Chapitre 11 - Et ça recommence... -

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J'avoue ne pas vraiment savoir ce que je suis en train de faire. Non, en fait, je ne sais pas du tout ce que je fais. Je jette dans la casserole, l'esprit ailleurs, tout ce qui me tombe sous la main et transforme le tout en une sorte de ragoût nullement appétissant. Je n'ai jamais vraiment été une bonne cuisinière et sans mentir, je ne suis pas sûre que mon plat sera très appétissant, mais que voulez-vous, je ne suis pas ici pour participer à TopChef mais pour reprendre des forces (même si ça serait sympa de manger quelque chose de bon). 

Pendant que les aliments mijotent dans la casserole que j'ai dû nettoyer à plusieurs reprises tant la crasse était incrustée, mon regard ne cesse de dévisager le flingue que j'avais posé un peu plus tôt sur le rebord du plan de travail. Je dois l'avouer, je ne saurais dire si je me sens rassurée de l'avoir près de moi ou s'il m'effraie. Après tout, ça reste une arme... Une arme qui peut tuer quelqu'un et qui a déjà pu enlever la vie d'un individu. Le psychopathe est loin d'être un saint et je ne pense pas qu'il est du genre à garder une arme chez lui juste au cas où un jour un voleur viendrait piller sa maison. 

Pendant tout le temps où mes yeux refusent de se détacher du métal de l'objet, je me demande à quoi il pourrait bien me servir. Évidemment, je ne compte pas aller le reposer là où je l'ai trouvé puisque ça serait l'idée la plus ridicule qui me passerait par la tête. Je dois la garder sur moi histoire de me défendre. Après tout, j'ai bien vu de quoi était capable le psychopathe, et même si quelque chose a changé, je suis certaine qu'il saurait reprendre la main sur moi en un rien de temps. Avoir une arme avec moi est le meilleur moyen de me protéger, mais aussi de pouvoir obtenir ce que je veux de lui. Malgré tout, serais-je capable de l'utiliser contre mon ravisseur ? Peut-être que je devrais, mais je m'en sens incapable. Jamais je ne pourrai faire de mal volontairement à une personne, même si cette dernière n'a pas hésité un seul instant avant de m'en faire. Je ne suis pas comme lui et je sais que je regretterais à jamais si j'en venais à devoir lui faire du mal. 

Cet homme m'a enlevé, torturé, brisé et manipulé, mais je ne serais jamais capable de lui tirer dessus pour avoir des informations. Je pourrais peut-être juste le menacer avec, mais je suis persuadée que je ne serais pas crédible. Mais avant toute chose, je dois être sûre de quelque chose. Je me rapproche du plan de travail comme si le flingue était sur le point d'exploser et l'attrape, les mains couvertes de sauces. Mon cousin étant chasseur, il m'a déjà emmené à plusieurs reprises chasser avec lui et je suis capable de, non seulement, retirer la sécurité, mais en plus d'être capable de voir s'il manque des balles. Il faut que je sois sûre que cette arme n'ait jamais servi, volontairement ou pas. Heureusement, après la manipulation, je peux lâcher un soupir de soulagement lorsque je remarque que le chargeur est complet et qu'il ne manque aucune balle. Tant mieux parce que je ne serais pas comment j'aurai réagi dans le cas contraire. J'ai toujours été le genre de fille pacifiste qui déteste la violence, alors porter sur moi une arme qui avait potentiellement tué quelqu'un d'autre me fait horreur.

Je finis par glisser l'arme dans la ceinture de mon pantalon, dans le bas de mon dos, puis, retourne voir où en est mon ragoût. Contre toute attente, l'odeur qui émane de la casserole n'a rien de désagréable et ça sent plutôt bon. J'ai donc espoir que ça ne soit pas trop dégueulasse puisque je dois reprendre des forces le plus vite possible. J'ai perdu bien trop de poids ces derniers jours et ça en devient inquiétant. 

Une fois le repas prêt, je me mets à manger dans le calme. Le silence règne dans la pièce et je me souviens des voix qui se trouvaient dans mon cauchemar, qui me hurlaient que j'avais perdu et que la partie était terminée. Je me souviens de la manière dont mon corps refusait de se battre. Il avait comme déclaré sa défaite et a laissé le psychopathe m'avoir. Ça me rappelle la manière dont mon corps m'avait lâché lorsque j'avais inhalé le chloroforme. C'est comme si mon propre corps m'avait trahi pour me livrer au diable. C'est d'une horreur sans nom. Peut-être que si je n'avais pas été ce soir-là en boîte de nuit, je ne l'aurais jamais rencontré et il n'aurait pas été tenté de s'en prendre à moi et me faire vivre ces horreurs. Et puis, est-ce possible qu'on se soit retrouvé dans le même lycée ? Je sais que je suis tête en l'air, mais pas au point de ne pas me souvenir de lui. On ne va pas se le cacher, un visage comme le sien ne s'oublie pas aussi facilement. Si je l'avais rencontré dans le passé, je ne l'aurais pas oublié. Si ?

Pile ou FaceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant