Chapitre XIV: Vices.

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too deep to turn back.

Malgré ma fatigue et mon endormissement omniprésent, mon cœur battait continuellement la chamade, et cela depuis hier au soir. Tout s'était passé à la fois à une vitesse ahurissante, mais également à une lenteur insoutenable. Je n'avais pas fermé l'œil de la nuit, ni de la journée d'ailleurs, et chacune de mes respirations m'étaient douloureusement oppressantes. Mon estomac s'était tordu en un nœud solide, je m'étais par conséquent recroquevillée dans un coin de ma cellule, pensant surement mourir lentement d'angoisse. Jusqu'à présent, ce n'était pas encore arrivé malgré mes nerfs qui commençaient peu à peu à lâcher. 

De surcroit, le paysage dans lequel j'avais été astreinte n'aidait en rien, bien au contraire.

Il faisait froid. Extrêmement froid. 

L'air humide m'empêchait de sécher avec l'usage de mon feu, et ce fut ce qui me fatigua le plus, retenant ma température corporelle à un degré acceptable. Ce travail mental et physique était d'ailleurs mis à rude épreuve face aux bruits constants à quelques mètres de moi. En effet, je n'étais pas seule: sans compter les gardes, un autre prisonnier séjournait dans la geôle voisine à la mienne. C'était un très vieil homme plutôt effrayant. Sa carrure chétive bougeait sans cesse dans le petit espace qui lui était désigné et il ne cessait d'être bruyant avec le moindre objet à sa portée. Cuillère , gobelet, ou encore petit bout de pain rassis... Actuellement il utilisait une pierre trouvée sur le sol de sa cellule pour taper sans une once de rythme contre les barreaux étroits. Vu son attitude atypique et ses nombreux tics, il ne semblait pas sain mentalement. Ce constat m'attrista, il n'avait rien à faire ici, d'autant plus qu'il ne se nourrissait pas correctement. 

Tandis que mes mains venaient épouser la forme de mes oreilles dans le but de caresser au moins un instant minime le silence et l'apaisement, des paroles vinrent encore une fois perturber mon esprit. 

"Excuse moi, on est ici pour encore quelques heures, tu penses pas qu'on devrait faire connaissance? Je te trouve très mignonne...Glissa une voix langoureuse à l'autre bout des sous-terrains du QG.

 C'était un des deux gardes présents, il s'adressait à sa coéquipière à sa droite. Surprise, je me questionnai sur l'effectif de surveillance: pourquoi n'étaient-ils que deux alors que pour m'arrêter sur la plaine ils étaient une cinquantaine? Je chassai rapidement ces curieuses interrogations pour me concentrer sur le dialogue du duo. La femme embarrassée semblait être une gardienne à contrario de l'homme qui portait fièrement l'emblème, que j'avais reconnu à peine avais-je posé mes yeux sur lui, du Royaume Soleil. J'en vins à la conclusion qu'ils avaient donc appelé l'ensemble des Puissances de l'Alliance sur place pour débattre sur mon cas. Je n'étais finalement plus le problème de la Garde d'Eel mais bel et bien l'affaire d'Eldarya tout entier. 

-Non merci, nous sommes sur notre lieu de travail, je vous prie de faire preuve d'un minimum de sérieux et de respect aux taches que nous ont attitrées nos supérieurs. La jeune fille aux cheveux roses soupira lourdement et reprit contenance en se redressant, droite comme un piquet. 

D'un regard fatigué et d'une oreille discrète, je suivais les moindres faits et gestes de la scène face à moi. La bourrasque que l'homme venait de se prendre aurait pu me faire mourir de rire si ce monde n'était pas prêt à me déclarer la guerre personnellement. C'est vrai que ce fut un vrai refus digne de ce nom. Je reposai ma tête entre mes genoux repliés, pensant que l'interaction s'arrêterait là, mais ce ne fut pas le cas. 

-Arrête, si c'est juste le lieu qui te dérange, moi je trouve ça plutôt grisant. Détends-toi, personne ne nous verra."

Un frisson me parcourut, je me surpris à espérer n'être que dans un rêve. Il ne pensait quand même pas faire leurs affaires devant nous, si? Mes yeux écarquillés se tournèrent rapidement vers les principaux concernés. Mes poils s'hérissèrent à la vue de la gardienne stoïque et surement sous le choc et l'individu qui se collait de plus en plus à mesure que le temps passait. Ses mains baladeuses, son sourire narquois et ses chuchotements me firent vriller. Rouge de colère, l'adrénaline me remit sur mes pieds d'une traite et j'attrapai avec ardeur les barreaux de ma cellule. 

𝑨𝒓𝒆𝒔. [Eldarya]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant