Ce n'est qu'au petit jour, qu'Hiyori s'est finalement endormie, pour deux heures de sommeil peu salvatrices. Evidemment, ce n'est pas cette nuit qu'elle allait fermer les yeux sereinement. Shachi lui avait pourtant proposé, la veille au soir, de rester avec elle. Regarder un film jusqu'à ce que le sommeil l'emporte ou discuter jusqu'à pas d'heure. Même Marco était rentré plus tôt pour qu'ils dînent tous ensemble, comme une famille modèle. Mais, sourire aux lèvres, elle leur avait assuré que tout irait bien. Son meilleur ami ne semblait pas en état de faire nuit blanche avec elle pour la réconforter, loin de là. Et pour cause : alors que la rouquine se lève difficilement et se traîne jusqu'au salon pour attraper son petit-déjeuner, l'intéressé ne s'y trouve pas.
" Shachi ? Crie-t-elle dans l'appartement, sachant son autre colocataire déjà parti.
Pas de réponse. Le seul son parvenant à ses oreilles vient de l'extérieur, cette moto ronronnante qui se gare devant l'immeuble comme chaque matin. Posant sa tasse dans un équilibre précaire sur le bord de l'évier, Hiyori se dirige vers la chambre de l'étudiant. Elle toque.
- Shachi ?
De l'autre côté de la porte, seul un râle étouffé lui parvient. Elle entre, faisant fit de l'odeur de transpiration masculine qui règne dans la pièce. Au fond, roulée en boule dans sa couette, une masse se détache.
- Je suis pas au top là Hiyo, désolé... Chuchote le jeune homme d'une voix faible.
Hiyori s'approche, inquiète. Non pas que la situation prête à s'affoler, mais voir ses proches malades rend la rousse quelque peu paniquée. Surtout aujourd'hui. Elle pose une main sur son front.
- T'es brûlant, ça va pas du tout ! "
C'est décidé : pas de cours qui tiennent, elle restera à son chevet toute la journée s'il le faut. Tentant de ne rien renverser, elle apporte de l'eau fraîche, une réserve de cachets et un linge humide auprès du convalescent. Alors qu'elle désespère de lui faire avaler un Dolicrâne, le bruit de la porte d'entrée résonne.
" Y'a quelqu'un ? Interpelle le nouvel arrivant, posant son casque sur le canapé.
- Law ! Crie notre protagoniste tout en débarquant en trombe dans le salon, en petite culotte, comme à son habitude. Shachi va mourir, je veux pas.
Les yeux humides, la voix tremblante, Hiyori semble sur le point de fondre en larmes. Le brun lève un sourcil, puis soupire.
- Y'a jamais rien qui va ici de toute façon. Qu'est-ce qu'il se passe encore ?
- Mais, c'est Shachi...
Il le voit clairement, la rousse ne fait pas semblant : elle a réellement peur. Tout en replaçant ses mèches rebelles, le jeune homme se dirige vers la chambre contaminée. Devant lui, un corps pâle. Malade, sans aucun doute. Mais au bord de la mort, certainement pas.
- Il va mourir ? Questionne l'étudiante en levant les yeux vers son chauffeur.
- Non, il va pas mourir, débile. Il a juste de la fièvre, conclut l'apprenti médecin du jour. Maintenant va te changer, on va être en retard. "
Une moue dubitative accrochée au visage, Hiyori s'exécute, traînant des pieds tout en rejoignant sa chambre. Quelle journée de merde. Law, lui, se permet d'ouvrir la fenêtre. Un peu d'air frais ne fera de mal à personne ici. Fatigué de jouer la bonne mère de famille, il prend la direction de la sortie sans un regard vers la couette mouvante.
" Eh, Law, l'appelle Shachi en se tournant difficilement vers lui. C'est aujourd'hui...
- De ?
- Les cinq ans de la mort d'Ace.
- Ah.
- Je sais que votre truc, c'est plutôt de vous engueuler mais... Tu peux l'accompagner au cimetière, s'il te plaît ? Elle te dira que c'est pas la peine, qu'elle va bien, mais-
- Mais c'est pas vrai ?
- Hum.
- J'ai rien de prévu ce soir. "
La conversation est close. Il les a bien vu, ces cernes qui grandissent depuis des semaines sous les yeux de la rousse. Lorsqu'il partage ses nuits, il l'entend se débattre dans des cauchemars infinis, sans savoir comment l'en libérer. Elle l'inquiète, alors même qu'il se persuade de rester loin des problèmes des autres. Et, comme un bon samaritain, se disant qu'il ne le fait que par obligation envers leur contrat, il annulera ses plans du soir pour errer dans un cimetière aux côtés d'elle. Celle qui arrive du bout du couloir, vêtue de ses éternels jean et docks, un sweat trop large recouvrant ses épaules. Elle baille. Soupire. Cette journée, Hiyori ne veut pas la traverser. Elle ne veut pas se retrouver face aux regards de ceux qui savent, face à cette pitié à peine cachée, ces " désolés " qui ne ramèneront pas son frère, ces actes de gentillesse forcés et surtout pas ces étreintes de gens qu'elle côtoie à peine et qui pensent, du jour au lendemain, que c'est de leur affection dont elle a besoin.
" Grouille, j'ai pas ton temps, hèle Law en ouvrant la porte.
Relevant ses yeux du sol, elle croise les siens. Heureusement qu'au moins un d'eux ne s'embarrasse pas de condoléances. Au pas de course, elle le rejoint, un mince sourire au coin des lèvres.
- Meurs pas Shachi, je t'aime ! " Hurle-t-elle.
Elle le savait. Ils sont tous là, à éviter son regard, à la saluer avec attention, à lui tapoter l'épaule doucement, à lui lancer des phrases vides pleine de compassion. Hiyori peste. Elle déteste ça. Assis à côté d'elle, remplissant l'espace vide laissé par Shachi, le brun ne loupe pas ces étudiants devenus doux agneaux l'espace de quelques minutes. Il en a vu passer, plus jeunes, à la mort de ses parents, ces gens miséricordieux qui, d'une simple étreinte pense apaiser les souffrances. Il avait besoin d'une épaule, il s'est retrouvé avec des yeux emplis de pitié. Et les siens, comme ceux de la rouquine, se gorgeait de dégoût, voilant la tristesse qui l'habitait.
" On dirait presque que c'est toi qui va mourir ce soir, lâche-t-il en soufflant du nez.
- T'as vu ? Soulève sa voisine en claquant ses mains sur la table. Ils sont insupportables. C'est comme ça tous les ans. Puis à force, ça a fait le tour de l'université...
Elle soupire, encore. En attendant le dernier cours de la journée, Hiyori se met à chercher les horaires de bus sur son portable. J'aurais dû prendre la caisse, j'ai pas pensé. Celui qui passe par le cimetière fait le tour de la ville, la soirée risque d'être bien longue.
- Je t'emmène, chuchote Law en voyant l'enseignante entrer.
- Où ça ? Quand ? Demande notre protagoniste, perdue, tout en ouvrant son ordinateur.
- Au cimetière.
- Mais-
- On va ajouter ça au contrat, t'inquiète ", lui sourit-il, l'empêchant d'hésiter.
[Encore merci pour vos lectures sur ce quatorzième chapitre, pas d'inquiétude, il reste encore des aventures à vivre à notre faux couple, mais sachez que nous avons déjà dépassé la moitié de l'histoire... Continuez de suivre ça de près !]
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Ne me dis pas je t'aime [Law X OC]
FanfictionQuand l'homme le plus convoité de la faculté propose à Hiyori de devenir sa fausse petite-amie, elle pense à une blague. Mais Law est bel et bien sérieux. L'une est sauvage et colérique ; l'autre, dragueur et solitaire. Un duo que tout oppose, oblig...