Chapitre 3 : marché

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Cela fait maintenant quatre jours que je suis dans un chariot avec d'autres esclaves, on nous jette de temps en temps des morceaux de pain et des gourdes d'eau. Les autres se jettent dessus et se battent comme des bêtes pour avoir un morceau de plus. Ça me fait peur. Jusqu'à quel point ces romains veulent-ils nous rabaisser ?

Ils rient grassement en regardant ces luttes pour chaque morceau. Le bon côté de cette situation c'est que nous sommes dans un chariot et que nous n'avons pas à marcher comme d'autres esclaves que nous croisons sur les routes. Nous sommes par contre très surveillés. Le seul fait de se lever peut entraîner une sévère correction.

Au cours de ces quatre jours, quelques hommes ont essayé de s'enfuir malgré leurs chaînes,profitant d'un moment d'inattention de la part des marins qui ont suivit le capitaine et de la proche forêt. Malheureusement, ils n'ont même pas réussi à sortir du chariot.

Les marins les ont emmené un peu à l'écart et on a entendu des cris et des bruits de coup...beaucoup trop de bruit. Bien que je salue leur courage d'avoir tenté de s'enfuir, je les trouve vraiment faibles d'avoir ensuite imploré la clémence de ces chiens de romains. Où sont passé leur courage et leur fierté ?

Depuis le début de cette histoire, les personnes les plus courageuses de notre groupe sont, contre toute attente, les mères. Discrètes, effacées, presque oubliées, la plupart du temps, mais dès qu'on touche à leurs enfants, elles sont comme des lionnes qui prennent possession de leurs corps. Elles se battent de toutes leurs forces pour les protéger, quitte à se faire battre par les marins plus tard. Leur attitude me fait penser à ma mère. Je sais qu'elle aussi se serait battu de toutes ses forces pour me protéger.

Penser à elle me fait toujours souffrir malgré toutes ces années. Je me demande comment aurait été mon adolescence avec elle. En fait, je n'ai même pas besoin de me le demander pour le savoir. Je sais déjà que j'aurais continué la musique et le chant, je sais que je n'aurais pas perdu mon sourire,je sais que j'aurais été heureuse et je sais que Titus n'aurait pas perdu sa joie de vivre.

Titus, mon père de cœur, je ne l'ai toujours pas vu depuis que nous sommes sortis de cette cale infâme.Il y faisait sombre alors je ne voyais pas tout le monde, mais maintenant j'en suis certaine, il n'est pas parmi les esclaves. Ce qui me laisse peu d'espoir sur le fait qu'il soit encore en vie.

Je ne me rappelle toujours pas comment j'ai pu arriver dans cette cale et ça me dépite énormément.J'ai toujours eu une bonne mémoire et ne pas me souvenir d'un tel moment m'interroge : n'aurais-je pas été droguée ?

Je chasse rapidement cette idée de ma tête, la seule personne ayant eu la possibilité de le faire, c'est Titus. Jamais il n'aurait pu me faire ça. Mais alors, que c'est-il vraiment passé par les dieux ?Je ne suis quand même pas allée dans cette cale toute seule !

Soudain, une violente secousse me déséquilibre. Je tombe tête la première contre les planches de la charrette. Tout le monde tombe. Je grogne, mécontente de ma situation et peste contre le mauvais entretien des routes.

J'ai aussitôt honte de ma réaction. Ce sont les esclaves qui font les routes comme je l'ai vu quelques fois lorsque notre chariot passait à proximité. Quelle idiote ! Je réalise que je viens de penser qu'il fallait donc plus d'esclaves pour pouvoir finir les routes,simplement par ce que j'en ai subit les frais.

Une dispute me sort de ma réflexion

- 200 quinaire pour un taureau, c'est du vol.

- C'est une bête très prometteuse.

- Un esclave coûte moins cher.

- Tu n'en a jamais acheté alors. Je t'assure que mon taureau est le meilleur sur le marché. Tu n'en trouveras pas de mieux, alors c'est 200 quinaires, à prendre ou à laisser.

Si seulement... Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant