Chapitre 5

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Le lendemain matin, ils achetèrent deux chevaux et filèrent sur la grande route, en direction du Nord, jusqu'à la croisée des chemins. Puis ils filèrent vers l'Est, en direction de Porte-bleue.

Ils firent étape pour la nuit à Casjou, un petit village situé à quelques lieues de la route, et le lendemain matin ils repartirent, en coupant par une route secondaire des marais. Ils firent étape au village de Lern, à midi, puis retrouvèrent la route principale qu'ils suivirent jusqu'à Porte bleue.

Le jour déclinant, ils poussèrent leurs montures sur la fin du trajet. Ils passèrent les portes de la ville quelques minutes à peine avant leur fermeture.

Même s'ils avaient réussi à entrer, ils ne purent toutefois pas quitter quartier de la Passe, car les portes interquartier, elles aussi, étaient closes pour la nuit. Dans un cas comme celui-ci, sauf autorisation officielle ou passe-droit spécial, impossible de rejoindre la Fosse. Cependant, il leur fallait impérativement rentrer chez eux avant le lever du soleil, sinon, des voleurs en faction près des portes remarqueraient leur arrivée, ce qui susciterait quelque mystère, attendu du fait que personne ne les avait vus sortir de la ville. Autant dire de quoi donner à Garadine matière à s'intéresser à eux, ce qui pourrait bien le mener un peu trop près de la vérité. Aussi, la raison décidée pour justifier leur absence de ces derniers jours ne pouvait tenir que s'ils réapparaissaient à la tanière, comme n'en étant jamais partis. Aucune alternative pour eux, donc, ils devaient regagner la Fosse pendant la nuit, coûte que coûte.

***

Après avoir laissé leurs chevaux dans une écurie et payé le palefrenier, ils se rendirent tout à l'Est du quartier, impasse Merciron, non loin de la porte des Tuiliers.

Au fond de ce cul-de-sac se trouvait le rempart, une section en forme de T faisant l'intersection entre les quartiers de la Passe, la Fosse et la Flaque. La particularité du rempart, à l'endroit de cette impasse, était que sa paroi était nue, un détail qui, pour les adeptes de l'escalade furtive comme nos deux mercenaires, avait une importance capitale.

À Porte bleue, la plupart des flancs de remparts étaient encombrés par des maisons construites contre. Escalader des habitations n'était pas un problème en soi, mais cela exigeait une grande discrétion et surtout quelques équipements adéquats qui, présentement, faisaient défaut à nos deux mercenaires. L'autre défaut des toitures de maisons était que, en plus de contraindre à ne pas réveiller l'habitant, cela exposait fortement le funambule, qui devenait repérable de loin par les gardes en faction en haut, sur la muraille, plus encore si la nuit était claire, comme c'était le cas ce soir.

Cachés dans la pénombre de l'impasse, nos deux mercenaires se tenaient à l'affût, attendant patiemment de voir s'éloigner la lanterne du garde faisant sa ronde. Ils savaient qu'à partir du moment où il serait passé, il leur faudrait compter trois minutes avant d'agir, qu'il soit assez loin, après quoi ils disposeraient de neuf minutes avant son retour pour gravir les douze toises, traverser et redescendre de l'autre côté.

– C'est bon, fit Uther dès que la voie fut libre.

Irina se munit alors de sa longue corde, laquelle était fixée à un grappin d'acier, emballé de plusieurs couches de tissus pour atténuer le bruit à l'impact.

Elle fit tournoyer l'objet avant de le lancer vigoureusement dans les airs, visant juste, en le coinçant entre deux créneaux.

– Allons-y, dit-elle en passant devant.

– On se croirait revenus à Maoulia ! fit Uther, un sourire en coin.

Experts en la matière, l'ascension fut brève.

Le Cœur, la Foi et le Fer 🏆 (Roman)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant