Don't Look Down II

Chapitre 29

| Vendredi 21 Mai |

– Par où commencer ? se demande Enzo à lui-même.

Un petit moment pensif, nos regards se perdent sur la route en contrebas où la séance de qualifications débute tout juste. Les formules 1 ronronnent sur la route en contrebas du balcon et je prends une lampée de café pour calmer le feu de la vodka qui coule dans mes veines.

– Ma mère et mes deux oncles sont les actionnaires majoritaires de Ferrari, m'annonce-t-il sans douceur alors que je me sens étourdie.

Je ne sais pas si je viens de me prendre une claque, un coup de massue, un coup de fouet ou les trois en même temps. Pour un début, c'en est un et j'ai comme la sensation que cette nouvelle vérité va me permettre de lever le voile sur toute cette sombre histoire.

Quoi qu'il en soit, il ne me faut pas longtemps pour comprendre que les raisons qui retiennent Charles dans les filets de Lola sont sa carrière de pilote, en tout cas, c'est ce que j'en déduis.

– Que veux-tu savoir ?

– Je ne comprend pas pourquoi tu ne travailles pas avec ta mère, puisque Ferrari appartient à ta famille, demandé-je après quelques secondes d'hésitation.

Les lèvres d'Enzo se crispent lorsqu'il pose son autre main sur le goulot de la bouteille de vodka et qu'il entreprend de remplir les petits verres disposés sur notre table.

– Ma mère est devenue la nouvelle dirigeante de Ferrari après le décès de mon grand-père et mon père n'a pas supporté que sa femme obtienne un poste plus important que lui... se résigne-t-il. Suite à ça, ils ont divorcé, tout a commencé à dérailler et la guerre entre eux a débuté.

Je grimace alors qu'un lourd silence s'abat sur notre table.

Je suis aussi triste de savoir qu'Enzo a dû vivre avec une famille qui se déchirait que de savoir que son père est d'un incroyable sexisme.

– Des avocats ont demandé à Lola et moi de prendre parti pour un de nos parents et comme nous ne voulions pas choisir plus un camp que l'autre, nous avons décidé d'un commun accord qu'elle irait chez notre mère et que j'irais chez notre père.

Je regard perdu sur le liquide transparent qui se balance dans le mini verre, il chuchote quelques mots incompréhensibles en faisant tinter son verre contre le mien et en buvant l'intégralité de son contenu.

– À partir du moment où ma mère et Lola ont mis un pied dans ce monde-là, tout a changé. Elles ont changées, m'apprend-il. Plus rien n'était pas assez bien et j'ai compris que je ne voulais pas appartenir à ce monde-là, me dit-il en désignant le circuit, les voitures de course et l'hôtel derrière nous.

– Pourtant, ça ne t'empêche pas d'en profiter, dis-je en pressant ma paume contre la sienne.

Même si toutes les vérités ne sont pas toutes bonnes à dire, celle-ci est trop flagrante pour ne pas être relevée et surtout lorsque l'on est assis aux premières loges du Grand Prix le plus coté du monde.

Il hoche de la tête en sachant qu'il jouit d'une situation privilégiée.

– Et après ça, tu as choisi de travailler avec ton père, deviné-je.