C'est cette ombre qu'elle poursuit, sans jamais pouvoir la rattraper. Elle court, de plus en plus vite, essoufflée, à bout de force. Autour d'elle résonne ce bruit, ce moniteur qui ne cesse de battre la mesure d'un cœur. Et cette angoisse, grandissante, d'entendre ce son s'arrêter, ou plutôt, continuer sans pause. Rien ne la rapproche. Un vide infini la sépare de sa cible, de ce dos qu'elle reconnaît entre mille. Elle l'appelle, hurle son nom, le supplie de se tourner vers elle pour observer une dernière fois son visage, son sourire rayonnant. Ace. Le bruit s'accélère, les battements se font plus nombreux, trop nombreux. Hiyori stoppe sa course, pleure, tombe à genoux et se bouche les oreilles. Elle ne veut pas l'entendre, ce son qui signe la mort. Et pourtant il arrive. Glaçant. Terrifiant.
C'est un cri qui tire Law de sa léthargie. À ses côtés, la rouquine se tient assise, recroquevillée, la respiration saccadée. Peinant à se réveiller, le brun se frotte les yeux lentement avant de se redresser à son tour, sa main cachant un bâillement magistral.
" Qu'est-ce que t'as ? Ça va ?
Hiyori l'avait presque oublié. Lui, ses mèches en pagaille, ses boucles d'oreilles dorées et son odeur de tabac froid. Elle serre les dents, tente de ralentir son cœur qui semble vouloir sortir de sa poitrine et retient ses larmes. Ces cauchemars lui glacent le sang. Chaque fois. S'obligeant à se calmer, la jeune femme inspire lentement, comme absorbant ses angoisses instantanément.
- Un rêve bizarre, chuchote-t-elle en accompagnant son mensonge d'un rire peu naturel. Je vais boire un coup d'eau. "
L'étudiant lève un sourcil, peu convaincu, et observe la rousse s'extirper du lit, la mine défaite. En quelques secondes, elle quitte la pièce, le laissant seul dans cette chambre redevenue bien silencieuse. Il soupire, se retourne et se rendort. Dans le couloir, Hiyori peine à contrôler ses pleurs. La main devant sa bouche pour étouffer le son de ses sanglots, elle sent sa gorge se nouer. Elle n'y arrive pas. La douleur ne disparaît jamais. Elle se terre à l'hiver, s'efface au printemps, se tapit à l'été et resurgit à l'automne, toujours aussi vive, destructrice. Il lui manque. Et son absence semble si lourde à porter qu'elle pourrait s'effondrer à tout moment.
Ce n'est pas comme s'il s'attendait à trouver quelqu'un à ses côtés chaque matin. Mais son cerveau le sait : il s'est endormi dans un autre lit que le sien, dans des draps arborant une couleur de particulièrement mauvais goût, sur un oreiller à l'odeur boisée, un peu chlorée, bien loin de la sienne. Alors pourquoi se réveille-t-il seul aux aurores, étalé au centre du matelas ? Law baille à s'en décrocher la mâchoire. Dans des gestes lents, il s'extirpe du lit et enfile son jean consciencieusement plié sur la table de chevet. Sa main droite vient replacer ses mèches rebelles tandis que l'autre ouvre la porte menant au couloir. C'est là qu'il la voit. Assise par terre, dans un coin du mur, la tête contre une plainte et la bouche entrouverte, emportée par la fatigue. Le brun fronce les sourcils, se demandant bien pourquoi sa fausse petite-amie a décidé d'agir comme une étudiante ivre morte, sans avoir bu plus qu'une bière. Alors qu'il s'accroupit à sa hauteur, ses yeux sont attirés par le papier glacé d'une photo. Délicatement, il retire le cliché d'entre les doigts fins de la jeune femme. Il y croise trois larges sourires d'adolescents. La tignasse de la rouquine ne laisse aucun doute quant à son identité. Autour d'elle se tient deux hommes aux cheveux noirs de jais, l'un porte des tâches de rousseurs, l'autre une cicatrice sous l'œil gauche. Bras dessus, bras dessous, ils partagent ces mêmes fossettes dessinées au creux de leurs joues. Leurs yeux noirs ne trompent pas non plus : le même sang coule dans leurs veines. Finissant de contempler la photographie, Law se redresse et part la poser dans la chambre d'Hiyori, en évidence sur le lit. Des questions le taraudent, mais aucune n'aura de réponse aujourd'hui. Sans un bruit, il se résout à coucher la belle au bois dormant, passant ses bras sous son dos et ses jambes pour la soulever, non sans un soupir d'effort. La rousse couchée, la couette tire vers elle, l'étudiant se faufile hors de l'appartement, sa bouteille de rouge toujours pleine à la main.
" Alors, c'est officiel, elle fait battre ton Heart ? Pouffe Hiyori en donnant un coup de hanche à son colocataire devant la cafetière.
Réveillée depuis à peine une heure après une grasse matinée très appréciée, la rouquine s'est levée difficilement, son dos lui rappelant que s'endormir par terre n'était pas la meilleure idée de la soirée. À la vue de la photographie posée à ses côtés, un mince sourire s'est dessiné sur ses lèvres. Elle pourra se fendre d'un remerciement à Law, pourquoi pas. Une oreille discrète collée sur la porte, elle a entendu sans mal son meilleur ami dire tendrement au revoir à celle qui avait occupé son lit.
- Un jeu de mot avec mon nom, quelle originalité mademoiselle Trafalgar.
- Beurk, arrête.
- Il a pioncé avec toi ?
- Mais oui, ce grand taré. Pour montrer aux autres qu'il allait bien dans ma chambre, râle-t-elle en essayant d'imiter sa voix.
- Il a rien tenté ?
- Heureusement ! Il n'a même pas posé de questions alors que j'ai fait un cauchemar.
- Encore ? S'inquiète le jeune homme.
- T'inquiète, c'était rien, je me suis rendormie direct, ment t-elle ouvertement.
- C'est ça ouais...
- Je vais réveiller Marco, on brunch ?
- Bourgeoise va ! "
[J'espère que, malgré la courte taille du chapitre de cette semaine, vous avez aimé !]
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Ne me dis pas je t'aime [Law X OC]
FanfictionQuand l'homme le plus convoité de la faculté propose à Hiyori de devenir sa fausse petite-amie, elle pense à une blague. Mais Law est bel et bien sérieux. L'une est sauvage et colérique ; l'autre, dragueur et solitaire. Un duo que tout oppose, oblig...