Pile ou Face

Chapitre 49 - Une fois l'égoïsme disparu, il ne reste que la souffrance -

DEVON

Cette nuit, je suis incapable de dormir, c'est au-dessus de mes forces. Après tout ce qu'il s'est passé dernièrement, mon esprit est bien trop en surchauffe pour me laisser le moindre répit. Tout semble tourner en boucle dans ma tête sans vouloir cesser de me torturer.

J'ai conscience que cet enfer qui s'est abattu sur nous n'est que le début et que la suite sera beaucoup plus violente et anéantissante. C'est pour cette raison que je ne peux pas sagement rester ici, dans ce lit en tenant mon petit bout de femme dans mes bras. Il faut que j'agisse parce que je refuse de l'exposer au danger une nouvelle fois. C'est de ma faute si elle s'est retrouvée ici et c'est aussi de ma faute si cette merde lui est tombée dessus. Aujourd'hui, l'amour ne peut se montrer plus fort que tout parce que l'amour est bien trop dangereux. En devenant importante pour moi, Kayla s'est collée une cible dans le dos et je refuse que qui que ce soit puisse s'en prendre à elle à nouveau. Mais qu'est-ce que je peux faire ? Cette fois-ci, je crois bien être incapable de trouver une fin heureuse pour nous.

J'avoue avoir déjà réfléchi à un plan depuis quelques jours. À vrai dire, je ne parviens pas à me retirer ça de la tête, mais je ne pensais pas le mettre en place. À vrai dire, je n'y tenais pas. Sauf que je dois faire face à la réalité, je n'ai pas le choix. Kayla a vécu un enfer à cause de moi et si ce salop de Jonas parvient à lui remettre la main dessus, il la brisera, la torturera et ne fera d'elle que l'ombre d'elle-même (même si je pense qu'on n'est déjà pas loin de ça). Je refuse que ce genre de chose lui arrive et c'est pour cette raison que je dois faire ce sacrifice. Ça vaut mieux pour tout le monde puisque non seulement, Jonas ne me trouvera plus de point faible et donc ne pourra plus m'atteindre et Kayla ne subira pas la torture éternelle dans le but de me faire souffrir. C'est la meilleure solution... La plus triste malheureusement, mais la meilleure solution.

Avec douceur, je dépose mes lèvres sur son front et sors du lit en essayant de ne pas la réveiller. Tandis que je quitte la chambre pour rejoindre la cuisine, j'essaie de repousser la honte qui s'empare de moi. La honte de l'horreur que je m'apprête à commettre. Je me déteste tellement pour ce que je vais lui faire, mais je préfère ça que de la voir morte. Je pense qu'avec du temps et du recul, elle finira par comprendre que tout ce que je voulais, c'était son bien.

Après avoir tué Soan, j'ai eu la bonne idée de le fouiller et de prendre son téléphone qui se trouvait dans sa poche avant de sortir de l'entrepôt. Je savais que son frère était toujours dans les parages et ne renoncerait à sa vengeance sous aucun prétexte. J'ai donc pensé nécessaire de m'emparer du téléphone pour trouver des indices sur l'endroit où il pourrait se cacher (parce que je suis presque certain qu'ils avaient un autre endroit que l'entrepôt désaffecté pour crécher), mais aujourd'hui, si je prends ce portable, c'est pour une toute autre raison. Je m'apprête à mettre un point final à cette histoire.

Si un jour on m'avait dit que de mon plein gré j'appellerais la police, j'aurai rigolé, mais tandis que la sonnerie résonne dans mon oreille, je sais que je suis en train de faire la meilleure chose. Kayla va m'en vouloir je le sais, mais si je le fais, c'est parce que j'en ai marre de me montrer égoïste à vouloir la garder avec moi alors que je sais pertinemment qu'elle sera plus en sécurité loin de ma personne.

Lorsque ça décroche, on m'annonce que je suis en train de parler à la police et je ne perds pas plus de temps pour dire ce que j'ai à dire.

- Je suis Devon Laydon et j'ai tué trois personnes. Je ne connais pas leurs prénoms mais je les ai tuées de sang-froid. Je suis recherché dans toute la France et je suis prêt à me rendre.

J'entends la personne à l'autre bout du fil s'activer, certainement pour tenter de tracer l'appel ou pour prévenir quelqu'un de venir sur les lieux. Elle n'a pas à s'en faire, je ne compte pas raccrocher de sitôt ou en tout cas, pas avant qu'elle puisse me localiser. Pendant les quelques secondes de répits que son silence me laisse, je prends une grande respiration et tente de calmer les battements frénétiques de mon coeur qui se brise une seconde fois mais cette fois-ci dans une lenteur extrême.