Je regagne la cuisine dans une semi-conscience. L'ombre m'apaise. Je dépose mes récoltes sur la grande table avant d'aller me servir un verre d'eau. Sa fraîcheur vient glacer mon cerveau. Je ferme les yeux.
Suzanne me parle, mais je n'entends rien. Mes oreilles bourdonnent.
En prenant une profonde inspiration, j'ouvre enfin les yeux. Je suis tombée à genoux sur le sol, le front reposant contre son épaule.
J'entends un cliquètement de béquilles.
— Luna ?
— Ne t'approche pas, il y a du verre partout. Ce n'est rien, juste un petit coup de chaud. Je vais l'emmener au frais. Tu peux appeler Achille pour qu'il vienne nettoyer ?
Les béquilles s'éloignent.
— Luna, tu peux te lever ?
— Oui.
— Achille... ! hurle ma sœur depuis la terrasse. Luna s'est évanouie et elle a cassé un verre !
Suzanne me soulève par un bras. Je m'accroche au comptoir.
— Regarde où tu marches. On va dans le bureau. Maintenant, à droite.
Une porte m'empêche d'avancer. Même groggy, mon cerveau sait que de l'autre côté doit probablement se trouver la chambre des Chemtov ou leur salle de bain.
Suzanne l'ouvre sur un escalier étroit.
— Hum...
— Attention aux marches. Elles sont un peu raides.
Le chalet est encore plus grand que ce que je croyais.
Nous descendons. J'émerge dans un sous-sol austère, fait de béton brut et illuminé par quelques ampoules à filaments, tenues par de fins fils électriques filant sur le plafond gris. Un air frais circule entre des installations botaniques, emportant jusqu'à moi un mélange subtil, et surprenant, de parfums floraux et d'humidité.
Suzanne me fait asseoir sur une chaise placée contre un mur. Elle repousse quelques bouquets d'aromates suspendus la tête à l'envers pour accéder à un meuble. Elle s'empare d'une tasse en fer-blanc qu'elle va remplir à un robinet un peu plus loin.
Mon regard se porte vers le reste de la pièce et j'aperçois une table, constituée de planches horizontales, couchées sur de simples tréteaux, sur laquelle des fleurs de camomilles sèchent sous un voile. Sur l'un des murs, d'autres planches sont cette fois-ci posées sur des équerres en métal pour créer des étagères. Elles sont couvertes de plantes en pots, de tailles variées et couvées par une ribambelle de lampes de culture.
Ma tutrice revient vers moi, tendant la tasse pour que je la prenne. Je porte le récipient froid à mes lèvres et grimace au contact de la texture désagréable.
— Tu as la nausée ?
— Non, réponds-je dans un frisson.
— Encore des vertiges ?
Je remue la tête négativement.
— Bois par petites gorgées.
À regret, je m'abreuve à nouveau au métal amer.
Suzanne tire un tabouret et s'installe à côté de moi. Le dos droit, les mains sur les cuisses, elle observe son antre.
Du menton, elle pointe une commode à la peinture écaillée, où seuls deux morceaux d'étoffe font office de portes.
— C'est ici que je stocke les feuilles et les fleurs séchées pour les infusions.
À côté, un réfrigérateur aux allures de cave à vin renferme des petits pots à cosmétiques.
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Enfants des Astres-Livre I : Nomen Omen
WerewolfAprès l'incendie criminel qui coûte la vie à leur tutrice, Luna et sa jumelle Soleïane doivent faire face à un traumatisme aux étranges conséquences. A l'hôpital, Luna accumule les songes qui hantent son sommeil ; Soleïane, elle, ne semble pas voulo...