Chapitre 18

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| Lundi 17 Mai |


Ce week-end, les excès, le gala, Charles...

Ce matin, le réveil sonne bien trop tôt à mon goût alors qu'un rayonnant soleil m'accueille pour démarrer cette nouvelle semaine. Les rideaux de ma chambre ne font pas le poids et alors qu'il réchauffe la petite pièce, je roule sur le côté en espérant m'octroyer encore quelques minutes de sommeil.

Je trouve effectivement un peu de réconfort à pouvoir refermer les paupières, mais je n'avais pas anticipé que la première chose qui ferait ma journée serait les vapeurs du parfum de Charles. C'est presqu'instinctivement que j'inspire à pleins poumons son odeur qui s'est imprégnée de mon oreiller de second choix.

Piquée au vif depuis notre entrevue de samedi soir, je me résigne à laisser s'échapper son parfum quand je me balance sur le dos en râlant de mécontentement. Ma mémoire m'envoie des souvenirs brûlants de cette nuit-là et c'est avec une certaine douleur que je me résigne à accepter mon sort.

Mon désir pour Charles ne s'évapore pas comme d'habitude.

D'ailleurs, je commence à désespérer de réussir à attirer son attention puisque depuis son départ précipité, je n'ai toujours pas avoir reçu ne serait-ce qu'un message de sa part. Mon téléphone en main, je me ressaisis en me disant que puisque c'est comme ça, c'est moi qui prendrais les devants.

Girl power 2.0.

Je débute des dizaines d'ébauches de messages sans jamais trouver la bonne tournure et ce n'est qu'après une bonne demi-heure que j'ai fini par lui envoyer un simple et très banal, « je pense à toi ». De mon point de vue, envoyer un « je pense à toi » de bon matin et après une longue nuit est une version allégée et sans sucre de « j'ai une putain d'envie de toi ».

Faut-il encore qu'il sache lire entre mes lignes.

Il m'aura fallu une sacrée dose de courage pour mettre mon égo de côté. S'abaisser à être le premier à écrire c'est comme avouer à demi-mot qu'on est tellement obsédé par l'autre que l'on est prêt à déposer les armes. Mon portable balancé au beau milieu de mes draps, j'estime avoir fait ma part du marché, maintenant c'est à lui de faire le reste.

Je sursaute d'empressement lorsque je me rends compte qu'il est bien plus tard que je ne le pensais et que je m'affole à sauter sous la douche. Le regard rivé sur la veste de Charles qui git toujours sur le sol de ma salle d'eau, je me concentre sur la somptueuse broderie rouge et jaune à l'effigie de Ferrari. Étrangement, je n'ai aucune envie de rendre sa veste à Charles. Elle est devenue à sa façon ma madeleine de Proust et je compte bien la garder comme trésor.

Alors que je sors de ma douche, je laisse l'air chaud faire son œuvre et m'essuyer tandis que les moineaux chantent leurs joies de vivre à travers mes fenêtres grandes ouvertes. Plantée devant ma commode, je me remercie d'avoir été prévoyante quand j'enfile pile la tenue qu'il me fallait. Un tailleur bleu marine, en lin et parfait pour affronter les journées de forte chaleur.

Prête bien après l'heure, mon retard ne m'empêche pas de prendre le temps de siroter mon café en m'installant au soleil, sur le rebord de la fenêtre du salon. Les yeux fermés, je peux sentir le léger mistral qui refroidi le fond de l'air malgré que le soleil soit déjà très fort pour l'heure et pour la saison.

À certains moments, j'apprécie cette solitude d'être avec moi-même. Mes amies sont rentrées à Lyon hier soir, je n'ai que quelques jours pour recharger mes batteries avant que mes parents ne débarquent et que le week-end prochain ne m'accapare.

Finalement décidée à quitter ma petite garçonnière, je ne me presse pas le moins du monde lorsque je descends les ruelles, perchée sur mes talons. Pointée en bas de l'immeuble de mon pseudo employeur, j'ai un mauvais pressentiment quand je fais claquer nerveusement l'un de mes talons sur le bitume.

Douze étages plus tard, je tente de me faire la plus petite possible en espérant passer inaperçue. Mes espoirs sont réduits à néant quand une voix stridente m'arrête net dans mon délire.


– Madame Barrière ! m'interpelle la secrétaire personnelle du fils.

– Madame Cinero, réponds-je poliment.

– Monsieur Spencer souhaite vous voir dans son bureau, m'annonce-t-elle sèchement.


La mâchoire serrée, j'acquiesce et je pivote sur mes talons sans piper un mot.

Dire que je suis surprise d'être convoquée de bon matin est un euphémisme. Plantée devant la porte d'Enzo, il me fait signe d'entrer tandis que j'essuie nerveusement mes mains moites sur mon pantalon qui s'oppose formellement à absorber mon stress.

Don't Look Down IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant