Chapitre 20 : Ta chance saisie

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Law marque une pause. Comme s'il respirait pour la première fois depuis de longues minutes, il gonfle ses poumons. Son regard se perd au fond du couloir des chambres. Un instant, il a cru y être à nouveau. Au cœur de cette fumée, de cette soirée d'hystérie. Sur ce canapé, le jeune homme est redevenu un adolescent perdu, incapable de distinguer ses amis de ses ennemis. D'une main, il sert le plaid qui le recouvre jusqu'aux genoux et s'étend aux épaules d'Hiyori. Comme doué d'une conscience, son pied tapote le sol. Jamais il n'avait évoqué son histoire avec qui que ce soit. Ni un psychologue, ni un professeur, et encore moins une amie. Qui l'aurait écouté ? S'y replonger le libère autant que cela le ramène à cette réalité. Celle de l'argent souillé qui croupit au fond de ses tiroirs, d'un fil qui le relie et le reliera toujours à Doflamingo, et d'une épée aiguisée qui plane au-dessus de sa tête. Et maintenant de celle d'une rouquine. Il se sent égoïste. Peu fier de l'avoir emmenée dans un de ces sous-sols – pour fanfaronner ou lui faire plaisir, qu'importe – de la mêler à ce passé sombre. Et maintenant, de lui conter le tocard fini qu'il a été.

- Ça devenait trop dangereux, souffle-t-il, redressé, les épaules droites, se triturant les doigts dans tous les sens. Ça l'était depuis le début, mais là, je m'en suis rendu compte.

Les pièces du puzzle étaient faciles à assembler. Il lui aura fallu trois ans, une centaine de combats, un bienfaiteur et une descente de police pour comprendre que Doflamingo était loin de tenir le statut d'allié. Derrière son faux sourire se cachait un stratège. Ne pas se faire attraper, voilà le seul objectif qu'il ait jamais eu. Comment Law avait-il pu croire un seul instant que cet homme était un vrai génie du mal capable d'organiser des soirées clandestines sous le nez de tous ? Impossible. Doflamingo avait ses contacts et s'en servait. Lorsque les autorités traînaient un peu trop près de ses affaires, il laissait échapper une information. Le lieu du prochain combat arrivait par miracle sur le bureau d'un agent le soir où, par la même occasion, une tête importante du club se trouvait prête à se faire cueillir. Ce soir-là, Rossinante a encaissé. S'il n'avait pas été là, le garçon aurait pris, et ainsi de suite. La justice avait son bouc-émissaire ; Doflamingo avait la paix. De temps à autre, Law se surprend à penser à son sauveur. Ce blondinet de deux mètres qui le poussait chaque jour à traîner sa carcasse en cour. Il n'ose imaginer ce qu'il serait devenu sans lui. Mort d'un coma éthylique, alité pour cancer des poumons, tué dans une échauffourée au beau milieu de la nuit ou coincé derrière les barreaux. Loin de cet enfer pavé d'or, il a compris. Enfin. Et la reconnaissance éternelle qu'il voue à Rossinante ne cesse de grandir à mesure qu'il se souvient de lui. Désespéré de s'éloigner au plus vite de ce monde, Law n'a jamais su s'il était allé en prison, s'il y était toujours, ou s'il était simplement six pieds sous terre. Soupir.

- J'ai dit à Doffy que je partais, par message. Comme ça, du jour au lendemain. Que je voulais faire des études supérieures et, surtout, faire autre chose de ma vie qu'amener des gars à l'abattoir.

- Et il a accepté ? Questionne Hiyori, la tête posée sur le dossier, ses paupières lourdes descendant sur ses yeux.

Elle lutte contre le sommeil qui l'accable après cette journée sans fin. Le brun esquisse un sourire en la voyant si près de s'endormir.

- Il n'a surtout rien répondu, continue-t-il. Mais à partir de ce jour j'étais tranquille. Personne n'est venu me chercher, j'ai pu m'inscrire à l'université et partir à l'étranger. Maintenant je comprends pourquoi.

Il voit la rousse sombrer à ses côtés. Sa voix se perd dans un murmure.

- On n'arrête jamais vraiment de travailler pour lui. On meurt ou on fait une pause, jusqu'à ce qu'il vienne nous chercher...

Ne me dis pas je t'aime [Law X OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant