Chapitre 17 - L'ennui -

115 13 0
                                    

Dire que le lendemain matin je suis crevée est un euphémisme. J'ai l'impression d'avoir dormi sans pour autant m'être reposée une seule seconde. Mais la bonne nouvelle est que cette nuit, aucun cauchemar n'est venu m'embêter. Non. Je n'ai fait que rêver d'un mystérieux homme aux cheveux noirs et au corps de rêve...

En allant me coucher, j'ai beaucoup réfléchis à toute cette journée qui s'est montrée riche en émotions et je peux maintenant dire avec certitude qu'il y a un gros problème. OK, ça fait quelques jours que Devon me taquine (enfin, seulement quand il décide d'arrêter de faire la gueule trente secondes), mais ce n'est que depuis hier qu'il ose réellement m'approcher. Avant ça, c'était toujours moi qui finissais par aller vers lui inconsciemment. Comme par exemple la fois où je suis descendue après mon cauchemar et qu'il m'a taquiné sur ce mauvais rêve. Ce jour-là, il n'avait pris les devants avec moi que pour me demander de l'emmener à l'endroit où il avait enterré ses victimes, mais il ne m'avait pas approché. Le soir-même, il ne m'a pas demandé de le rejoindre près du feu de camp pour raconter des anecdotes et manger des marshmallow grillés. Non, j'y étais allée de mon plein gré dès le moment où j'avais compris qu'il n'était plus dans la maison. J'en viens donc à la conclusion que si nos rapports ont changé, c'est pour la simple et bonne raison que je lui ai envoyé des signes qu'il a mal interprété. Si j'allais vers lui, c'était pour la simple et bonne raison que je me sentais seule et qu'il est la seule personne avec qui je peux communiquer, et non pas parce que j'avais envie de m'amuser et lui faire du rentre-dedans.

Il a donc certainement dû mal interpréter mes signaux et s'est dit que je cherchais à le draguer. Sauf que jamais je ne ferais ce genre de choses (bon, je l'ai quand même un peu fais la veille, mais je n'avais pas réfléchi aux conséquences de mes actions et disons plutôt que j'étais en train de jouer à un jeu qui m'a dépassé), surtout sachant qu'il reste mon bourreau. Je sais que je ne cesse de me répéter sur le fait qu'il est l'acteur principal de mon malheur, mais que voulez-vous que je dise d'autres ? C'est de sa faute si je suis là et c'est la raison pour laquelle je dois tout de suite faire cesser ce jeu. Ok ça m'a diverti, mais ça s'arrête là et c'est bien mieux comme ça. Devon restera Devon et je ne pourrai rien y changer, et puis de toute façon, d'ici quelques jours, il disparaîtra de ma vie à tout jamais et je serai libérée de sa présence.

D'ailleurs, je n'ai toujours pas réfléchi à ce que j'allais faire une fois de retour chez moi. Outre mon hésitation sur le fait d'arrêter mes études, je n'ai aucune idée de si je vais dénoncer celui qui m'a enlevé ou non. Parce que parler à la police du psychopathe reviendrait à mettre Devon dans la merde et une partie de moi me dit que ce n'est pas ce que je veux. Certes, ce qu'il m'a fait à moi et aux autres victimes est atroce, mais aujourd'hui, il n'est plus ce même homme. Il a tout oublié et a retrouvé son humanité alors ça serait injuste pour lui qu'on le punisse pour des actes qu'il ne se souvient pas avoir commis. Mais malgré tout, une autre partie de moi me dit que ce n'est pas à moi de décider et que c'est à la justice de le juger.

Quoiqu'il en soit, je sors de mon lit pas du tout excitée de descendre pour retrouver Devon. J'avoue ne plus savoir comment agir avec lui, donc je vais faire mon possible pour le fuir et au pire, échanger des futilités avec lui sans pour autant me retrouver coincée entre son corps et un mur. J'en ai assez de ce genre de situation. Mais malgré la fatigue et mon ennui, je suis heureuse aujourd'hui puisque dans deux jours, c'est le grand départ. Je me suis déjà fait dans ma tête un planning de ce que je ferai les prochaines semaines afin de pouvoir me sentir libre à nouveau. Ce planning se résume à beaucoup de sorties pour éviter de laisser le temps à mon cerveau de prendre en compte ce qu'il m'est arrivé. Je pense qu'une partie de moi se voile toujours la face sur ce que j'ai subi et que c'est pour cette raison que le traumatisme n'est pas aussi puissant que j'aurai imaginé.

Pile ou FaceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant