huit

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Le poison d'Aymen m'avait harcelé tout le week-end pour que je lui ramène chez lui un truc qu'il m'avait prêté. Je comptais lui rendre demain en cours mais il m'avait rendue tellement folle pour que je vienne maintenant que j'avais fini par céder.

Par contre, j'avais une idée derrière la tête quand même. J'avais repéré un pull trop beau au centre commercial et j'avais réussi à gratter 20€ à mon père, 10€ à Insaf et 10€ à un de mes oncles donc en échange j'avais bien l'intention de traîner Aymen avec moi là bas pour me venger du fait qu'il m'ait beaucoup trop casser les couilles.

Lorsque je sonne, c'est son petit frère Naïm qui m'ouvre la porte.

— Salem, il commence.

— aleykoum salem, ça va ?

— ouais ouais, entre

J'entre dans le salon mais je ne vois personne, il a l'air d'être seul.

— il est pas là Aymen ?

— il dort là j'crois, il répond.

Orh, mais c'est une blague ? Donc jusqu'au bout je vais me faire hagar par lui enfaite ?

— va le réveiller tranquille

Même si c'est pas l'envie qui manque, j'suis pas une bâtarde. Puis ça doit être fatiguant de passer ses nuits à parler au téléphone avec ses meufs, faut bien qu'il se repose un peu mdr.

— nan c'est bon laisse tomber, tu lui donneras ça de ma part.

Il m'assure qu'il lui rendra ce que j'étais venue lui ramener, on parle quelques minutes puis je finis par me tailler. Tant pis pour le centre commercial. Au pire j'irais avec Sourour plus tard en début de soirée avant que ça ferme.

Je marchais vers l'arrêt de bus pour rentrer, quand mon téléphone a vibré. Je regarde et c'est un message d'un numéro non enregistré qui disait « qu'est ce que tu fais la nerveuse quand tu marches avec tes sourcils qui se touchent ? ».

Je souris inconsciemment en lisant le message. Le numéro n'est pas enregistré mais je sais pertinemment que c'est Kahil l'expéditeur. C'est la seule personne que j'ai entendue de toute ma vie sortir cette expression des sourcils qui se touchent, et je pense pas que ce soit un hasard.
Pourtant je ne me rappelle pas lui avoir donné mon numéro, et même si j'ai déjà une idée, je me demande bien d'où il l'a eu.

Je commence à regarder un peu partout autour de moi pour le chercher, et je finis par le trouver penché à la fenêtre d'une voiture, les bras appuyés sur celle ci, entrain de parler avec le conducteur.
Lorsqu'il voit que je l'ai trouvé, il me fait un clin d'oeil et la seconde d'après je reçois un nouveau message.

– « bouge pas, je finis en deuspi et j'arrive ».

Je réponds positivement et me pose contre un muret en l'attendant. Il finit rapidement et je le vois arriver vers moi, je sens mon cœur battre. En sah je suis trop contente de le voir, et je crois bien que ça se voit de l'extérieur puisque je ne retiens pas du tout le sourire qui se forme sur mes lèvres.

— la meuf des blanches à Barbusse, il dit.

— mdr, le mec des résidences à Barbusse.

Il rigole et me serre la main. Je reste assise sur le muret tandis que lui est debout devant moi.

— t'es une ouf toi, j'suis un enfant de cette cité moi

— tu traînes toujours ici ? je demande

— toujours, il répond. Toi aussi maintenant, après avoir squatté notre lycée tu passes au quartier ?

— jamais, FC cité blanche jusqu'à ma mort moi

Après la nuit vient l'aubeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant