentait la panique monter en lui. Christian avait l'air si fermé qu'il ne devinait pas ce à quoi il pensait, ce à quoi il avait réfléchi. Il le suivit dans un silence pesant par le couloir de service. Il ne savait pas pourquoi mais passer par là ne lui plaisait pas. Il avait l'impression de suffoquer tant il était paniqué à l'idée que la discussion se finisse mal. À moins qu'il ne soit déjà en train de suffoquer ? Il n'en savait plus rien. Tout semblait se mélanger, tanguer. Les sons semblaient s'être étouffés eux-aussi, alors que ses pensées faisaient tellement de bruit. Tellement…

Il se laissa glisser contre le mur du couloir, tentant de faire entrer l'air dans ses poumons. Il ferma les yeux, tenta de reprendre pied dans la réalité, mais il avait de plus en plus l'impression de se noyer. Il sentit qu'on le secouait, avant que son corps ne se décolle du sol, mais tous les sons étaient masqués par le sifflement dans ses oreilles. Ses joues étaient mouillées. Est-ce que c'était parce qu'il se noyait ? Il voulait appeler à l'aide, mais sa gorge était tellement serrée, il n'avait tellement plus d'air…

Était-il en train de mourir ? 

KittyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant