Les séances s'enchaînent au rythme de ce nouveau protocole.
Il n'utilise que la cravache ou le martinet.
Ayant connu la douleur des côtes cassées par son bâton, elle s'en satisfait.
Comme si elle avait le choix.
Il fouette sa peau nue, les zones les plus fragiles et sensibles, les zones les plus intimes.
Il la cingle et la fait gémir et pleurer, puis lui applique ses caresses obscènes avec l'outil même qui la blesse.
Pourtant, chaque fois que les coups cessent, elle accueille avec soulagement le contact devenu léger de la claquette. Elle est presque reconnaissante du trajet langoureux des franges de cuir sur sa peau.
Elle en a honte. Mais lorsque le seul référentiel émotionnel dont on dispose est fait de douleur, d'horreur et de désespoir, l'esprit se raccroche au moindre élément.
L'absence de douleur devient comme un baume, une respiration, une trêve.
En dehors de la chambre des tortures, le rituel reste le même. Le soigneur passe simplement moins de temps à la remettre en état. Il n'a plus à utiliser la magie, des cataplasmes et des infusions suffisent. Du fil et une aiguille, à l'occasion.
Son gardien continue de surveiller le nettoyage de sa cage et ses ablutions, puis la nourrit de l'éternelle bouillie d'avoine.
Il recoud également sa tunique quand c'est nécessaire.
Elle repense avec perplexité au jour où elle a entendu sa voix, pour la première fois. Le jour où elle a vu le visage du diable, le jour où elle aurait dû mourir.
Sans le boiteux, ses souffrances seraient terminées, elle pourrirait au fond de leurs infâmes sables mouvants, morte, libérée.
Elle reste souvent éveillée lors des périodes de repos, roulée en boule dans sa cage.
Elle pense à son bourreau, son changement de tactique l'angoisse.
Son seuil de tolérance à la douleur a déjà diminué.
Elle appréhende le moment où la torture, la vraie, celle qui brise des os et ouvre des plaies mortelles, reprendra.
Car elle sait qu'il y reviendra, tôt ou tard.
Alors le moment venu, cette fois, elle ne se relèvera pas. Ils pourront la noyer sous les seaux d'eau glacée, elle restera au sol.
Elle en a fini.
Quelque chose se tord en elle.
Elle ne cède pas, ne se soumet pas.
Elle trouve juste une sortie de secours.
Elle espère ne décevoir personne, à part elle-même.
VOUS LISEZ
Le Bastion
FantasyUn lieu terrible, une prison sinistre : on y brise les corps et les âmes. Un système totalitaire qui fonde son pouvoir sur la magie. Une prisonnière qui ne cède pas. Un face-à-face dont l'issue est toute tracée.... Attention : cette fiction comport...