chapitre 15

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naruto grimaça en passant un doigt sur sa tempe gauche. elle le lançait terriblement et il la sentait gonfler et s'enflammer. il lâcha un juron et maudit sasuke en poussant la porte du café où il travaillait et dans lequel il devait prendre son service dans dix minutes. il salua d'un air maussade ses collègues qui le regardèrent passer avec surprise. puis il atteignit le comptoir derrière lequel le patron nettoyait des verres. il ne le quittait jamais : il adorait entretenir son matériel et préparer les boissons. lorsqu'il le vit venir, il eut un sifflement qui aurait pu être admiratif dans une autre situation.

« ben dis donc… qu'est-ce qui t'est arrivé ? »

naruto haussa les épaules, peu désireux d'aborder le sujet. mais se sentit néanmoins obligé de dire :

« une dispute qui a mal tourné. c'est rien. »

mais ses traits trahissaient tout à fait la kyrielle de sentiments qui le traversaient en ce moment : un reste de colère, un zeste de rancune, beaucoup de regrets et, mélangée au tout, une profonde tristesse. le patron le considéra avec un air grave. il avisa le terrible hématome qui bleuissait sur la tempe de son serveur, la commissure de ses lèvres où un peu de sang avait séché, la légère coupure qui serpentait sur le côté gauche de sa nuque et que son tee-shirt et ses cheveux courts laissaient voir. il posa son torchon en soupirant.

« naruto, je crois que tu devrais rentrer chez toi. »

le jeune homme releva la tête avec surprise.

« quoi ? mais je…

-je ne peux pas te laisser servir mes clients avec des blessures pareilles. de une, tu vas les faire fuir. de deux, je préfère me passer de tes services ce soir pour que tu récupères. tu rattraperas tes heures pendant les vacances. en attendant, rentre chez toi. »

naruto garda les lèvres closes. il baissa la tête, abattu, et quitta l'établissement sous le regard inquiet de son patron.

il n'alla pas bien loin, à peine quelques rues plus loin, près d'un vaste carrefour. il avisa les grilles de sécurité au bord du trottoir et se hissa à leur sommet, les jambes du côté de la route, au-dessus d'une piste cyclable. les nuages, dans le ciel, s'amoncelaient, gorgés d'eau. et ce fut sans prévenir que la pluie se mit à tomber. elle s'intensifia avec le temps et finit par marteler le bitume, les hauts immeubles qui l'entouraient, le toit des voitures, ses épaules. il laissa retomber sa tête. et se mordit la lèvre. son cœur venait de s'alourdir et le faisait terriblement souffrir.La maison de Sasuke n'avait jamais paru si vide ni si froide. Suigetsu et Juugo étaient partis pour leur voyage d'étude en début de semaine et ils n'avaient jamais autant manqué au jeune homme que ce soir-là.

Sasuke n'avait pas pour habitude de se confier à eux. Il ne leur avait jamais témoigné le malaise qui régnait dans son couple à l'époque où il sortait avec Karin – et il était de toute façon trop palpable pour qu'ils ne l'eussent pas remarqué. Et pourtant, à ce moment-là, il aurait aimé qu'ils fussent là, ne serait-ce que pour ne pas être seul avec lui-même, seul avec sa jalousie, seul avec ses regrets.

Il s'était réfugié dans sa chambre, sans manger. La léthargie dans laquelle il venait de tomber l'empêchait d'avoir faim. Il s'était affalé dans le fauteuil qui faisait face à son canapé. Sur sa gauche, sa fenêtre laissait passer la lumière grisâtre d'une journée orageuse et les gouttes de pluie s'écrasaient contre la vitre avec fracas, créant des ombres mouvantes sur les murs.

Mais il ne se souciait guère du temps, du vent qui mugissait, de l'averse qui s'abattait sur la ville. Un coude replié, sa main soutenant sa tête, il fixait d'un air pensif la photo qu'il tenait entre ses doigts, sur ses genoux. Et malgré la pénombre, il devinait chacun des détails – il les connaissait par cœur. Naruto et son sourire d'idiot, Naruto et ses joues striées, Naruto et ses mèches lumineuses, Naruto contre lui, son bras à lui passé autour de son cou, ses doigts lui faisant d'innocentes oreilles d'âne.

Au sommet de la montagne SasuNaruOù les histoires vivent. Découvrez maintenant