Chapitre 16

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Chapitre 16

La reprise après les vacances de Noël fut difficile. Elena et Abby avaient organisé une fête pour la nouvelle année, qui avait eu lieu seulement deux jours avant le retour en cours. Nous avions tous bien fêté la fin d'une année et l'arrivée de la nouvelle et autant dire que la classe fut très silencieuse pendant la semaine qui suivit. Cette soirée avait été l'occasion pour moi de me rapprocher de mes amies dont je m'étais un peu éloigné ces derniers temps. En effet, après la soirée de mon anniversaire, j'avais passé pratiquement tout le reste des vacances avec Grégory.

Après la rencontre avec ses parents, nous ne nous étions plus quittés, alternant les jours chez lui et chez moi. Néanmoins, les choses étaient devenues étranges depuis la reprise. Sa façon de se comporter avait changé. Ça n'avait pas été un changement brutal mais plutôt quelque chose de progressif. Nous passions beaucoup moins de temps ensemble et à vrai dire, les seules fois où nous le faisions étaient pour que je l'aide avec ses devoirs de langues. Il avait aussi dévoilé un autre aspect de lui, un Grégory qui s'en prenait à moi lorsqu'il était avec les autres membres de l'élite. Ce n'étaient pas des attaques physiques, c'était plutôt des moqueries lorsqu'il passait près de moi ou des remarques qu'il faisait durant les cours. Ce Grégory semblait disparaître lorsque nous n'étions que tous les deux ou plutôt, lorsqu'il avait besoin de moi. J'avais voulu lui parler plusieurs fois mais les moments où nous étions seuls étaient de plus en plus rares...

Lorsque le cours de management se termina enfin, nous sortîmes dans la nuit fraîche de l'hiver. A 17h40, la nuit était déjà sombre et tous les élèves tentaient de trouver leur bus. Le reste du groupe avait fini depuis deux heures et devaient déjà être bien au chaud devant une tasse de chocolat fumant.

—Tu veux que je te dépose chez toi? Demanda Lucie à Clara.

—Non merci, mes parents sont là. A demain!

—Je crois que l'hiver peut tuer des gens, juste par manque de lumière. Dit Lucie alors que nous allions au parking.

—Tu oublie le froid.

Elle me jeta un regard noir et se mit à parler d'une voix faussement effrayante.

—On ne peut pas l'oublier, surtout quand il fait -5 degrés depuis une semaine!

—Tu fais très peur, on dirait une veuve noire!

Elle rit, redevenant elle-même.

—Tu veux passer chez moi? Me proposa-t-elle.

—Chez toi?

—A mon appartement.

—Je vais acheter quelque chose à grignoter et je te rejoins?

—A tout de suite.

Montant dans ma voiture, je pris la route de l'épicerie Chez Valéry où j'emportais deux parts de pizza.

Lucie avait pris son appartement au début de l'été et je n'y étais pas retourné depuis des mois. Au début, Caroline avait trouvé que cette idée d'appartement était trop prématurée et que Lucie aurait mieux fait de rester encore quelques années chez ses parents. Après mure réflexion, je pense que cet appartement n'était pas une mauvaise idée car Lucie avait toujours été plus mature que nous et elle avait besoin de cette liberté.

Elle vint m'ouvrir toute essoufflée.

—Je ne me rappelais pas que ton appartement était aussi grand. Plaisantais-je en entrant.

—J'ai essayé de ranger un peu avant que tu arrives. Se justifia-t-elle.

—Pas la peine, tu sais comment c'est chez moi.

—On mange?

—A l'heure des vieux? Demandais-je en m'asseyant à la table face à la fenêtre.

Elle regarda l'heure sur son portable.

—Ça fait bien 3h qu'on n’a pas mangé!

Je me mis à rire et ouvrit les deux boites de pizza.

Nous mangeâmes silencieusement, regardant par la grande baie vitrée les lumières de la ville du dehors.

—Je n'avais jamais remarqué que tu avais une telle vue. Chuchotais-je.

Au sixième étage de l'immeuble, nous pouvions voir les lampadaires des rues, semblables à de grosses étoiles et au loin, les montagnes aux neiges éternelles étaient parsemées de petits points brillants qui appartenaient aux petits villages.

—C'est encore plus beau quand le soleil se lève. Chuchota Lucie à son tour. Tu viendras voir ça au printemps.

—J'adorerais.

La sonnerie de mon portable me  sorti de cette contemplation.

—Allo ?

—C’est moi.

Grégory. Je me levai et m’éloignai de Lucie.

—On peu se voir ? demanda-t-il d’une voix étrange.

—D’accord. J’arrive dans… je regardai la pendule du studio. Dans 15 minutes. Dis-je en raccrochant, avant de retourner près de mon amie.

—Tu t’en vas déjà.

—Euh oui, désolée.

—Attend. Tu es sûre que ça va ?

Je m’arrêtai.

—Oui, pourquoi ?

—Tu as l’air ailleurs ces derniers temps, comme si quelque chose te préoccupait.

—Ce n’est rien de plus que d’habitude, ça va.

Elle me scruta un instant puis sembla convaincue.

—A demain ! dis-je en sortant.

Je commençai à connaitre par cœur le chemin pour aller chez Grégory, car je l’avais emprunté de nombreuses fois durant les vacances. Une nouvelle fois, la sonnerie de mon portable retentie et je vis le nom de Grégory sur le cadran.

—J’arrive. Répondis-je.

—Non c’est bon. Ça s’est arrangé. On se voit demain ! Bonne soirée.

Les tonalités raisonnèrent à mon oreille et je restai là, le téléphone dans la main, bouche bée avant de le jeter sur le siège passager, au feu rouge. Moi qui pensai que quelque chose s’était passé avec Barbie et qu’il n’était pas bien ! Et en plus je lâchais tout juste pour aller le retrouver, qu’est-ce que je pouvais être stupide ! Je donnais une grande tape sur le volant et me mis à hurler. Mais qu’est-ce qui n’allait pas chez moi ?! Pourquoi continuer dans ce désastre ? Arrêtant d’hurler, je détournai lentement les yeux vers la vitre et vis l’homme dans la voiture d’à côté qui m’observait, l’air inquiet. Je me retournai immédiatement en fixant la route, comme si cela pouvait m’aider à disparaitre. Heureusement, le feu passa au vert et je redémarrai. En retournant chez moi, je me mis à rire seule dans ma voiture et c’est à ce moment-là que je me suspectai de devenir folle.

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